samedi 30 septembre 2023

DE NOUVEAUX PROPOS POTENTIELLEMENT DIFFAMATOIRES D’UN ÉLU FORGEOIS !


Des lecteurs du blog m’ont alerté voilà peu sur des contrevérités que propage un élu forgeois sur les réseaux sociaux. Ces propos, comme ceux tenus par d’autres élus voilà quelques temps, sont erronés, quand ils ne sont pas mensongers. Cela devient problématique et démontre une fois de plus, s’il le fallait, l’incroyable légèreté de certains de nos élus communaux qui confondent cohérence et compétence…

Le message incriminé a été publié sur un compte Facebook d’accès public et porte sur les finances du SIAL, syndicat intercommunal d’assainissement du pays de Limours, dans son budget de 2009. Je cite de larges extraits du message pour que les lecteurs du blog puissent se rendre compte du degré de véhémence et de mauvaise foi du propos. Titre du message : « Ça se passe en douce à Forges Les Bains. 815 241,47 euros de déficit au syndicat d’assainissement du pays de Limours [note : que j’abrège en SIAL] en 2010 soit un petit dépassement de 597,80% du budget de fonctionnement épinglé par la chambre des comptes d’Ile de France. Des petites cachoteries du [SIAL] auquel participaient certains élus de l’anciennes équipes municipales [sic] et leurs amis qui y siégeaient. Évidemment silence radio de la part des élus actuels et surtout des anciens préférant pratiquer l’avanie et les attaques personnelles pour masquer le fait que sans l’intervention de la chambre régionale, ces 815 241,47 euros auraient dû être pris dans la poche des citoyens ! Une habitude bien ancrée et apparemment toujours d’actualité ? ».

Evidemment, tout ceci n’a qu’une visée diffamatoire et pourrait donc bien faire l’objet de poursuites pénales. En effet, ce qui s’est passé est simple. Il s’agissait d’un des premiers budgets de la mandature 2008-2014, et donc les nouveaux élus que nous étions découvraient progressivement la situation du SIAL et les arcanes des comptes publics. De plus, nous étions en pleine phase d’investissements lourds, puisqu’il s’agissait de remplacer l’ancienne station d’épuration (StEp) de Briis, en fin de vie et ne répondant plus du tout aux normes environnementales par une nouvelle, un projet financièrement « à 7 chiffres » ! En fait, les membres du SIAL de l’époque, dont je faisais partie, ont pêché par excès de prudence, puisque le déficit présenté plus haut correspondait à la non prise en compte de subventions de divers organismes pour la construction de la station. De fait, l’importance du déficit par rapport au budget a fait que, conformément à la loi, le préfet de l’époque a saisi la chambre régionale des comptes d’Ile de France. L’objet de cette saisine, encore une foi légale, était de s’assurer qu’il n’y a pas eu de dérive budgétaire inadmissible.

En l’espèce, l’avis de la chambre (1) est clair et tranché, je cite : « Considérant que ce déficit résulte de la non prise en compte des restes à réaliser [j’explicite ce terme ci-dessous] de recettes d’investissement, subventions ou dotations en provenance de [divers organismes financeurs], et n’est donc pas représentatif de difficultés de financements structurelles, considérant au demeurant que le SIAL a bien repris le déficit de l’exercice 2009 dans le budget primitif 2010 et que ledit budget est à l’équilibre réel au sens de l’article L 1612-4 du CGCT, [] dit qu’il n’est pas nécessaire de proposer des mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre du budgétaire ». Cet avis confirme bien ce que j’explicitais, à savoir que les élus de l’époque ont préféré ne pas inscrire en recettes des subventions qu’ils n’avaient pas encore reçues. Elles auraient bien sur été comptabilisées plus tard ! Or celles-ci étant dues, elles auraient pu apparaitre en « reste à réaliser » de recette. D’une façon générale, les restes à réaliser sont les mouvements de capitaux dont on est certain qu’ils auront lieu dans le ou les budgets à venir. Ils peuvent s’inscrire en recette (comme ici) ou en dépenses. L’exemple classique est la réalisation de travaux pour un montant de, disons 100 euros, par tranches de 20 euros (des chiffres fictifs bien sûr). Si la première année, la commune, ou le syndicat intercommunal, a réalisé 60 euros de travaux, et commandé le reste, le reste à réaliser pour l’année suivante sera de 40 euros à imputer en futures dépenses au budget. Dans la non affaire du SIAL, ce que dit la chambre régionale des comptes est donc très clair : pas de dérive budgétaire, pas d’insincérité du budget 2010, pas d'arrangement entre élus, comme le sous entend le message posté sur Facebook. L’avis confirme simplement la grande prudence des élus de l’époque… Bref, circulez, il n’y a rien à voir ! Accessoirement, cela a sans doute aussi été l’avis du Trésorier du Trésor Public de l’époque, qui n’a pas sourcilié lors de la présentation de ce budget…

