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samedi 26 avril 2025

QUAND MADAME LA MAIRE SE TIRE TROIS BALLES DANS LE PIED !



Malgré une communication très maîtrisée lorsqu’elle est réfléchie, je ne cesse de m’étonner devant les balourdises de certains de nos élus… Cette fois, Madame le maire a fait très fort en se tirant non pas une, non pas deux, mais trois balles dans le pied ! Explications.

Il y a quelques jours, la mairie informait nos concitoyens de la fermeture du parc des thermes, suite à des dégradations. Effectivement, quelques mètres carrés d’une pelouse nouvellement plantée avaient été piétinés par deux ou trois abrutis, qui en avaient également profité pour jeter des pierres dans le bassin des thermes. La vigilance de Forgeois présents sur les lieux avait mis fin à ces incivilités. Fidèle à sa politique du moins « j’en fais, mieux je me porte », la municipalité a alors décidé de fermer en totalité le parc au public, exception faite d’une inauguration municipale (de quoi, on se le demande), des « Incroyables Forgeois » qui y cultivent le jardin partagé, et de la structure d’accueil des tout-petits, qui tous deux conservent la possibilité d’y maintenir leurs activités.

Or, selon plusieurs lecteurs de ce blog qui me l’on signalé, des Forgeois auraient réagi sur un réseau dit-social à la fermeture totale du parc et ils m’ont fait suivre les messages qui y avaient été écrits. Une des réactions s’interrogeait sur le fait de punir les Forgeois en restreignant l’accès au parc – qui plus est pendant une période de congés scolaires – alors que des caméras de vidéosurveillance devraient permettre de « sanctionner uniquement les responsables » des dégradations. A cette interrogation anodine s’il en est, Madame la maire s’est vite fendue d’une réponse hilarante, qui démontre encore une fois que si la municipalité veut répondre rapidement elle le peut… La réponse porte tout d’abord sur les caméras de sécurité. Je cite un extrait de la réponse : « ce qui est recherché n’est pas tant de punir mais bien d’éviter les détériorations avant que cela se produise ». Outre une construction syntaxique discutable, cette réponse est en effet hilarante car elle confirme toute l’inutilité de ces caméras. En effet, si le but est bien de prévenir la commission d’une infraction comme affirmé dans la réponse communale, c’est raté ! Première balle donc, Madame la maire reconnait que les caméras qu’elle nous a tant vantées et qui ont couté « un petit billet » n’ont servi à rien. Rien d’étonnant : cette inutilité préventive a été rapportée à plusieurs reprises par nombre de spécialistes de la question, y compris des membres des forces de l’ordre. Je m’en suis d’ailleurs fait l’écho dans ce blog (1,2).

Deuxième gag, Madame le maire écrit qu’elle est ravie « que le parc des thermes encore peu connu il y a cinq ans puisse aujourd’hui manquer ». Premier point : comment, être heureux ou heureuse que quelque chose manque à ses administrés ? Mais surtout, en l’espèce, Madame le maire ne devrait pas faire de son ignorance une généralité. Le parc a, en effet, été très fréquenté par les Forgeois, et ce en de nombreuses occasions : fêtes des thermes bien sûr, puisque celles-ci existent depuis au moins 2010, concours de pêche, balades contées, événement Forges 1900, rallye vélo, fêtes de la musique, pour n’en citer que quelques-uns. Bref, notre élue en chef démontre dans sa réponse son manque de connaissances du passé communal, ce qui semble quand même assez consternant quand on est aux affaires depuis un moment. Il est vrai que l’implication d’élus de la commune dans la vie locale reste pour certains très limitée pour ne pas dire quasi inexistante.

Dernier maillon de cette chaîne, l’éditorial de Madame le maire dans le dernier numéro du Petit Forgeois, que je viens de découvrir. Outre l’absence de vision politique globale que ces éditoriaux révèlent systématiquement, on y retrouve deux phrases qui valent leur pesant de cacahouètes. La première est « œuvrer pour le développement du commerce local ». Je renvoie pour explication à un article récent de ce blog qui explique en quoi on frôle ici le propos mensonger, la commune ayant fait beaucoup pour décourager, en fait, nombre d’acteurs du commerce local (3). Mais le plus naïf et drôle est sans doute la phrase « nous continuerons de rattraper le retard dans l’entretien du patrimoine communal ». Alors que cette municipalité est depuis cinq ans aux affaires, ce propos constitue de facto un aveu, un premier bilan de son inefficacité et au-delà, une démonstration de l’inanité de la gestion qu’elle a mise en place depuis 2020.

En revanche, trois balles dans le pied d’un coup ou presque, chapeau !


Références :

1. Vidéosurveillance : une très décevante réunion publique. Ce blog. Novembre 2021.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2021/11/videosurveillance-une-tres-decevante.html

2. Vidéosurveillance : « game over » ! Ce blog. Février 2022.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2022/02/videosurveillance-game-over.html

3. Les petits et gros mensonges de la municipalité. Chapitre III. Ce blog. Novembre 2024.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2024/11/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html

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Illustration personnelle à partir d’un gif animé

jeudi 24 avril 2025

QUI SE CACHE DERRIÈRE L’INQUIÉTANT PRÉSIDENT AMÉRICAIN ?



Voilà quatre mois que M. Donald Trump a pris ses fonctions de président des Etats-Unis. En quatre mois, il aura déstabilisé le monde entier sur les plans sécuritaire, économique et environnemental. Il aura aussi dégradé une situation intérieure pas aussi brillante que présentée et surtout, il aura engagé son pays sur la voie de l’autoritarisme et possiblement de la dictature. C’est pour cela qu’il semble important de savoir s’il « roule seul » ou s’il ne constitue que l’avant-garde de forces bien plus importantes et dangereuses pour la sécurité mondiale.

Le bilan des quatre mois de l’administration Trump mériterait à lui seul un article pour en détailler les divers axes majeurs. En ce sens, le brillant discourt de M. Claude Malhuret (1) peut être réécouté à la fois pour sa pertinence et sa qualité de présentation, même si le constat qu’il y dressait reste encore partiel. Ce billet ne se veut ni ne peut prétendre à l’exhaustivité mais il tente de dégager quelques lignes de forces autour desquelles s’articule la politique états-unienne actuelle.

Les points marquants de ces quatre mois se regroupent autour de trois grands axes interpénétrés : l’économique, le politique, et le social, et ce au national comme à l’international. Or, de nombreux éléments factuels corroborent le fait que le projet Trump s’apparente clairement au « projet 2025 » de la Heritage Foundation (2). Ainsi, selon CNN plus de 140 personnes travaillant pour la campagne de M. Donald Trump ont contribué à la rédaction du projet 2025, dont six sont ses secrétaires de cabinet et un septième son premier adjoint au chef de cabinet (3). Par ailleurs, le vice-président lui-même, M. James D. Vance, a contribué à la rédaction du projet 2025 dont il a écrit l’avant-propos (4). Cet opus de plus de 900 pages promeut des idéaux extrêmes, alignés sur les éléments les plus radicaux de la chrétienté dont il se revendique. Il propose quatre objectifs principaux : démanteler l'administration, défendre les frontières de la nation, restaurer la famille en tant qu’élément central de la vie américaine, et garantir certains droits individuels aux citoyens, droits conçus comme étant d’essence divine…

Bien que cet élément ne soit pas présenté comme tel, le projet 2025 vise également au renforcement du pouvoir présidentiel. Ceci passe par la mise au pas « du département de la Justice (DOJ), du Federal Bureau of Investigation (FBI), du département du Commerce, de la Commission fédérale des communications et de la Federal Trade Commission (FTC) » (2). La suppression ou l’inactivation de plusieurs agences est également envisagée dans le projet 2025, dont celles œuvrant dans le domaine du changement climatique et de la santé, ainsi que la suppression du ministère de l’éducation nationale. Or les faits sont sans ambiguïté : ces agences et ce ministère sont bien dans le viseur de l’administration Trump, qui a eu parmi ses premières priorités de sortir des accords de Paris, de rouvrir des droits de forage pétrolier en Alaska, de faire disparaitre des serveurs les données de l’agence météorologique nationale, et de confirmer sa volonté de supprimer le ministère de l’éducation… En ce qui concerne la santé des Etats-Uniens, vaste sujet, le projet 2025 incite à ce que le département de la santé et des services sociaux (Department of Health and Human Services ou HHS) redevienne connu « sous le nom de Département de la Vie ». En ce sens, le projet 2025 combat le droit à l’avortement, qu’il souhaite criminaliser. Par ailleurs, rappelons que le ministre de la santé américaine n’est autre que le complotiste anti-vaccination bien connu, M. Robert F. Kennedy. Celui-ci s’est illustré en indiquant que le vaccin anti-Covid avait aggravé la pandémie dans certains pays, en établissant un lien qui n’existe pas entre autisme et vaccination, ou en affirmant que son ennemi juré le Dr. Anthony Fauci, immunologiste, et conseiller en chef de huit présidents américains, aurait formé une alliance de type Etat-profond dans le domaine de la santé avec M. Bill Gates et des chefs d’Etats étrangers...

