mercredi 4 octobre 2023

ENCORE DES PROPOS ABSURDES D’UN ÉLU FORGEOIS !


De nouveau, un lecteur du blog m’a alerté sur des propos tenus par un élu forgeois (le même que précédemment) au sujet de la régie publique Eau Ouest Essonne. S’appuyant sur la situation catastrophique de la fourniture d’eau potable à Mayotte, ce dernier suggère à demi-mots que l’on pourrait bien connaître une situation similaire dans notre région. Il s’agit là, a minima, de propos erronés, dont le but me semble assez flou, sinon à imaginer que ce nouvel élu forgeois vise à faire peur à nos concitoyens. Je vois donc obligé d’expliquer en quoi ce message relève de l’absurde…

Avant de renter en détails dans ces explications, je cite le message de cet élu de notre commune : « « l’immobilisme des pouvoirs publics, locaux et nationaux, et d’infrastructures indignes » ? Une situation catastrophique qui ressemble étrangement à ce qu’il va se passer dans le pays de Limours ??!! ». Pour ne pas être trop désagréable, je ne reviendrai pas sur la faute de syntaxe, ni sur les erreurs typographiques de ce message. Passons tout de suite aux faits. Si la situation à Mayotte est effectivement catastrophique, si elle résulte à la fois d’une gestion en DSP très dégradée et d’un manque de moyens et de vision de long terme, on peut raisonnablement penser que, dans notre secteur, nous nous trouvons dans une situation opposée. Précision importante, quand je parle de notre secteur, je parle des communes de Forges, Briis, Fontenay, Angervilliers, etc., bref de celles qui sont incluses dans l’ensemble régi par Eau Ouest Essonne. J’exclus donc Limours et Pecqueuse, qui, me semble-t-il, continuent de gérer la fourniture d’eau en DSP.

Pour comprendre en quoi ce mesage est absurde, je reviens tout d’abord sur les raisons qui ont conduit à la création de la régie publique Eau Ouest Essonne, création à laquelle j’ai très largement participé. Cette création résulte du constat que nous avions posé, et qui observait que si les délégataires successifs avaient fait fonctionner le service, disons correctement sans plus, leur investissement dans la pérennité du réseau, et en termes de sécurisation de la ressource, n’était pas satisfaisant. La réflexion, commencée dans les années 2010, a conduit en 2017 à la création par le syndicat intercommunal d’adduction d’eau potable de la région d’Angervilliers (SIAEP), devenu depuis SIAEP Eau Ouest Essonne, et de la régie publique. Cette régie est, de fait, le bras opérationnel du syndicat, et c’est donc elle qui depuis 2017 assure le rétablissement et l’amélioration du réseau, et la sécurisation des approvisionnements. Je ne rappellerai pas ici tout ce qui a été mené à bien par la régie depuis sa création, mais juste quelques grandes lignes. Très vite, il a fallu remettre à jour la base abonnées, dont plus de 40% des lignes étaient fausses. La régie a également procédé au repérage en X,Y de tous les ouvrages, dont vannes et bouches à clef. Elle a mis en place un SIG, système d’information géographique, qui collationne toutes les données réseaux disponibles sur informatique, elle a examiné tous ses captages, lancés des travaux de recherche de fuites nombreux, y compris, et c’est une première en France pour une régie, à l’aide de chiens dressés à cela, et elle a procédé à des remplacements de canalisations dans un volume jamais vu au cours des 20 années précédentes passées en DSP. Depuis 6 ans, elle fournit quasiment sans discontinuer de l’eau de qualité, à plus de 20 000 personnes. Sa compétence est reconnue aux niveau régional et départemental, je n’en veux pour preuve que le satisfecit donné par la préfecture sur son fonctionnement et l’élargissement aux communes désireuses de la rejoindre, appartenant à deux communautés de communes : la CCPL et le Dourdannais. Elle est par ailleurs la seule régie du département à assurer la production d’eau, sa potabilisation, son transport, et sa distribution ainsi que la facturation aux abonées. J’arrête là, car je défie quiconque de démonter un quelconque dysfonctionnement de la structure. Evidemment, quelques arrêts de distribution se sont produits de façon inopinée, parfois pendant deux heures, parfois durant une nuit, et d’autres se produiront… Les casses de réseau, les fuites ont en effet une détestable propension à ne pas nous prévenir de leur occurrence, à l’avance…

Par ailleurs, si l’on examine maintenant la ressource et sa sécurisation, puisque le message incriminé mentionait une peur sur ce sujet, il faut préciser que l'eau provient, en tous cas pour les communes de la CCPL, en quasi-totalité de captages situés à Saint Maurice Montcouronne et Saint Cyr sous Dourdan. En temps normal, ces captages sont suffisants en termes qualitatifs et quantitatifs. Néanmoins, lors de l’été 2022, en raison de la température élevée et de la forte consommation qui en a résulté, la volumétrie n’a pas été suffisante. Nous disposons dans ce cas d’une alimentation complémentaire, abondante, qui se fait par de l’eau de la rivière Essonne, provenant de l’usine de potabilisation d’Itteville. Cette interconnexion a donc été sollicitée permettant une fourniture d’eau ininterrompue à tout notre secteur dans une période particulièrement tendue.