On peut donc se demande ce qui motive ces erreurs et dans certains cas ces contrevérités émanant des élus forgeois actuels. Je rappelle les approximations, pour ne pas dire plus, écrites sur un réseau social ou rendues publique sur la régie publique Eau Ouest Essonne (2), les propos insultant de certains élus vis-à-vis des membres d’une association (3), le courrier quasi diffamatoire à mon encontre et à l’encontre de notre ancienne maire envoyé à tous les présidentes et présidents d’associations par Madame la maire (4), tout ceci s’ajoutant à ce message posté semble-t-il assez récemment par un autre élu forgeois au sujet du SIAL et d’imaginaires malversations. Mon sentiment, et encore ne s’agit-il que d’un sentiment, est que ces propos que l’on peut qualifier de mensongers pour certains ne visent qu’à masquer le bilan lamentable des élus de l’actuelle mandature, en particulier vis-à-vis du monde associatif, l’absence de réalisation structurante pour la commune, en lien avec une vision politique (au sens noble du terme) limitée chez eux au maintien d’un entre-soi mâtiné d’un détestable esprit de ségrégation sociale. Certains semblent même passer plus de temps sur les réseaux sociaux qu'à l'exercice de leur mission... Le problème : cela commence à se voir furieusement !


Références :

1. Avis de la 6ème section de la chambre régionale des comptes d’Ile de France. Concernant le Syndicat intercommunal d’assainissement des villes de Pecqueuse, Limours, Briis Sous Forges, Forges Les Bains (91).
Consultable en ligne :
https://www.ccomptes.fr/fr/documents/12236


2. Erreurs et désinformation autour de la fourniture de l’eau potable à Forges Les Bains. Ce blog.
Consultable en ligne :
https://www.blogger.com/blog/statspost/week/1639974083027662667/8917141319922931042


3.Un gros coup de semonce. Ce blog.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2022/09/associations-forgeoises-un-gros-coup-de.html


4. Quand Madame la maire dérape. Ce blog.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2023/03/quand-madame-la-maire-derape.html



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Dessin personnel  




mardi 26 septembre 2023

NAHEL N'EST PAS UN DÉLINQUANT, LE POLICIER QUI A TIRÉ, PAS UN ASSASSIN



Voilà quelque temps déjà que je pensais à rédiger ce billet, mais je ne m’y suis décidé que récemment. Je voulais tout d’abord m’accorder le temps de la réflexion, et également collecter des informations auprès de personnes compétentes de mon entourage en matière de maintien de l’ordre et de fonctionnement des opérations de police. Cela me permet aussi de ne pas réagir à chaud, et somme toute, de coller quand même à l’actualité en lien avec les manifestations récentes contre les violences policières.