Il n’est donc pas étonnant que derrière M. Donald Trump, se trouve un aréopage de personnalités issues de différents milieux, mais possédant des intérêts convergents. On peut globalement identifier trois secteurs d’influence, là aussi interpénétrés : des paléo-conservateurs chrétiens d’extrême droite, des capitalistes bon teint, et des libertariens dont le plus célèbre est dans doute M. Elon Musk.

Au titre des capitalistes bon teint soutiens de la politique de M. Donald Trump, nous retrouvons un ensemble de personnalités des milieux d’affaires, avec des individus issus des entreprises des énergies carbonées, mais également des personnalités issues du secteur dit de la « tech », Gafa en tête. On peut citer en sus du précédent nommé, M. Jeff Bezos, patron d’Amazon, M. Mark Zuckerberg, patron de Meta, ou Ms. Sundar Pichai et Sergei Brin, de Google. On trouve aussi des banquiers d’affaire tels M. Howard Lutnick, ancien patron de la banque d’investissement Cantor Fitzgerald et toute une série de responsables qui ont rapidement retirés leurs établissements de l'alliance bancaire pour le climat. Ceci est le cas des responsables de Morgan Stanley, Citigroup, Bank of America, Wells Fargo et Goldman Sachs… En termes d’objectifs, on peut y voir des entreprises qui cherchent à maximiser leur taux de profit, en soutenant des politiques de dérégulation massive, et/ou antisociale à base de « cost-killing ».

Les libertariens sont sans doute les plus complexes à cerner. Ils semblent cependant relever pour un grand nombre d’entre eux, d’un mouvement assez peu connu en France, appelé le « dark enlightenment ». Cette tendance néo réactionnaire, apparenté à la fachospère (on rappellera ici les saluts nazis produits par Ms. Stephen Bannon et Elon Musk), se veut anti-démocratique, anti-égalitariste et s’inscrivant fondamentalement « en réaction aux valeurs des Lumières » (5). Ainsi, ce mouvement vise à « favoriser un retour aux constructions sociétales traditionnelles et aux formes de gouvernement telles que le monarchisme absolu » (5). Proche et influencé par le libertarisme, « le mouvement plaide pour des cités-États capitalistes autoritaires qui se disputent les citoyens. Il rejette également les visions progressistes comme des menaces pour la civilisation occidentale » (5). Ce mouvement promeut également une certaine forme de racisme qu’il appuie sur des pseudos théories scientifiques. Pour ces néoréactionnaires, le statut socio-économique est « un indicateur puissant du QI ». Également, la méritocratie, thème repris in extenso par l’administration Trump, doit être mise en avant. Pour eux, il existe des arguments en faveur de l'infériorité raciale des Noirs, infériorité supprimée par la civilisation occidentale. La conquête spatiale, thème cette fois cher à M. Elon Musk, est un élément important de la sphère néo-réactionnaire, car elle est perçue « comme un filtre génétique hautement sélectif » qui « favorisera principalement les Blancs et les Asiatiques » (5).

Les paléo-conservateurs chrétiens d’extrême droite que l’on retrouve dans le projet 2025, ont les traits du vice-président, M. J.D. Vance, mais aussi de la porte-parole du gouvernement Trump, Mme Karoline Leavitt, elle-même à l’origine du chapitre « gouvernance conservatrice » du « programme de formation » du projet 2025. C’est aussi le cas de Ms. Peter Navarro, Brendan T. Carr, Michael Anton, Paul S. Atkins ou Steven G. Bradbury tous contributeurs du projet et membres de l’administration Trump. Comme l’écrivaient des membres du collectif Rogue ESR : « hostiles au programmes sociaux, [ces individus] souhaitent annihiler les droits civiques et entraver l’État pour le rendre incapable de justice sociale. Les MAGA militent contre l’impôt et dénoncent l’emprise des parasites d’en-bas sur l’État, attaquent les droits des femmes et s’en prennent aux migrants, aux minorités sexuelles et à leurs défenseurs, y compris universitaires. C’est à cette composante que l’on doit la stratégie [de l‘inondation permanente] consistant à sidérer par le déploiement permanent de la souveraineté grotesque » (6), entendre par là par le déploiement permanent de propos décalés, absurdes, voire injurieux, établis en mode de gouvernance.

Rien d’étonnant que ces trois cercles, paléo-conservateurs chrétiens d’extrême droite, capitalistes bon teint, et libertariens s’entendent finalement plutôt bien pour mettre à bas les institutions démocratiques et la société civile américaine, ainsi que « les droits civiques, les organismes de régulation climatique, environnementale, sanitaire et agro-industrielle, et les institutions scientifiques accusées de produire le fondement scientifique des régulations, de soutenir les droits des minorités sexuelles et ethniques, de documenter les inégalités et les injustices économiques et sociales » (6).

Le schéma est complet si on ajoute à cela que ces trois cercles du pouvoir « gèrent harmonieusement leurs différences en matière géopolitique puisqu’il s’agit de vassaliser des pays étrangers à des fins de prédation de matières premières et de captation de valeur par inféodation, [mais aussi] de soutenir les alliances entre extrême-droite et conservateurs partout en occident pour éradiquer le progressisme et les aspirations démocratiques ». Deux certitudes : Trump n’est pas seul dans ses délires, et dans « ce moment de bascule générale, nous avons très peu de temps pour tenter de juguler le désastre » (6).


Références :

1. Claude Malhuret. Discours prononcé à la tribune du Sénat. Mars 2025.
Consultable en ligne :
https://clio-texte.clionautes.org/discours-claude-malhuret-trump-ukraine.html

2. Collectif. Projet 2025. Wikipédia.
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_2025

3. Steve Contorno. Trump claims not to know who is behind Project 2025. A CNN review found at least 140 people who worked for him are involved. CNN, juillet 2024.

4. Martin Pengelly. JD Vance writes foreword for Project 2025 leader's upcoming book ». The Guardian, juillet 2024.

5. Collectif. Dark Enlightenment. Wikipedia.
Consultable en ligne :
https://en.wikipedia.org/wiki/Dark_Enlightenment

6. Rogue ESR. La triple alliance étatsunienne. Mars 2025.
Consultable en ligne :
https://rogueesr.fr/category/billets/


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Image Pipxabay générée par IA :
https://pixabay.com/fr/illustrations/dark-vador-atout-donald-trump-8295914/





mardi 8 avril 2025

NOTRE MUNICIPALITÉ N'AIME - VRAIMENT - PAS LES ASSOCIATIONS !