Plus largement, il se trouve que la régie réfléchit depuis des années à cette sécurisation des approvisionnements. Le SIEAP puis la régie ont investi des millions d’euros pour cette protection, avec l’entretien des captages existants et la recherche de nouveaux captages, sans parler de la sécuristion physique des ouvrages. En tant que membre du conseil d’exploitation de la régie, je continue de dire « nous » à son sujet. Poursuivant dans cette voie, « nous » allons bientôt procéder au nettoyage complet du captage de Saint Cyr par bullage d’air, ce qui devrait permettre d’améliorer la volumétrie du captage, qui se situe pour le moment très en dessous des autorisations préfectorales. Nous envisageons également une sécurisation du « bout de réseau » que constitue Forges bourg et le hameau du Parc, par le raccordement de ce hameau et du bourg, au réseau d’eau potable de la Seine fournie par l’usine de Morsang sur Seine, et qui alimente actuellement les hameaux de Malassis et de Chardonnet. Enfin, nous allons également sécuriser tout le secteur CCPL en créant une seconde interconnexion, cette fois au réseau Eaux du Sud Parisien transportant de l'eau de la Seine potabilisée, via la canalisation qui court le long de la N104 et qui servira à alimenter notre réservoir de tête (château d’eau principal) de Butte Brulée. La facture de l'opération comportera là 7 chiffres…

Tout cela pour dire deux ou trois choses importantes. Tout d’abord, ce billet confirme la loi de Bartolini qui dit qu’il faut 10 fois plus d’énergie pour démentir une rumeur ou exposer un mensonge, que pour le ou la créer. Le message de 4 lignes copié plus haut a dû prendre, pour le composer, moins d’une minute à son auteur ; or, je travaille sur ce papier depuis au moins 1 heure et demi… Ensuite, on voit au travers de ce que j’ai raconté, toute la force des régies publiques en termes de fourniture d’eau. Elles ont en effet la capacité de réfléchir à 5, 10, voire 20 ans. Eau Ouest Essonne mène ainsi des simulations pour évaluer l’évolution de la demande en eau à l’horizon 2050. Par ailleurs, elles peuvent investir lourdement dans le réseau, tous les « bénéfices » réalisés servant à cela, sans voir à rémunérer grassement des actionnaires souvent improductifs. Enfin, denier point, nous n’avons pas attendu les propos tendancieux d’un élu forgeois pour agir. Cela fait 15 ans qu’à titre personnel, j’œuvre pour la commune. J'ai participé de près ou de loin à la réalisation de nombreux équipements collectifs, ainsi qu'à diverses actions majeures, comme le pasage au « 0 phyto », l'extinction de l'éclairage à minuit, ou les conférences des jeudis de Forges. J'ai été associé à diverses activités associatives, à l'organisation de nombreux évènements, j'ai assuré de multiples permanences de nuit, deux fois remplacé les maires de Forges lors de leurs congés, pour ne citer que quelques opérations... Quel est le bilan de cet élu, en particulier au SIAL qu'il a présidé pendant quelques mois ? Plus largement quel est celui de l’équipe municipale en trois ans ? Quels sont les bénéfices de leur activité pour la commune ? Je ne vois rien dans le vivre ensemble, rien dans le collectif, dans le social, rien dans l’équipement structurant, dans l’environnemental, et surtout rien dans les fonctionnements démocratique et associatif, bien au contraire car dans ces deux derniers domaines, leurs actions ont été à mon sens délétères. Même si le point fort de cette équipe est la com, il vaudrait donc mieux que certains d’entre eux se taisent plutôt que de raconter des sottises, voire des absurdités...