Je reviens donc rapidement sur les faits connus de tous maintenant. Le 27 juin dernier, un jeune homme de 17 ans, M. Nahel Merzouk, a été tué par un coup de feu tiré par un policier après une course poursuite dans les rues de Nanterre. Il est décédé quelques minutes plus tard après que le véhicule qu’il conduisait se soit encastré dans un poteau routier. Deux passagers qui l’accompagnaient ont été arrêtés, l’un sur le champ, l’autre plus tard. Selon les informations rendues publiques par les forces de l’ordre, le jeune homme décédé, au volant d’un puissant véhicule de location, aurait commis plusieurs infractions routières, et aurait refusé de s’arrêter à un contrôle de police. Les policiers l’auraient poursuivi et ils l’auraient rattrapé alors que sa voiture se trouvait prise dans un encombrement. Un témoin a diffusé la vidéo du tir mortel du policier qui se trouvait en partie appuyé sur l'aile avant gauche de la voiture et qui a fait feu au moment où le véhicule redémarrait.

Très vite, un emballement médiatique a pu être constaté. Celui-ci mêlait des personnalités de droite et d’extrême droite qui décrivaient M. Nahel Merzouk comme un jeune délinquant et qui estimaient que le policier ayant tiré était en état de légitime défense. A gauche de l’échiquier, certains n’hésitaient pas à parler de « d’exécution sur la voie publique par un policier » … Des cagnottes sont alors ouvertes en ligne, pour soutenir, qui la famille de M. Nahel Merzouk, qui M. Florian M., le policier à l’origine du tir mortel. Ce battage médiatique, associé à l’effet amplificateur délétère des réseaux dits sociaux, déclenchent des vagues de manifestations, de révoltes voire d’émeutes essentiellement urbaines, ce pendant des jours. Celles-ci auront un lourd bilan : 3 morts, plus de 1500 blessés, la dégradation de plus de 2500 bâtiments officiels, dont 105 mairies et 178 écoles, de plus d’un millier de commerces, auxquels s’ajoutent plus de 6 000 véhicules dont des bus, le tout pour un coût estimé d’un peu moins d’un milliard d’euros…

Mon premier sentiment en regard de cette affaire, et de ce qui s’en est suivi, est celui d’un horrible gâchis, avec, en premier lieu, un décès d’un jeune homme de 17 ans et une famille à jamais effondrée. A ce sujet, les tenants d’un ordre policier aux relents vichistes ont voulu faire passer M. Nahel Merzouk pour un délinquant multirécidiviste. Ceci est faux, puisque son casier judiciaire est vierge. Il apparait néanmoins dans le FAJ, fichier des antécédents judiciaires, qui recense les victimes comme les personnes impliquées à quelque niveau que ce soit dans des délits mineurs, ou, plus graves dans des crimes. A cet égard, l’intéressé y est mentionné pour une conduite sans permis, et des refus d’obtempérer. On peut également s’étonner qu’un jeune homme de 17 ans, non titulaire du permis, ait pu conduire une voiture de location (qui plus est immatriculée en Pologne). Tout cela pourrait éventuellement constituer une infraction aux règles, mais voilà : pour que cela soit avéré, il aurait fallu une décision de justice. Le décès de l’intéressé éteignant cette action, il reste donc que M. Nahel Merzouk n’a jamais été condamné pour quelque raison que ce soit. Il n’est donc, au regard de la loi et de la société, aucunement un délinquant, n’en déplaise aux spécialistes des propos racistes que l’on a beaucoup entendu dans ce dossier.