Combien de fois ai-je relaté ici les désagréments, les mésaventures, le mépris, les mensonges, voire les insultes que cette municipalité a depuis 5 ans jetés à la face de nombreuses associations… Il serait naïf et faux de croire qu’elle reverrait son comportement, tant celui-ci semble inscrit dans son modus operandi, tant les cultures désintéressées et associatives sont étrangères à son monde…

Les deux derniers exemples en date sont tout à fait caractéristiques des comportements de l’équipe municipale. Ainsi, mardi dernier, des associations forgeoises reçoivent un message de la mairie leur indiquant que les salles qu’elles utilisaient pour leurs activités au centre socio-culturel ne leur seraient pas accessibles samedi, soit 3 jours plus tard ! Ce mardi étant le 1er avril, on a espéré avoir affaire à un canular ! Mais non ! Le centre devait en effet accueillir une manifestation organisée par la CCPL, en l’espèce les journées des métiers d’arts. Alors, juste quelques remarques. Primo, il est difficile de croire que cette journée ait été montée « à l’arrache », lors de la semaine précédente… Si j’en crois mes honorables correspondants, ce projet existe en réalité depuis plusieurs mois. Deuxio, difficile de croire également que le choix se soit porté sur Forges au tout dernier moment. C’est en effet le genre d’évènements pour lequel il est indispensable de pouvoir compter sur des locaux appropriés et disponibles. Tout se passe donc comme si les élus s’étaient rendus compte que très tardivement que les salles utilisées l’étaient aussi par des associations. Or, comme les association sont les 28e roues du carrosse à Forges, rien d’étonnant à ce qu’elles aient été prévenues juste trois jours à l’avance…  Enfin dernier point au sujet de ce nouvel et regrettable exemple du mépris communal vis-à-vis du monde associatif, aucune des salles utilisées par la MCL ou Forges en transition n’était occupée le jour de la fête des métiers d’art. Une nouvelle fois, la municipalité a juste mis un veto sur l’activité associative, sans raison valable…

Ensuite, j'avais évoqué dans un précédent billet le fait que la marie a fermé ou rendu difficile voire impossible l’accès de plusieurs associations aux locaux et surfaces communales. En cinq ans, j’estime en effet que ce sont environ 500 à 1000 m2 dont l‘accès est maintenant impossible, ou fortement restreint, dont le rez-de-chaussée et l’étage de la salle polyvalente, l’ancienne AMM/mairie, et plusieurs salle du centre socio-culturel dont Messidor et Floréal. Parmi ces surfaces, j’avais aussi cité la maison des associations, occupée par l’académie des musiques modernes (AMM), mais d’où ont été chassées toutes les autres structures non municipales. Dernière étape en date, confirmant ce fait, la maison des associations a été débaptisée par la municipalité pour ne conserver que le titre « d’escapade culturelle », une activité qui n’est d’ailleurs pas l’activité principale menée dans ce bâtiment. Ce changement de nom a au moins le mérite de la clarté, confirmant de fait le peu de place qu’occupe le monde associatif dans la commune. En incidente, vu la façon dont les choses se passent, je serais l’AMM, je commencerais à me faire des cheveux quant à la possibilité de continuer à utiliser ce bâtiment dans l‘avenir. D’autant, comme je l’indiquais précédemment, que l’accès à la grande salle de répétition leur est maintenant interdit. Tout ceci n’empêchera pas la commune de se prévaloir dès qu’elle le peut de son soutien au monde associatif, soutien qui ressemble de plus en plus à celui dont M. Donald Trump fait preuve lorsqu’il dit soutenir l’Ukraine…  


lundi 24 mars 2025

INQUIÉTANT PAPIER DU SAN FRANCISCO CHRONICLE...


J'ai eu la chance de travailler pendant 2 ans aux Etats-Unis, à la fin des années 80, dans un hôpital et deux universités américaines, dans l'Illinois puis en Californie. Je garde certaines habitudes de ces séjours, entre autres celle de lire de temps en temps les journaux de référence états-uniens, dont le Washington Post et le New York Times. J'y ajoute des journaux moins connus mais qui me rappellent mes lieux de séjours outre-Atlantique, à savoir le Chicago Tribune et le San Francisco Chronicle.

Ce dernier journal est l'un des plus importants journaux de Californie. Crée en 1865, plutôt démocrate aujourd'hui, il appartient à la Hearst Corporation fondée, elle, par le magnat de la presse William Randolf Hearst, celui-là même dépeint dans le film « Citizen Kane » d'Orson Welles. Or je viens de voir passer dans ce dernier journal un article très inquiétant (1), signé par M. Brett Wagner. Aujourd'hui retraité, cet auteur a été professeur en matière de sécurité nationale à l'U.S. Naval War College et chercheur adjoint au Center for Strategic and International Studies. Cet institut est bien entendu très proche des milieux de défense des Etats-Unis. Depuis 2000, il est d'ailleurs dirigé par M. John Hamre, qui fut le 26e ministre de la défense. J'ai traduit ce document en intégralité ci-dessous. Il est intitulé « Trump se prépare-t-il à invoquer l'Insurection Act » (loi fédérale des États-Unis qui autorise le président déployer l'armée sur le territoire des Etats-Unis pour mettre un terme aux troubles civils, à l'insurrection et à la rébellion). Voici ce qu'il dit :

« L'horloge tourne en regard d'une partie cruciale mais peu remarquée de la première série de décrets du président Donald Trump, celle qui charge les secrétaires du ministère de la défense et du ministère de la sécurité intérieure de soumettre un rapport conjoint, dans les 90 jours, recommandant « d’invoquer ou non la loi sur l’insurrection ». 

Beaucoup d’entre nous retiennent désormais leur souffle, sachant que ce rapport et ce qu’il contient pourraient nous conduire sur la pente glissante d'un pouvoir présidentiel incontrôlé, sous la direction d’un homme ayant une sympathie marquée pour les dictateurs à la poigne de fer. Le récent « massacre du vendredi soir » au Pentagone - c'est à dire le licenciement du plus haut officier en uniforme du pays et la révocation d'autres garde-fous bien connus (c'est-à-dire les meilleurs avocats en uniforme de l'armée de terre, de la marine et de l'air) se dressant entre le président et son intention déclarée de longue date de déclarer la loi martiale à son retour au pouvoir - a ajouté au suspense. Coïncidence? En attendant de le savoir, c'est le moment de regarder cela de plus près. 

Supposons, par exemple, que Trump invoque la loi sur l’insurrection et déclare la loi martiale. Il ne serait même pas tenu, de par la loi, d’alléguer une « insurrection ». Il suffirait d’affirmer qu’une « obstruction illégale » a rendu « impossible l’application des lois des États-Unis » (comme l’a fait le président Dwight D. Eisenhower lorsqu’il a ordonné à la Garde nationale de l’Arkansas d’imposer la déségrégation dans les écoles de Little Rock, Arkansas). Or, c’est là que toutes les fausses affirmations et les mensonges purs et simples propagés par Trump et ses alliés politiques entreront en jeu : Trump alléguant faussement, par exemple, qu’une ville entière du Colorado a été prise par des gangs de rue vénézuéliens, qu’une ville de l’Ohio a été envahie par des réfugiés haïtiens qui mangent tous les chats et tous les chiens, et d’autres affirmations non étayées selon lesquelles « des millions et des millions » de « clandestins » affluent dans notre pays chaque semaine (ou chaque jour selon la personne qui mentira alors). 

Chacune de ces fausses affirmations et purs mensonges pourraient être distillés pour déclarer la loi martiale en phrases accrocheuses (commençant par le terme « attendu que ») pour établir la prémisse juridique qui permettra d'invoquer la loi sur l’insurrection, et de poser le prédicat pour fouiller chaque maison, où bon leur semblera, sous prétexte de rechercher des immigrants sans papiers qui n’existent pas. Malgré la complexité logistique qui y est liée, et sans parler de facteurs tels que la taille du territoire et de la population des États-Unis, une mise en œuvre de la loi martiale pourrait cependant être rapide. Prenons par exemple cette ville du Colorado, Aurora : pendant les mois qui ont précédé l’élection, Trump et ses sbires ont répandu des mensonges insensés, promettant de vastes descentes des services de l’immigration s’ils étaient élus.