Crédits illustration :

Le Chat de P. Geluck.







lundi 2 octobre 2023

LIBERTÉ DE LA PRESSE : DES DÉRIVES NON DÉMOCRATIQUES



Comme à mon habitude, je publie ci-dessous la lettre de la présidente d'Anticor, association dont je suis membre et qui tente de luter, à son niveau, contre la corruption et contre l'opacité de certaines affaires publiques. Ce dernier message est intéressant dans la mesure où il traite de ce qu'il est convenu d'appeler « l'affaire Lavrilleux », du nom de cette journaliste dont le travail d'investigation a montré comment la France a directement ou indirectement aidé l'Egypte dans des opérations de basse police... Celle-ci a été arrêtée et placée en garde à vue, elle a été menacée lors d'interrogatoires, a subi des pressions inadmissibles dignes de certaines Républiques bananières, son appartement a été fouillé, dans l'espoir de trouver la ou les sources qui l'ont informée, en violation totale des lois francaises. Or, ce qui est grave dans ce dossier c'est qu'il révèle une lente dérive de notre gouvernement vers des pratiques non démocratiques...

Le texte de la présidente d'Anticor apparait en italiques. Les sections tronquées ou ajoutées par mes soins sont signalées entre crochets.

« Anticor est une association qui utilise l’arme judiciaire pour mener à bien ses combats. Elle porte devant la Justice des alertes concernant des atteintes à la probité. Pour que cela soit possible, il faut que les médias puissent écrire, révéler, il faut que les lanceurs d’alerte soient protégés et il faut un agrément anticorruption ! Or, l’association ne fait que constater que les entraves à son activité se multiplient. C’est une tendance inquiétante : le secret se propage, la liberté recule.

Le secret des affaires, qui vise à protéger les intérêts financiers des entreprises, leur permet aussi une opacité certaine sur leurs activités, peu important que ces activités puissent être moralement répréhensibles comme l’optimisation fiscale. Le secret de la vie privée permet aussi à une fondation d’entreprise qui bénéficie indirectement de centaines de millions d’euros d’argent public de garder sa comptabilité secrète. La vie privée, concept inhérent à la personne humaine, permet à des structures qui devraient être d’intérêt général, d’avoir de la pudeur fiscale. Aujourd’hui, c’est le secret défense qui fait parler de lui. Nous le rencontrons souvent dans les procédures lorsque des contrats commerciaux internationaux sont en jeu : dans l’affaire Kazakhgate, impliquant la vente de 45 hélicoptères au Kazakhstan, dans l’affaire des Rafale, ces 36 avions de combat vendus à l’Inde, dans l’affaire de l’attribution de la coupe du monde au Qatar…

Dans un article récent, Médiapart pose la question : « À quoi sert le « secret-défense » ? À protéger des agents en mission ou à protéger des intérêts commerciaux ? À garantir la réussite d’une opération ou à cacher des compromissions ? »

Cette question doit être posée dans un contexte où la liberté de la presse se trouve menacée par le secret-défense. En effet, le 19 septembre 2023, Ariane Lavrilleux, journaliste chez Disclose a été mise en garde à vue dans le cadre d'une enquête judiciaire pour violation du secret défense. Cette journaliste a publié une enquête sur la mission de renseignement française « SIRLI », débutée en février 2016 au profit de l'Égypte au nom de la lutte antiterroriste, qui aurait été détournée par l'État égyptien pour effectuer des frappes aériennes sur des véhicules de contrebandiers présumés, à la frontière égypto-lybienne.

Après une perquisition à son domicile, Ariane Lavrillieux a été placée en garde à vue durant 39 heures. Cela représente une attaque sans précédent contre la protection du secret des sources des journalistes, qui constitue une des « pierres angulaires de la liberté de la presse et la condition sans laquelle, faute de sources, la presse ne serait plus en mesure de fournir au public des informations sur des questions d'intérêt général », selon les termes de la Cour européenne des droits de l’Homme. Or, sans protection des sources, sans liberté de la presse, la lutte contre la corruption ne serait qu’un vœu pieux. Car c'est justement grâce à une presse libre, à des journalistes indépendants et dont les sources sont protégées qu'Anticor peut dénoncer les atteintes à notre pacte républicain.

Mais au-delà du cas d'Ariane Lavrilleux, Anticor s’inquiète de l’état des médias en France, alors que ceux-ci sont concentrés dans la main de quelques-uns. L’association Acrimed publie et met à jour un état des lieux de cette concentration : https://www.acrimed.org/Medias-francais-qui-possede-quoi. Nous savons pourtant que le pluralisme des entreprises de presse est une condition de la démocratie.
[...] Alors que demain, le Président de la République ouvrira les états généraux de l'information, il est nécessaire de porter une voix citoyenne de défense de nos libertés, y compris celle d’être informés.


Crédit illustration :

Dessin d'Adrien René pour le concours international de dessin de presse 2020.