Ce sont les mêmes tenants d’une droite radicale qui se sont offusqué de voir le policier placé en garde à vue, puis en détention provisoire. Selon mes sources policières, il faut savoir que la garde à vue dans ce genre d’affaire est sinon monnaie courante, en tous cas parfois nécessaire, le temps de l’enquête préliminaire. Deux enquêtes sont en cours : une administrative confiée à l’IGPN et l’autre, pénale, confiée à un juge d’instruction. Plusieurs points d’intérêt ici, selon mes sources. Tout d’abord, il faut savoir que les enquêtes de l’IGPN, contrairement à une idée reçue, sont particulièrement poussées. Les bœuf-carottes comme les appellent les policiers sont très pointilleux sur les questions réglementaires, mais leurs constats ne sont pas toujours suivis d’action par les responsables des services. Ici l’enquête est motivée par l’incohérence entre les propos des deux policiers interrogés dont le policier tireur, qui ont argué de la légitime défense. N’étant pas spécialiste des techniques d’arrestation et de maintien de l’ordre, je m’en remets à ce qui m’a été dit par mes sources : toutes trois se sont déclarées très surprises de ce que montrait la vidéo relative au tir mortel, la position et l’attitude du policier ne leur paraissant pas répondre aux dispositions habituelles de ces interventions. C'est aussi l'avis du parquet qui motive le maintien en détention préventive. Il reste que la poursuite qui a précédé le tir n’a pas été filmée, et il est donc difficile d’appréhender le contexte global de cette intervention, ainsi que le stress éventuel subi par le polilcier. Par ailleurs, il faut savoir que ce dernier, mis en cause, a bien été suspendu, mais suspendu avec traitement, bien que placé pendant plusieurs semaines en détention provisoire. Celui-ci est par ailleurs mis en examen pour homicide volontaire. Là aussi, l’extrême droite a réagi fortement sans se rendre compte qu’il vaut mieux pour ce policier, dans le cadre de cette triste affaire, être mis en examen pour cela que pour « homicide par imprudence », aussi appelé « homicide involontaire ». Les raisons sont simples. L’homicide involontaire est un délit punissable de 10 ans de prison dans les cas les plus graves, certes, mais cela reste un délit. En conséquence, si ce motif de mise en examen avait été retenu, cela aurait signifié que le policier ne sera pas jugé aux assises mais en correctionnelle, où ne siègent que des magistrats. De plus, il ne peut dans ce cas « plaider » la légitime défense, qui n’est pas en cohérence avec l’acte d’une éventuelle riposte. D’une façon générale, la légitime défense suppose que la personne ait volontairement commis son acte. Par conséquent, la justice estime que dans le cas d’un homicide involontaire, la légitime défense ne peut pas être invoquée. La qualification d’homicide volontaire est, elle, de nature criminelle. La peine encourue est donc au pire la réclusion criminelle à perpétuité, mais il serait très surprenant, si l’affaire venait à être jugée devant une telle cour, que les jurés populaires qui y siègent fassent preuve de dureté. Paradoxalement, le policier pourrait donc se voir condamné plus légèrement aux assises qu’en correctionnelle. Il pourrait même y être acquitté si les jurés retiennent la validité de la légitime défense qui vaut, en droit, « irresponsabilité pénale ».

Au-delà de ces arguties juridiques, j’ajoute que la nécessité de devoir un jour se servir de son arme de service pour un policier, quelles que soient les circonstances, constitue généralement une véritable hantise. Se pose néanmoins une question fondamentale qui est celle des règles autorisant le tir par les forces de l’ordre. Jusqu’en 2017, le tir d’une arme à feu n’était globalement admissible que dans le cadre strict de la légitime défense, celle-ci concernant le policier ou tout citoyen menacé. Ce tir devait donc remplir les conditions de la légitime défense à savoir, pour faire simple, un risque vital avéré pour le policier ou le civil concerné, une immédiateté de la riposte et une proportionnalité à l’agression. En d’autres termes, un policier ne pouvait pas tirer sur une personne le menaçant à mains nues… Malheureusement à mon sens, une loi du février 2017, donc votée lors de la mandature de M. François Hollande, est venue brouiller ce cadre juridique de bon sens. L’article 435-1 du code de la sécurité intérieure (CSI) dispose désormais qu’un policier peut tirer en cas de refus d’obtempérer, s’il ne peut stopper un véhicule autrement que par l’usage d’arme et si le conducteur « est susceptible de perpétrer […] des atteintes à leur vie ou leur intégrité physique et celle d’autrui ». Il s’agissait aussi d’aligner les règles d’engagement des armes à feu de la police avec celles de la gendarmerie. Cette disposition a cependant eu des conséquences néfastes. Contrairement à ce qu’indiquait le ministre de l’intérieur, M. Gérald Darmanin, des études statistiques menées par trois chercheurs, Ms. Paul Le Derff, Sébastien Roché, et Simon Varaine ont démontré que les tirs policiers mortels sur les véhicules en mouvement ont été multipliés par cinq entre les périodes couvrant les cinq années avant et après le vote de la loi de 2017… De même, si l’on compare la situation d’Allemagne et celle de la France, ces mêmes chercheurs indiquent qu’il y a eu chez nos voisins « un tir mortel en dix ans pour refus d’obtempérer, contre 16 en France depuis un an et demi ». Pourtant la situation de la délinquance et celle de la criminalité ne sont pas dans ce rapport de 1 à 100. Ainsi, le taux d’homicides en France est de 1,3 pour 100 000 à comparer au taux de 1,0 pour 100 000 en Allemagne.