Il se trouve qu’Aurora possède déjà son propre bureau d’immigration et de douane, et qu’une base militaire existante vient d’être utilisée comme centre de détention « temporaire ». Le projet 2025 propose en outre d’aller au-delà du plan de Trump, en cours mais qui serait progressivement abandonné, visant à héberger jusqu’à 30 000 détenus en continu dans la base de la marine américaine de Guantanamo Bay, à Cuba. Pour cela, il est proposé d'amener Guantanamo chez nous, chez vous, en créant des Guantanamo supplémentaires dans tout le pays. L’un de ces potentiels Guantanamo qui, je crois, est à l’étude est l’ancien centre de détention de Leavenworth, un ancien avant-poste du « complexe industriel carcéral » à but lucratif du pays, situé près de Kansas City, dans le Missouri. Les habitants des environs sont en armes, dans l’espoir d’empêcher la réouverture du site, précédemment fermé en raison de violations flagrantes des droits de l’homme. J'ai récemment fait un voyage pour le voir et j'ai été horrifié à l'idée que des centaines, voire de milliers de familles sans papiers pourraient être rassemblées là comme le bétail qui paissait de l'autre côté de la route.

Bien entendu, n’importe lequel de ces Guantanamos pourrait également être utilisé pour détenir des américains, puisque Trump tâte le terrain en matière de suppression du droit du sol de certains de nos concitoyens. Le vice-président J.D. Vance a même suggéré que si les tribunaux se prononçaient contre le président au sujet de la suppression du droit du sol [droit de naissance dans le texte], alors son cher leader pourrait simplement ignorer l'ordonnance. « Mais qu’en est-il de la désobéissance civile ? » demanderiez-vous ; « Vous ne pouvez pas transformer l’Amérique en Corée du Nord du jour au lendemain ! » La seule chose qui a arrêté Trump la dernière fois qu’il a ordonné à l’armée d’ouvrir le feu sur les manifestants américains (« ne pouvez-vous pas simplement leur tirer dessus ? Il suffit de leur tirer dans les jambes ou quelque chose du genre ? ») a été le refus de son secrétaire à la défense et général en chef de l’époque d’exécuter son ordre. Quatre ans plus tard, l'investisseur en capital-risque qui devrait être notre prochain général en chef est un des chéris des mouvements d'action politique conservatrice qui, selon Trump, portait un chapeau MAGA lorsque tous deux se sont rencontrés en Irak...

D’autres postes vacants attendent aussi d’être pourvus. Il en est ainsi de meilleurs avocats en uniforme de l’armée de terre, de la marine et de l’air, des généraux trois étoiles chargés d’examiner les ordres du commandant en chef et du secrétaire à la défense, afin d'en évaluer la légalité. Cherchant à lever tout doute sur les raisons pour lesquelles les officiers précédents avaient été limogés, l'actuel secrétaire à la défense Pete Hegseth a récemment expliqué que cette mesure avait été prise de manière préventive, pour les empêcher de bloquer « les ordres donnés par un commandant en chef ». Merci d'avoir tout haut ce qui devait resté caché. On dirait que Trump est sur la bonne voie pour trouver les bons « béni-oui-oui » cette fois-ci... 

En attendant, ne quittez pas Elon Musk des yeux. En effet, est-ce un hasard si le président a laissé totale liberté à l’homme le plus riche du monde pour accéder à tous les ordinateurs du gouvernement, ​​permettant à son plus grand donateur de campagne - le propriétaire de l’une des plus grandes sociétés d’intelligence artificielle au monde - d’accéder à tout ce que le gouvernement sait sur vous, au moment même où il pourrait se préparer à imposer la loi martiale ? C’est un fait qu’aucun d’entre nous ne devrait considérer comme une simple coïncidence ».

Ce texte est donc très inquiétant puisqu'il indique que depuis sa nomination, tout se passe comme si M. Donald Trump, après avoir éliminé tous les contre-pouvoirs, s'apprêtait à déclarer la loi martiale aux Etats-Unis, sous des prétextes totalement fallacieux, le tout avec l'aide de M. Elon Musk et de ses affidés. 

J'espère pour les Etats-Unis et pour la sécurité du monde que les propos traduits ci-dessus resteront au niveau de l'erreur d'analyse. Malheureusement, plus les jours passent, plus on s'aperçoit de l'énormité de la dérive - par de nombreux cotés totalitaire - de l'actuel gouvernement des Etats-Unis. Or, le pire est toujours possible. Comme le disait M. Claude Malhuret dans son discours devenu célèbre dans le monde entier (2) : « Jamais aucun [président américain] n’a piétiné la constitution américaine, pris autant de décrets illégaux, révoqué les juges qui pourraient l’en empêcher, limogé d’un coup l’état-major militaire, affaibli tous les contre-pouvoirs et pris le contrôle des réseaux sociaux. Ce n’est pas une dérive illibérale, c’est un début de confiscation de la démocratie. Il n’a fallu qu’un mois, trois semaines et deux jours pour mettre à bas la République de Weimar et sa constitution ». Ne pas l'oublier...    


Références :

1. Brett Wagner. Is Trump preparing to invoke the Insurrection Act? Signs are pointing that way.
The San Francisco Chronicle. Mars 2025.
Consultable en ligne :
https://www.sfchronicle.com/opinion/openforum/article/insurrection-act-president-trump-20201819.php 

2. François Vignal. « Cour de Néron », « bouffon sous kétamine », « roi du deal » : l’intégralité du discours du sénateur Claude Malhuret sur les Etats-Unis. Public Sénat. Mars 2025.
Consultable en ligne :
https://www.publicsenat.fr/actualites/international/cour-de-neron-bouffon-sous-ketamine-roi-du-deal-lintegralite-du-discours-du-senateur-claude-malhuret-sur-les-e 

 

Crédit illustration :

Dessin de Barry Blitt pour "The new Yorker". Janvier 2025.
Vu sur le Courrier International.
Consultable en ligne :
https://www.courrierinternational.com/une/une-du-jour-donald-trump-dictateur-en-devenir

 

 


mercredi 12 février 2025

ODIEUSE RÉCUPÉRATION DE L'EXTRÊME-DROITE FRANÇAISE


Une fois n'est pas coutume, je publie ici une copie très large d'un article récent du journal L'Humanité. Je n'aurais pu écrire mieux sur ce sujet ! Ce papier détaille comment l'extrême droite française, de plus en plus présente en particulier sur les réseaux dits sociaux, a récupéré l'affaire Louise, du nom de l'adolescente tuée entre Epinay-sur-Orge et Longjumeau. Instructif !

L'article en référence (1) revient tout d'abord sur les circonstance matériel du drame. Je n'en ferai pas état ici. D'une part, l'objet du blog n'est pas la présentation d'affaires criminelles ou crapuleuses et, d'autre part, ce n'est pas le sujet de ce billet. Je reprends donc le texte de l'article à partir de l'ouverture de l'enquête par le parquet d'Evry. 

Je cite : « Le parquet d’Évry a annoncé l’ouverture d’une enquête « pour meurtre sur mineur », confiée à la direction de la criminalité organisée et spécialisée des Yvelines et à la direction nationale de la police judiciaire. Un couple d’une vingtaine d’années a d’abord été placé en garde à vue, puis relâché, à ce stade sans poursuites. Depuis trois suspects, deux hommes et la mère de l’un d’eux, ont été à leur tour placés en garde à vue. « Les enquêteurs de la DCOS 78 ont procédé, dans le cadre de l’enquête ouverte par le parquet concernant le meurtre de la jeune Louise, à l’interpellation ce soir à 20 heures d’un homme, âgé de 23 ans », a indiqué le procureur de la République d’Évry, Grégoire Dulin, dans un communiqué diffusé dans la nuit de lundi à mardi 11 février.

Il a précisé que le suspect était entendu pour meurtre sur une mineure de moins de 15 ans. Le parquet avait fait état auparavant de l’arrestation de l’autre homme, lui aussi âgé de 23 ans et mis en cause pour meurtre sur une mineure de moins de 15 ans, et de sa mère. Âgée de 55 ans, cette dernière est interrogée pour non-dénonciation de crime.

À Épinay-sur-Orge, comme dans tout le pays, l’émotion est vive. Des fleurs et des bougies ont été déposées à l’entrée du collège, en souvenir de l’enfant et en soutien à sa famille. Une centaine de personnes ont également assisté à une messe, donnée en sa mémoire, alors que de nombreuses autres se sont rassemblées sur le parvis. Olivier Marchau, le maire (sans étiquette) d’Épinay-sur-Orge, qui était présent pour ce « moment de recueillement », a annoncé la mise en place de « cellules psychologiques » pour les habitants et dans l’établissement de Louise.