Il est donc plus que temps à mon sens de revoir soigneusement les règles d’engagement des armes à feu par les forces de l’ordre en France. Cela ne suffira sans doute pas à pallier le manque de formation et d’entrainement au tir que m’ont rapporté mes contacts policiers. J’ajoute pour conclure, et c’est là ma vision de citoyen, que dans le « contrat » que je passe avec eux, j’accepte de conférer aux forces de l’ordre des pouvoirs énormes, dont celui de me contrôler quand bon leur semble, si nécessaire de me priver temporairement de liberté par un placement en garde à vue. En contrepartie de cela, je leur demande protection, et surtout, malgré les difficultés du métier, d’exercer ces énormes pouvoirs avec discernement et une honnêteté intellectuelle et morale sans faille. Ceci pourrait ne pas avoir été le cas dans cette triste affaire, sans j’en juge aux propos tenus par ces policiers face aux enquêteurs largement contredits par les images. Enfin, point important, aucun des deux policiers mis en cause n’a fait l’objet d’un jugement, qui pourrait d’ailleurs, comme je l’indiquais plus haut, conduire à leur relaxe. En tout état de cause, ces deux policiers ne sont donc à l’heure actuelle ni un assassin, ni un complice.


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Radio France.
https://mediateur.radiofrance.com/actualites/mort-de-nahel/



mardi 5 septembre 2023

L’ABAYA OU LE BONNETEAU DE LA RENTRÉE SCOLAIRE


Impossible, à moins de n’avoir plus aucun contact avec l’information, d’avoir loupé les déclarations de notre jeune et sémillant ministre de l’éducation nationale, M. Gabriel Attal, indiquant l’interdiction du port de l’abaya à l’école dès la rentrée. Cette décision comporte une facette positive, et pose dans le même temps un certain nombre de questions. Elle sert surtout, à mon sens, à masquer les véritables problèmes que les gouvernements Macron n, n+1, n+2, etc. s'échinent à ne pas traiter, on verra pourquoi...

Un mot pour parler de cette abaya, vêtement consistant en une robe longue et large, à l’origine portée par les femmes des populations bédouines, puis adoptée par certaines au Moyen-Orient et au Maghreb, plus rarement en Indonésie et en Malaisie. Contrairement à ce qui est propagé par certains, l’abaya n’est pas un vêtement explicitement religieux. Il n’en n’est fait nulle part mention dans le Coran. Nombre de dignitaires musulmans confirment d’ailleurs ce fait. Ne soyons cependant pas aveugles : l’abaya se porte de plus en plus dans certains pays musulmans, depuis une vingtaine d’années, sous l’impulsion d’organisations islamistes conservatrices. Il ne peut donc être exclu que des pressions soient exercées sur certaines jeunes, au sein de familles traditionalistes, pour « inciter » leurs filles à s’affubler de ce vêtement, y compris en France. Il s’agirait donc dans ce cas d’une forme d’oppression à connotation religieuse, et même si l’abaya n’en comporte aucune à l’origine, on se trouverait alors en face d’une instrumentalisation de l’objet.

Je ne rentrerai pas dans le débat actuel autour de la « police du vêtement » ou de la stigmatisation de certains, car ce serait participer au bruit de fond ambiant, et donc devenir facilitateur des objectifs poursuivis par notre ministre. Soit dit en passant, les règles vestimentaires existent dans tous les pays du monde y compris en Europe, souvent en lien avec un contexte religieux, certes, mais pas toujours. Remarquablement, la très grande majorité concerne la population féminine, pour laquelle ces règles constituent souvent le socle d’une forme de contrôle social. Je disais plus haut que cette décision relative au port de l’abaya, pour discutable qu’elle soit (ce, au sens premier du terme, c’est-à-dire sujette à discussion), voire disputable (quasiment au sens de la disputatio médiévale, visant à progresser dans une recherche commune de la vérité), présente un seul aspect positif : celui de ne pas laisser les chefs d’établissements seuls face à une décision à prendre. Quelle que soit la solidité des arguments relatifs à l’interdiction du port de ce vêtement, et l'avenir de cette décision en Conseil d'État, au moins la règle est maintenant claire et les élèves et leurs parents informés.

Au-delà, cette décision relève à mon sens du tour de bonneteau, ce jeu où l’on dissimule la carte ou l’objet à trouver sous des gobelets que l’on déplace en trompant le joueur. Le ministre procède ici de même, en désignant quasiment dès sa nomination un pseudo problème comme prioritaire, alors que les vraies priorités, comme la vérité dans les X-files, est ou sont ailleurs ! Le port de l’abaya et les problèmes rencontrés concernent ainsi 500 établissements scolaires selon le ministre lui-même, moins pour certains spécialistes, sur les quelques 60 000 établissements que compte notre pays. On est donc face à un « problème » dont l’occurrence est inférieure à 0,85 %. Difficile d’y voir une priorité, d’autant plus que bien d’autres problèmes concernent eux, un très grand nombre d’établissements... Parmi ces problèmes, parlons tout de suite du manque d’enseignants. À mon sens, celui-ci résulte de deux facteurs principaux. Le premier est la dévalorisation sociale du métier d’enseignant. Depuis des années, ceux-ci ont été moqués, traités de fainéants ayant accepté le poste que pour les congés, voire insultés… Le problème vient d’en haut, de nombre de nos politiques dont l’expression populiste n’avait pour objectif que de dévaloriser la profession, sans doute pour ramasser quelques voix complémentaires très à droite où le prof-bashing (désolé pour l’anglicisme) est un sport national. Dois-je rappeler les propos de M. Nicolas Sarkozy, président de la république et repris de justice à la syntaxe par ailleurs souvent approximative, disant lors d’une interview « [qu’un] professeur travaille six mois par an », ceux de M. Xavier Darcos « …nous fassions passer des concours bac +5 à des personnes dont la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches », ou ceux de Mme Sibeth N’Diaye, affirmant sans rire, lors du confinement, que « …les enseignants ne travaillent pas parce que les établissement sont fermés », alors qu’il leur faillait gérer les cours à distance sans moyens dédiés. Tout cela pour ne citer que trois exemples. Certes, les professeurs ne sont pas tous bons ou excellents, et la structure éducation nationale (EN) où le « pas de vagues » règne en maitre, ne les aide pas dans leurs missions. Mais même « moyens », nos enseignants ne méritent pas le mépris auquel ils sont confrontés. Ce mépris, qui est de fait un mépris de classe, a percolé dans la population et se retrouve dans les discours de café du commerce où l’on dit pis que pendre de ces pauvres profs, ce jusque dans notre commune où des enseignants grévistes ou malades ont été accusés par nos si compatissants élus de prendre élèves ou parents en otages !