Face à ces manifestations respectueuses, une odieuse instrumentalisation est pourtant à l’œuvre. L’extrême droite, qui capitalise sur les faits divers pour mieux les imputer à son obsession, l’immigration, n’a pas attendu bien longtemps. Le père de la victime aurait pourtant demandé « qu’aucune récupération politique ne soit réalisée sur (leur) malheur », affirme, dans un post sur X du 8 février, l’animateur de télévision Christophe Beaugrand-Gerin, qui précise que les membres de la famille de l’enfant sont « des proches ». Cette demande légitime – qui ne devrait même pas avoir à être énoncée – n’a pas empêché une récupération alimentée par la fuite des noms de deux suspects.

Le média d’extrême droite Frontières nomme ainsi explicitement l’un des premiers suspects, mentionnant son « origine nord-africaine », alors que sa compagne n’est qu’évoquée. L’article, mis à jour, indique que le couple a été relâché… mais le nom demeure. Le JDD [Note du rédacteur : Journal du Dimanche, devenu publication d'extrême droite depuis son rachat par le groupe Bolloré] évoque un suspect de « type nord-africain », donnant le prénom et l’initiale du nom de famille des deux personnes.

Et certains ne rechignent pas à l’amalgame nauséabond et à l’accusation sans preuve. Dans un post sur X, le journaliste pour Frontières et CNews Jordan Florentin exhumait des publications où la sœur de la victime, présentée comme une « militante d’extrême gauche », y aurait « partag (é) les positions de LFI et des propos anti-RN. Sa petite sœur vient d’être tuée dans un bois par un homme de type nord-africain ». Lamentable exploitation politicienne où le pseudo journaliste ose railler la sœur de la victime pour mieux y mêler LFI… L’intéressé a depuis supprimé son tweet « par respect pour la famille » – quid du respect des personnes relâchées et du travail de la justice ? –, mais celui-ci circule toujours sous forme de capture d’écran. Pour l’extrême droite, de toute façon, le meurtrier est toujours un étranger, et l’étranger est toujours un meurtrier en puissance.

D’autres naviguent dans ces mêmes eaux fétides, tel Damien Rieu, cofondateur du mouvement d’extrême droite Génération identitaire – dissous en 2021 par le ministère de l’Intérieur –, membre de Reconquête et de son collectif Parents vigilants. Dans un post du 8 février sur le réseau social d’Elon Musk, il déclare : « En Sicile, la mafia impose l’omerta sur les crimes commis par ses hommes sous la menace de représailles. En France, la gauche impose le silence sur les crimes commis par ses immigrés sous la menace du procès en « récupération ». #Louise ». Une comparaison scandaleuse et une accusation sans la moindre preuve.

Impunité et aplomb sur un réseau social dont le propriétaire s’adonne au salut nazi obligent, certains vont jusqu’à demander le rétablissement de la peine de mort, menacent les autorités de se charger eux-mêmes de régler le problème ou hurlent au « francocide », agitant plus ou moins implicitement le chiffon rouge d’un prétendu « grand remplacement ». La haine enfle, soigneusement attisée sur le dos d’une enfant assassinée. Et tant pis pour le respect de la douleur inimaginable de sa famille ». Fin de citation.

Depuis, un suspect a été arrêté, ses proches également. L'enquête se poursuit avec l'élément probant qu'est l'analyse des traces ADN, compatibles avec celles du suspect. Le procureur de la République d'Evry, M. Grégoire Dulin, a annoncé que les gardes à vue seraient prolongées et qu’une conférence de presse serait tenue pour faire le point sur les avancées le 12 février 2025 au soir.

Remarquablement, le nom du nouveau suspect circule également sur le net, mais n'étant pas à consonance africaine ou étrangère et au contraire bien franchouillarde, la « fachosphère 2.0 » se tait sur le sujet... 


Remerciements :

Je remercie vivement le journal « L'Humanité » pour l'autorisation de publication de son article à titre gracieux.

 

Référence :

1. Jessica Stephan. Meurtre de Louise : vive émotion et odieuse récupération de l’extrême droite. L'Humanité. Février 2025.
Consultable en ligne :
https://www.humanite.fr/societe/extreme-droite/mort-de-louise-vive-emotion-et-odieuse-recuperation-de-lextreme-droite

 

Crédit illustration :

Dessin de Biche pour Charlie :
https://charliehebdo.fr/2023/11/societe/antisemite-francais-eternel-insoumis/

 

 

dimanche 9 février 2025

LES UNIVERSITÉS ET INSTITUTS DE RECHERCHE SUR LA PAILLE !

On le sait, notre pays fait face depuis des années à un problème de finances publiques, les dépenses excédant les recettes. Ceci conduit à financer le déficit par l’emprunt, creusant ainsi la dette et obérant l’action publique sur le long terme… On en voit les conséquences depuis des années, tant la dégradation des services publics est prégnante, de la justice à l’hôpital, des forces de sécurité à l’école… Aujourd’hui, ce billet jette un regard sur la situation de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR), dans une situation plus que critique…

Avant d’aborder le cœur du sujet, il convient que je précise ma pensée. Pour avoir travaillé avec différents services de l’État, j’ai constaté que d’une façon globale notre secteur public souffre d’un excès d’administratifs et d’un manque d’opérationnels. Il y a donc ici des efforts à faire pour rétablir une plus juste répartition des effectifs. Cependant, le problème majeur ne se situe pas là, mais plutôt au niveau de la façon dont les budgets ont été conçus depuis longtemps. Premier point, par volonté et dogmatisme politiques, les recettes de l’État ont été sensiblement rabotées depuis des années. Ainsi, rien qu'en 5 ans, de 2017 à 2022, la politique menée par M. Emmanuel Macron a conduit à une réduction de 80 milliards des recettes publiques. La Cour des Comptes s’en est émue dans un rapport où elle indiquait qu’il était « nécessaire de préserver les recettes des administrations publiques » (1). Ces pertes de recettes sont liées à la suppression ou à la baisse d’impôts tels la taxe d’habitation, l’impôt sur les sociétés ou des impôts de production. On peut y ajouter l’existence de niches fiscales peu efficaces, voire contre-productives tels le crédit d’impôt recherche (autour de 7 à 8 milliards aujourd’hui) et les aides bénéficiant directement aux industries des hydrocarbures, très polluantes. Terminons par les exonérations de cotisations qui « plombent les recettes de la Sécu, comme les primes exceptionnelles défiscalisées ou encore la suppression du forfait social. Résultat, pour 2022, les pertes brutes de recettes liées à ces allègements dépasseraient 83 milliards d’euros, selon les estimations du gouvernement, un montant que la Cour considère comme « sous-évalué » » (2).

Deuxième point : s’ajoutent à ce qui précède l’évasion et la fraude fiscales, pour un montant estimé de 80 à 100 milliards (3), un sujet que nos élites politiques ne semblent pas très pressées de prendre à bras le corps. Ainsi, le nombre d’agents de l’État en charge des finances publiques et des contrôles ne cesse de diminuer depuis 20 ans (3 000 postes perdus), comme diminuent les contrôles sur site des entreprises et des particuliers, malgré les annonces en trompe l’œil du gouvernement (4). On est passé par exemple de 38 359 vérifications générales de comptabilité des entreprises en 2008 à 21 324 en 2022 (alors que leur nombre a cru), et de 4 166 examens de situation fiscale personnelle de particuliers en 2008 à 2 293 en 2024 (4). Sans commentaires !