Le deuxième problème est consubstantiel au premier. Les salaires, même légèrement revalorisés restent faibles, et surtout pour les non-titulaires, travailleurs quasiment corvéables à merci. Quand on dispose d’un master de mathématiques, soit un bac+5, mieux vaut se faire embaucher par une entreprise du monde de la banque ou de l’assurance, plutôt que comme vacataire par l’EN, les salaires de débutants étant au bas mot dans un rapport de 1 à 2, voire 2,5. Résultats des courses : entre dévalorisations sociale et financière, on ne peut que constater une désaffection de nos jeunes pour les métiers de l’enseignement. C’est pour cette raison, i.e. le manque de professeurs, que la récente réforme du lycée a acté la disparition d’enseignements de mathématiques en première et terminale, l’EN n’étant plus en mesure, matériellement, de les assurer. Il en est de même pour le non redoublement, car il faudrait disposer, pour pouvoir les autoriser sans alourdir les effectifs par classe, de 10% d’enseignants du primaire en plus. C’est en grande partie aussi pour cette même raison, le manque de professeurs, que les élèves de certains départements défavorisés, Seine-Saint-Denis en tête, perdent par rapport à ceux d’autres départements une année de scolarité sur la totalité de leur parcours. Cette année encore, et contrairement aux engagements du gouvernement, il manquera plus de 3 150 professeurs, dont plus de 1 300 dans les écoles et 1 850 dans les collèges et lycées. Il manquera aussi plus de 1 500 infirmiers et infirmières scolaires. Je doute d’ailleurs que le gouvernent change quoi que ce soit à cette situation. Tout au plus utilisera-t-il des « astuces » pour pallier les manques évoqués, car il anticipe de facto une baisse régulière des effectifs dans le primaire, puis, dans le secondaire. Celle-ci est évaluée à 500 000 élèves entre 2022 et 2027, dont 400 000 dans le premier degré et plus de 100 000 dans le second degré. Dans ce contexte tendu, la question de l’abaya me semble, non pas dérisoire, mais certainement aucunement prioritaire à traiter... Elle est en revanche beaucoup plus facile à « aborder », même si la décision actuelle ne la règle en rien au fond. Elle est aussi, sans aucun doute, plus payante politiquement surtout si l'on estime qu'il y aurait, motivant cette agitation subite, des arrières-pensées électorales en regard de la montée du RN ! Bref, l’abaya, tu la vois, tu ne la vois plus, un peu comme ces cartes qui disparaissent mystérieusement dans ce jeu d’escrocs qu’est le bonneteau...



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Message de Cécile Duflot sur le réseau X.
Vu sur :
https://www.topito.com/top-differences-robe-abaya





dimanche 3 septembre 2023

À PROPOS DE SOUTIEN SCOLAIRE...

Un des lecteurs du blog m’a récemment signalé que la municipalité avait décidé de « souscrire » au site « Prof’express » pour permettre aux jeunes Forgeois de bénéficier d’un soutien scolaire. Dans le principe, l’initiative est louable, mais elle risque néanmoins de manquer en partie sa cible…

Prof’express (1) propose une aide à la compréhension des matières enseignées, essentiellement en collèges et lycées. Ainsi, selon leur site, je cite : « originellement proposée en mathématiques, français et anglais, cette aide aux devoirs en ligne s’est ensuite étendue aux sciences physiques, à la chimie et la SVT, à la philosophie ainsi qu’à l'histoire et géographie. Les langues étrangères ne sont pas en reste : l'allemand, l'espagnol l'italien font désormais l'objet d'un soutien scolaire en ligne à la demande ». Le processus fonctionne au moyen d’une plate-forme internet et/ou via le téléphone. Je cite de nouveau la présentation faite par Prof Express : « les familles bénéficiaires peuvent solliciter l'aide d'un enseignant en ligne entre 17:00 et 20:00 tous les jours sauf le vendredi. Durant cette session, le professeur sait être à l'écoute de l'élève pour le rassurer, prendre en compte sa requête et l'aider à trouver lui-même la solution. Cet échange par téléphone, chat ainsi que par classe virtuelle permet de réussir un examen, gagner des points dans un exercice à rendre, un exposé à préparer, etc. ».