Tout ce qui précède fait donc que nombre de services publics n’ont plus les moyens de fonctionner correctement. Et comme dans toutes situations budgétaires dégradées, deux domaines sont les premiers à faire les frais de nouvelles restrictions : la culture et la recherche… J’en veux pour preuve les propos récent de M. Antoine Petit, actuel président du CNRS, nommé par M. Emmanuel Macron. M. Petit a indiqué au personnel de son centre de recherches (24 000 personnes) qu’il ne financerait plus de façon conséquente que 25% des laboratoires de recherches (soit 1 sur 4), qu’il appelle à la façon « start-up nation » de son mentor, du terme ronflant de « keylabs ». Faut-il voir là la traduction d’une certaine forme du « darwinisme social » dont il avait fait preuve en énonçant qu’il fallait « une loi ambitieuse, inégalitaire – oui, inégalitaire, une loi vertueuse et darwinienne, qui encourage les scientifiques, équipes, laboratoires, établissements les plus performants à l’échelle internationale » ? Possible. La réalité est pourtant moins clinquante. Les premiers essais de keylabs n’ont, en effet, pas été du tout concluants. « Il serait dommage de ne pas rappeler le glorieux bilan d’un des plus anciens et des plus connus : celui opéré par le Professeur Raoult qui, à la tête de l’université Aix-Marseille-II, en préleva les « meilleurs » chercheurs pour constituer ce qu’on n’appelait pas encore un KeyLab : l’IHU Méditerranée Infection. Le rayonnement de ce KeyLab fut tel qu’il fut salué par M. Elon Musk, le 16 mars 2020, par un tweet qui déclencha l’exaltation de la classe politique mondiale : « Maybe worth considering chloroquine for COVID-19 ». […] Le 9 avril 2020, sur les conseils insistants de M. Bernard Arnault, M. Macron rendait visite à la star mondiale autour de laquelle s’organisait ce KeyLab pionnier. Des mois plus tard, en septembre 2021, il rendrait publique son évaluation mûrement réfléchie : « Il faut rendre justice à Didier Raoult qui est un grand scientifique ». La même année, René Ricol (commissaire général à l’investissement) confirma le verdict : « Quoi qu’on en dise, l’IHU de Didier Raoult à Marseille est un succès » » (5). La suite de l’histoire on la connait : des rétraction d’articles, des poursuites pour des expériences menées sur des humains sans autorisation… Au vu de tout cela, il faudrait donc être très borné pour contester le bien-fondé de ces keylabs ! Nous sommes bien sûr dans ce propos sur du second degré !

Derrière les mouvements de mentons virils des promoteurs de ces keylabs, se cache une vérité plus dérangeante ; celle de la chute des budgets dévolus à l’ESR. Selon mes collègues du collectif Rogue ESR, si le budget brut alloué à l’ESR est en augmentation régulière depuis 15 à 20 ans, il n’en va pas du tout de même si on le calcule à euros constants, c’est-à-dire en tenant compte de l’inflation. Dans ces conditions, il baisse depuis la loi de programmation de 2021 de 1,6% par an, nous ramenant ce jour aux valeurs de 2011, presque 15 ans en arrière. Et pire, si l’on s’intéresse au budget par étudiant, celui-ci baisse depuis 2012 en moyenne de 1,25% par an, nous ramenant aux valeurs d’avant 2005. Le graphe ci-dessous (tiré de 5) est en l’espèce très parlant. 

 


Légende : budget total de l’Université et de la recherche décomposé en trois parties : la charge de service public pour l’Université, la charge de service public pour la recherche et la part de budget transférée au privé ou à des institutions publiques.
(A) Représentation sans compensation de l’inflation. (B) Représentation en euros de 2024, avec compensation de l’inflation (INSEE). (C) Budget de l’Université (programme 150) rapporté au nombre d’étudiants à l’Université, avec compensation de l’inflation (projections de la Banque de France) (5).


 

La conséquence de tout cela se traduit dans la production scientifique : « Depuis l’adoption de la loi de programmation de la recherche, les budgets pour l’Université et pour la recherche publique chutent rapidement, du fait de l’inflation. […] Le projet annuel de performances accélère son ambition de déclin rapide de la production scientifique française. La cible de production scientifique était de 1,3% de la production mondiale en 2023, de 1,2% en 2024. Elle est désormais de 0,9%. La cible de production scientifique était de 6,6% de la production européenne en 2023, de 6,2% en 2024. Elle est désormais de 5,2%. L’indicateur comparant la production scientifique française à celle de l’Allemagne et du Royaume-Uni a été supprimé. La haute fonction publique est donc consciente de ce que les réformes structurelles menées conduisent à un décrochage scientifique beaucoup plus rapide que la simple baisse des budgets — l’utilisation d’indicateurs quantitatifs ineptes n’enlève rien à ce constat » (5).

En lien avec ce que je décrivais plus haut dans l’article, des solutions existent. Il faut pour cela avoir le courage de supprimer le crédit impôt recherche dont l’efficacité est remise en cause par la Cour des Comptes, et qui représente à lui seul presque 2 fois et demi le budget du CNRS. Rogue ESR propose aussi de réformer d’urgence « le financement public de l’alternance (20,4 milliards d’euros auxquels il faut ajouter 7,2 milliards d’euros d’apprentissage) » (5) pour le réallouer en partie au service public. « Les économies budgétaires réalisables sont considérables : les centre de formation en alternances, sociétés commerciales, redistribuent 32,5% des excédents sous la forme de dividendes aux actionnaires » (5)...

L’enseignement supérieur et la recherche sont sur la paille, c’est donc un fait. Nous n’en sortirons qu’en construisant un modèle alternatif à celui qui a conduit à 20 ans de décrochage scientifique, de précarisation, de paupérisation et d’insignifiance bureaucratique. Malheureusement, nous n’en prenons pas le chemin !



Références :


1. Anonyme. La situation et les perspectives des finances publiques. Rapport de la Cour des Comptes. Juillet 2022.
Consultable en ligne :
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/la-situation-et-les-perspectives-des-finances-publiques-13

2 Christian Chavagneux. Baisses d’impôts : il faut arrêter le quoi qu’il en perde ! Alternatives Économiques. Juillet 2022.
Consultable en ligne :
https://www.alternatives-economiques.fr/christian-chavagneux/baisses-dimpots-faut-arreter-quoi-quil-perde/00103988

3. Tristan Gaudiaut. Fraude fiscale : La fraude fiscale surpasse la fraude sociale. Statista. Octobre 2024.
Consultable en ligne :
https://fr.statista.com/infographie/29761/comparaison-fraude-fiscale-fraude-sociale-montants-detectes-et-estimes/

4. Anonyme. Lutte contre la fraude fiscale : parlons chiffres et revenons sur terre. ATTAC-France. Mars 2024.
Consultable en ligne :
https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/lutte-contre-la-fraude-fiscale-parlons-chiffres-et-revenons-sur-terre

5. Anonyme. Analyse du projet de loi de finance 2025. Rogue ESR. Octobre 2024.
Consultable en ligne :
https://rogueesr.fr/category/billets/


Crédit illustration (haut de page) :

Tiré de :
https://dialectical-ecologist.fr/un-financement-perenne-pour-une-recherche-scientifique-independante-et-de-qualite/
D'après Rhodo.

 

 

 

 

lundi 20 janvier 2025

AU SUJET DU TRACT CITANT CE BLOG...

 


Je reçois depuis quelques jours des messages de lecteurs m’indiquant qu’un tract circulant à Forges cite ce blog. Les rumeurs circulant également très vite, il me semble important d’effectuer une mise au point afin de clarifier la situation.


Le tract est distribué par des soutiens d’un parti politique, la France Insoumise (LFI), qui par ce biais exerce ses prérogatives démocratiques d’expression publique. Elle a donc, à mon sens, toute légitimité à le faire, d’autant que ce blog est public et donc accessible à tous sur internet. Il peut donc être cité en tant que tel sans problème.

En revanche, je ne suis en aucun cas à l’origine de ce tract. Je n’en n’ai donc ni l’initiative, ni la paternité. Je n’ai pas non plus contribué à sa rédaction. Par ailleurs, je ne suis pas membre de LFI, ni d’aucune structure politique d’ailleurs. Il m’est en effet difficile d’être en accord avec la totalité des prises de position de partis, mais il m’arrive d’en approuver certaines. LFI ne déroge pas à la règle. Ainsi, si je suis plus que réservé sur l'intransigeance de leurs élus, si je ne supporte que difficilement l'attitude de M. Jean-Luc Mélenchon, si je doute des aspects financiers de leur programme, leurs propositions liées à la nécessaire transition écologique me parlent. Je constate en effet avec effroi, chaque jour, qu’elle est la grande oubliée de la politique actuelle, au niveaux international, nationale et même loco-local. En lien, mes engagements ont toujours été exclusivement associatifs et syndicaux, et tournés d’une part vers la défense des plus faibles, et d’autre part, vers le développement durable.