Que l’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit : cette initiative est bien entendu potentiellement porteuse d’une aide appréciable pour les jeunes de notre commune. Elle peut sans aucun doute aider nos collégiens et lycéens à mieux comprendre un sujet qui leur aurait échappé. Je suis en revanche moins preneur de l’objectif de « gagner des points dans un exercice à rendre », tout simplement parce qu’il me semble que c’est regarder le soutien scolaire par le petit bout de la lorgnette, et d’une façon simplement utilitariste. Il est vrai qu’à un moment où le bac se joue en grande partie sur le contrôle continu, quelques points de ci, de là, peuvent être bons à gratter. Les profs en savent quelque chose, tant ils sont soumis depuis ces réformes aux pressions parentales et à celles des élèves lorsque les notes des interrogations sont jugées trop faibles (2,3).

Cette vision utilitariste est une des raisons qui, à mon sens, font que ce type de soutien scolaire, bien qu’intéressant, pourrait dans plusieurs cas largement manquer sa cible. Je m’explique, sur le fondement de mon expérience dans le domaine (2 ans de soutien scolaire fourni lors de mes études à la fac, 3 ans avec l’association « Coup de Pouce 91 », sciemment entravée dans son fonctionnement par l’actuelle municipalité, soit dit en passant). Un enfant en difficulté peut l’être sur un point particulier, ou sur une matière particulière. Dans ce cas, un « simple soutien scolaire » pourrait effectivement être profitable. Si la faiblesse est plus générale, il devient important d’en détecter les causes. Certaines peuvent relever d’un trouble de l’attention, de la concentration, ou de problèmes de type dysorthographie, dyscalculie, donc globalement de troubles dits « dys », susceptibles de rendre plus difficile l’apprentissage (4). Parfois c’est très évident, même pour un non professionnel comme l’auteur de ce billet. Parfois, c’est plus compliqué à déceler, et dans ce cas, le simple soutien scolaire par internet ou par téléphone ne suffira surement pas. Dans ce cas même, le soutien scolaire pourrait s’avérer contre-productive car elle risque de renforcer le sentiment d’échec systématique auquel se retrouve confronté l’élève. L’aide d’éducateurs spécialisés, de psychologues, d’orthophonistes, bref de professionnels aguerris est alors nécessaire pour y voir plus clair. Enfin, dans certains cas,  l’élève peut certes avoir des difficultés, mais celles-ci sont en réalité plus systémiques. La fratrie, ses parents, voire ses camarades de classe peuvent constituer des éléments explicatifs (je ne parle pas de responsabilité ici) d’une partie parfois non négligeable des difficultés d’apprentissage. Il est évident que dans ce cas, l’aide proposée via une plate-forme internet ou par téléphone ne résoudra rien.

C’est pour cela que je trouve franchement lamentable l’absence totale d’efforts de l’actuelle municipalité pour soutenir les associations locales qui étaient à même de déceler ses troubles et d’y remédier au moins en partie. C’est le moins que l’on puisse dire, et c’est d’autant plus stupide que l’accès à la plate-forme, s’il est gratuit pour les élèves en difficultés et leur parents, est payé finalement par ceux-ci via leurs impôts dits locaux. Ce montant n’est en effet pas nul, j’en suis sûr, pour la commune, alors qu’il l’était pour l’aide fournie par les associations, même si la mairie tentait de faire pleurer dans les chaumières arguant d’un pseudo coût élevé de prêt des salles municipales… Un grand classique dans notre commune !


Références :

1. Prof’express.
Consultable en ligne :
https://www.profexpress.com/

2. Amandine Hirou. Bac 2022 : avec le contrôle continu, des profs sous la pression accrue des parents. L’Express. Septembre 2021.

3.Pauline Larrour. Être enseignant, c’est subir un peu plus la pression chaque jour sans protection aucune. Marianne. Février 2022.
Consultable en ligne :
https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/etre-enseignant-cest-subir-un-peu-plus-la-pression-chaque-jour-sans-protection-aucune

4. Les troubles « Dys » ou troubles spécifiques du langage et des apprentissages.
Consultable en ligne :
https://www.ffdys.com/troubles-dys

 

Crédit illustration :

Dessin de Deligne pour « La Croix ».