Ceci dit, les extraits du tract qui m’ont été communiqués portent à la fois sur des éléments de politique nationale et locale, dans un contexte des élections municipales à venir. J’espérais, après les élections de 2020, que les nouveaux élus forgeois fassent preuve de plus de discernement, de solidarité et d’intérêt pour la commune une fois aux affaires. J’ai rapidement constaté qu’il n’en était rien. Dans notre commune, nous sommes aujourd’hui confrontés, à mon sens, à des élus qui ne répondent pas aux demandes des administrés, qui les baladent, qui les trompent. Ils fonctionnent (entre guillemets !) en dilettantes. Il est donc nécessaire qu’une opposition se réveille et qu’une alternative à la médiocrité se mette en place à Forges. A titre personnel, j’ai déjà dit et expliqué qu’après 12 ans de mandat municipal, des heures de réunions ici et là, des astreintes de week-end et de nuit, une crise des migrants fatigante, et nombre de réalisations structurantes pour la commune, j’avais décidé de ne pas me représenter à des élections municipales, ce que j’ai fait en 2020 et que je referai en 2026. Je ne suis donc candidat à rien.

L’équipe municipale en place - qui d’ailleurs se délite - a été élue en raison de la division de la liste majoritaire précédente. Elle l’a aussi été de par les mensonges qu’elle et ses proches ont propagés autour de la présence des migrants, n’hésitant pas à s’afficher en grande partie aux côtés d’élus du rassemblement national (front national à l’époque). Elle continue à employer cette stratégie de « vérités alternatives », et à diffuser approximations et contrevérités, sur le mode de l’entre-soi et de la détestation de tout ce qui leur est étranger tant sur le plan des idées, des concepts que de l’appartenance socio-culturelle. Depuis cinq ans, ce blog dénonce les irrégularités que ces élus commettent, leurs erreurs, leurs mensonges, et au-delà leur vilénie intellectuelle et morale, et il continuera à le faire.


lundi 30 décembre 2024

MAUVAISE ANNÉE POUR LA DÉMOCRATIE !

 


Oui, mauvaise année pour la démocratie et aussi, malheureusement, pour nos démocraties… Un petit tour d’horizon que je n’espère pas trop déprimant pour finir cette année et commencer la suivante.

Il y a eu tellement de mauvaises nouvelles en 2024 que je ne sais plus par où commencer. Aussi je me propose de sérier les questions du niveau le plus lointain au niveau le plus proche. Commençons par les conflits armés, tant ceux-ci sont présents dans les actualités. En Ukraine, la situation est toujours aussi meurtrière, avec selon les chiffres obtenus de différentes sources, plus d’1 250 000 personnes qui auraient été tuées ou blessées. Parmi celles-ci, 300 000 soldats (225 000 Russes et 75 000 Ukrainiens) tués depuis 2022 et 800 000 blessés (400 000 Russes et autant d’Ukrainiens). On peut ajouter à cela les quelques 50 000 civils qui ont été tués, blessés, déportés ou qui ont disparu du coté ukrainien pour l’écrasante majorité… Tout cela résultant de la folie d’un dictateur, M. Vladimir Putin en l’occurrence, qui n’admet pas le souhait des Ukrainiens de s’éloigner de la zone d’influence russe. Une étape cruciale a été la destitution, constitutionnelle pourtant, du président ukrainien qui était très favorable à la Russie, en 2014, par le parlement. Pour les lecteurs qui s’intéressent à la genèse du conflit, de l’Euromaïdan à la situation de ce jour, via l’annexion de la Crimée et du Dombass, les pages Wikipédia qui s’y rapportent sont remarquables et proches de ce que l’on peut lire dans les ouvrages de références (voir par exemple 1,2). Une des raisons de s’inquiéter est l’internationalisation du conflit. D’un côté, la Russie est clairement aidée par l’Iran, par la Corée du Nord qui fournit maintenant des contingents, et probablement discrètement par la Chine, qui fournit de l’électronique permettant à la Russie de contourner en partie les blocus de matériel imposés en représailles. De l’autre côté, le monde occidental ne peut plus laisser M. Vladimir Putin menacer le territoire européen, l‘Ukraine aujourd’hui, et possiblement les Etats Baltes plus tard. Nous livrons donc des quantités massives d’armement, avec, pour le moment, aucune participation de troupes de l’OTAN, à l’exception possible de formateurs militaires. Seule raison d’espérer, l’épuisement des belligérants pourrait conduire à un cessez le feu, et possiblement une « mauvaise paix » dans cette région du monde. Question démocratie, puisque c’est le sujet de cet article, nous avons là, avec « l’union » Russie, Iran, Corée du Nord et Chine, quatre pays tenus par une belle brochette de pouvoirs autoritaires. Or en Europe, plusieurs dirigeants de pays où des coalitions d’extrême-droite sont au pouvoir, se comportent finalement en alliés objectifs de la Russie, M. Viktor Orban en Hongrie et M. Robert Fico, en Slovaquie en tête. La montée de l’extrême-droite en Autriche, en Allemagne et en Flandres, voire en France, avec leur dirigeants pro-russes, constitue donc un risque gravissime pour l’Union Européenne et pour nos démocraties, aussi imparfaites soient elles.

Autre conflit inquiétant, le Moyen Orient. La situation qui était déjà mauvaise, a rapidement dégénéré après l’attaque révoltante du Hamas sur des populations israéliennes civiles, sauvagement massacrées. Tout aussi révoltante a été l’action du gouvernement israélien, qui, sous couvert de défense du pays, un droit effectivement imprescriptible, a mené des opérations militaires qui ont conduit à d'autres séries de massacres de civils dans la bande de Gaza. Le bilan est catastrophique. Plus de 4 000 israéliens ont été tués, blessés ou déportés. Plus de 150 000 Gazaouis ont été tués ou blessés, très majoritairement des femmes et des enfants, et plus de deux millions ont été déportés sur le territoire, soit 90% de la population (3). Là aussi les pages Wikipédia sont riches d’informations (4). On constatera avec effroi que l’armée israélienne a répondu aux massacres des populations civiles israéliennes par le Hamas par des massacres de populations gazaouis d’une magnitude sans commune mesure. Des hôpitaux ont été visés comme des usines de production électrique, des écoles, et mêmes de crèches... À tel point que des juristes, plusieurs pays, des ONG, soupçonnent Israël de commettre un génocide à Gaza, et d’avoir cumulé crimes de guerre et crimes contre l’Humanité. Une Commission d'enquête de l'ONU accuse aussi Israël de ces mêmes « crimes de guerre et crimes contre l’humanité », et, logiquement, elle accuse également le Hamas de « crimes de guerre » commis en Israël. La Cour Pénale Internationale a délivré également un mandat d’arrêt contre le premier ministre israélien M. Benyamin Netanyahou et son ministre de la défense, M. Yoav Gallant, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés. Là aussi, trois membres du Hamas, Ms. Ismaël Haniyeh, Mohammed Deïf et Yahya Sinwar feront l’objet d’un autre mandat pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis sur le territoire d’Israël et de l’État de Palestine. Pour ces trois derniers, l’action sera sans aucun doute éteinte en raison de leurs morts, attribuées à Israël. 

En tentant de prendre du recul, outre le bilan catastrophique de ce conflit (et encore ai-je passé sous silence la situation au Liban), il me semble que nous n’avons pas réalisé que nos démocraties et au-delà l’idéal démocratique en sortent laminés. Deux raisons à cela. La première est qu’Israël se veut et se décrit comme un état démocratique. Mais peut-on vraiment dire cela d’un état qui ne respecte pas les résolutions de l’ONU, qui ne respecte pas le droit de ses minorités et dont les dirigeants font, à tout le moins, l’objet de suspicions de génocide, de crime de guerre et de crime contre l’Humanité ? Est-ce l’image que nous, peuples en théorie fidèles aux lumières, souhaitons donner de nos valeurs ? La seconde est liée à la première. Comment expliquer l’assourdissant silence de nos démocraties face à ce qui se passe en Israël et en Palestine, ou au Liban. Tout s’est passé, depuis plus d’un an, comme si nos démocraties occidentales regardaient ailleurs, sans réaliser que ce silence interroge sur ce « deux poids, deux mesures » qui différencie le traitement réservé à un état peu recommandable comme Israël, et celui réservé à un autre état aussi peu recommandable, la Russie ? Ce silence, mâtiné de quelques plus que timides froncements de sourcils, interroge aussi sur le consentement tacite de nos dirigeants vis-à-vis du génocide possiblement perpétré à Gaza. Plus grave, dans l’œil d’autres pays, d’autres citoyens du monde, il rend nos pays occidentaux et par conséquence nos démocraties possiblement complices des crimes commis en Palestine. J’exagère, direz-vous ? Alors, comment interpréter les déclarations de certains de nos ministres disant que M. Benjamin Netanyahou bénéficierait d’une « immunité » s’il se rendait sur le sol français… contrairement à toutes nos obligations de signataire des traités internationaux relatives aux cours de justice internationales.

Autre raison de s’inquiéter : l’élection de M. Donald Trump aux Etats-Unis. Dans ce cas particulier, la validité de l’élection n’est pas à remettre en cause contrairement d’ailleurs à ce qu’avait tenté de faire ce même personnage lors de sa défaite de 2020. Non, le risque pour la démocratie réside ici dans le recours à la collecte de données personnelles à des fins de ciblage politique, à la large diffusion de publicités mensongères, à la circulation de messages soutenant les théories du complot, bref aux mensonges. Cela pour permettre l’élection d’un individu poursuivi en justice et condamné pour trente-quatre chefs d’accusation dans l’affaire des falsifications comptables en lien avec les paiements secrets faits à une actrice pornographique*… Deuxième défaite de la démocratie : cette déliquescence résulte en grande partie du contrôle exercé sur les réseaux sociaux et de l’argent injecté par deux milliardaires que je qualifierais de déjantés. Bref, tout cela s’inscrit dans un contexte maintenant connu de vérité alternative, un concept qui fait que le vrai et le faux ont finalement la même valeur (5,6). Seul motif d’espérer, cette déchéance morale pourrait conduire à une situation de pourrissement interne des Etats-Unis qui affaiblirait complètement le pays, provoquant enfin un sursaut démocratique. J’avoue croire peu à cette perspective et espère aujourd’hui simplement que les Etats-Unis n’entraineront pas l’UE dans une longue et douloureuse chute. Pour cela, encore faudrait-il un réveil de l’UE et une remise en cause sérieuse de son alignement sur les Etats-Unis…

La situation intérieure française ne permet pas non plus d’espérer beaucoup pour notre démocratie. Je ne fais pas partie de ceux qui remettent en cause les résultats d’élections, ni le choix de notre président, M. Emmanuel Macron, de dissoudre l’assemblée. De même, je ne vois aucun motif constitutionnellement valide pour penser qu’il pourrait être destitué. En revanche, je suis très contrarié par le fait que ce même président n’ait pas respecté, non pas la Constitution, mais son esprit. Il a ainsi « joué la montre », en cachant derrière un faux semblant, ses choix politiquement discutables. Il a outrepassé ses prérogatives en arguant qu’il était guidé par une volonté de nommer quelqu’un qui pourrait éviter d’être censuré, alors que ce choix de censure - ou non - aurait dû être celui du Parlement, et pas celui de l’exécutif. Enfin, il a, à deux reprises, choisi de nommer un premier ministre issu de minorités parlementaires. Ces mêmes deux premiers ministres ont nommé des ministres également issus de ces groupes parlementaires minoritaires, qui tentent par tous les moyens d’appliquer la même politique délétère rejetée par une majorité de Français, si l’on agrège le NFP et le RN. L’agrégation est osée, j’en conviens, mais elle a néanmoins conduit à la censure du gouvernement de M. Michel Barnier et elle n'empêchera pas plus sans doute celle du gouvernement actuel. Une autre menace pour la démocratie française réside dans le poids de plus en plus lourd que pèse des milliardaires dans l’audiovisuel et les médias, à l’image de la situation aux USA ou au Royaume Uni. L’impact de cette mainmise se fait sentir dans les médias de masse tels Europe 1, C8 ou CNews appartenant au groupe Bolloré, où l’on n’hésite plus maintenant à tenir propos ouvertement racistes ou mensongers (7). Elle se fait aussi sentir dans les palais de la République où ces mêmes milliardaires murmurent à l’oreille de nos décideurs (8). Comment s’étonner ensuite des dénis de démocratie que je décris ci-dessus, qui conduiront inéluctablement à renforcer les scores du RN dans un amalgame entre « tous pourris », « à quoi cela sert de voter pour reprendre les mêmes », « on a tout essayé sauf l’extrême droite » ou « il nous faudrait une bonne dictature » …  

Le ton de cet article peut paraitre lourd en cette fin d’année, mais je ne vois pas de raison d’être particulièrement joyeux. Peut-être suis-je assez sensible à ces situations de conflit et de mensonge, car je suis totalement absent des réseaux dits sociaux, où la vérité alternative fait loi. Peut-être aussi parce que je traine derrière moi quelques 40 ans de recherche publique, au cours desquels j’ai toujours tenté, sur des sujets parfois délicats comme les dossiers OGM, et avec d’autres, de démêler le vrai du faux pour faire émerger non pas la vérité, ce serait présomptueux, mais un consensus étayé… Or comme je l’ai montré je le crains, nos sociétés dites démocratiques s’éloignent de plus en plus de cet idéal. Et même au plan loco-local, dans notre commune, les choses ne vont pas bien. Le vivre-ensemble personnifié par les associations ne s’est jamais aussi mal porté, le fonctionnement démocratique de la commune est à l’arrêt et la désinformation et le mensonge y ont aussi largement cour (9). Mais bonne année quand même !

* Note ajoutée le 31/12 : et condamné hier 30/12/24 au civil pour agression sexuelle !

 

Références

1. Guerre russo-ukrainienne. Wikipédia.
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_russo-ukrainienne

2. Révolution de la Dignité (Maïdan)
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_de_la_Dignit%C3%A9

3. Anonyme. À Gaza, deux millions de déplacés internes sont confinés sur 11 % du territoire. Le Courrier International. Aout 2024.

4. Guerre Israël-Hamas (depuis 2023)
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_Isra%C3%ABl-Hamas_(depuis_2023)

5. Brian Myles. Le trumpisme en continu. Le devoir. Novembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.ledevoir.com/opinion/editoriaux/823360/editorial-presidentielle-americaine-trumpisme-continu?

6. Alexandra Schwartzbrod. Présidentielle américaine : la démocratie dans tous ses états. Libération. Novembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/presidentielle-americaine-la-democratie-dans-tous-ses-etats-20241104_FUBNNHIVG5EC5EVCJY2SVWE2LE/

7. Caroline Constant, Tom Demars-Granja, Honorine Letard. Quelle riposte à la bollorisation des médias ? L’Humanité. Septembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.humanite.fr/en-debat/arcom/quelle-riposte-a-la-bollorisation-des-medias

8. On lira avec intérêt l’enquête du « Nouvel Obs » d’Octobre 2024, à ce sujet. Une petite partie est consultable en ligne :
https://www.nouvelobs.com/politique/20241030.OBS95680/l-influent-bernard-arnault.html

9. On lira les articles de ce blog traitant regroupés sous l’onglet Forges les Bains dans la version web de ce site, ou que l’on peut trouver dans la version téléphone par exemple sous le titre « Les petits et gros mensonges de la municipalité ». Voir par exemple :
https://dessaux.blogspot.com/2024/06/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html
https://dessaux.blogspot.com/2024/09/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html
https://dessaux.blogspot.com/2024/11/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html

 

Crédit illustration :

Image du film éponyme, de et avec Jean Yanne.