jeudi 28 décembre 2023

LA MAIRIE DE FORGES DANS L'ILLÉGALITÉ (SUITE ET PROBABLEMENT PAS FIN...)

J'avais promis à un lecteur un suivi au sujet de la décision de la mairie de ne plus célébrer les mariages les samedis de juillet jusqu'à mi août, et lors des semaines délections. Le voici ; il sera bref.

En regard de la décision de ne pas célébrer de mariages les samedis précédant les élections, on peut évidemment envisager que la salle des mariages, occupée par le bureau de votre N°1, ne puisse être effectivement utilisée. Cet argument ne suffit pas, néanmoins, à refuser l'organisation des cérémonies les veilles d'élection. La loi est claire là dessus. Comme je l'indiquais dans l'article précédent (1), le choix du jour est en effet laissé à l'appréciation des futurs époux ou épouses, à l'exception des dimanches et jours fériés... Le choix de l'heure lui, ne peut être imposé aux élus, officiers d'état civil, mais il est de tradition - et il est recommandé - de se conformer aux voeux des mariés. 

Que faire si la salle des mariages est indisponible, par exemple en cas de destruction, travaux, élections ? Là aussi la loi est très claire : toute salle de la mairie (la maison commune) peut être utilisée pour célébrer le mariage, sans qu'il soit nécessaire d'en informer quelque autorité. Dans le cas de Forges, on peut donc célébrer un mariage dans la salle du conseil, certes moins « glamour » (désolé pour l'anglicisme), moins chic que la salle des mariages. Il n'y a donc aucune raison de refuser de procéder à un mariage une veille d'élection. A noter : « aucun texte de nature législative ou réglementaire n’impose la présence des symboles républicains, que sont le drapeau national, le buste de Marianne, le portrait du Président de la République ou la devise de la République dans la salle affectée aux mariages (JO AN, 10 avril 2012, p. 2883) » (2).

On peut bien sur imaginer, cas d'école, que toutes les salles d'une mairie soient en rénovation ou inaccessibles. Que faire dans ce cas ? La loi prévoit que toute salle municipale peut être utilisée pour la célébration d'un mariage. Il y a, dans ce cas cependant, des conditions à remplir. Celles-ci sont cadrées par les articles L.2121-30-1 et R.2122-11 du code général des collectivités territoriales (CGCT) qui disposent que « le maire peut, sauf opposition du procureur de la République, affecter à la célébration de mariages tout bâtiment communal, autre que celui de la maison commune, situé sur le territoire de la commune ». Si l'élu souhaite utiliser doit un bâtiment communal autre que la mairie, il ou elle doit donc en informer préalablement le procureur de la République. Ce dernier dispose alors d'un délai de deux mois pour faire connaître au maire son opposition motivée au projet. Dans ce contexte, le procureur doit veiller à « ce que la décision du maire garantisse les conditions d'une célébration solennelle, publique et républicaine. Il s'assure également que les conditions relatives à la bonne tenue de l'état civil sont satisfaites » (2).

Bref, ce petit paragraphe du Petit Forgeois sur la non célébration de mariages en juillet et août, et lors des veilles d'élections, est complètement hors des clous. Venant de cette municipalité, qui ne se caractérise pas vraiment par le souci du service aux citoyens, je n'en suis pas plus étonné que cela...

Références :

1. La mairie de Forges dans l'illégalité. Ce blog.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2023/12/la-mairie-de-forges-dans-liillegalite.html

2. La vie communale. Bases juridique. Le mariage.
Consultable en ligne :
https://www.laviecommunale.fr/bases-de-donnees-juridiques/la-vie-communale/?docName=&sharedDocUid=42749

Crédit illustration :

Document personnel


vendredi 22 décembre 2023

LA MAIRIE DE FORGES DANS L'ILLÉGALITÉ !

 

Je viens de voir dans le dernier numéro du Petit Forgeois, décevant par ailleurs, que la municipalité refuse de procéder aux mariages entre le 1er juillet et le 15 aout. Cette disposition est non motivée ; elle est aussi stupide puisque de nombreux mariages ont lieu les samedis d'été. Plus grave, cette décision est aussi illégale. Explications.

Les différentes textes de lois relatifs aux cérémonies de mariage fondent le droit en la matière. Que disent ces textes ? Tout d'abord, tout mariage doit pouvoir être célébré dans une commune française. En lien, le maire et ses adjoints sont officiers d’état civil (art. L. 2122-32 du code général des collectivités territoriales, ou CGCT). En cas d'indisponibilité du maire et des adjoints, par exemple pour raison professionnelle, de congés, de maladie ou autre, il est possible de faire procéder au mariage par un conseiller municipal. Je cite les indications données par le Journal Officiel du Sénat (27/05/1999) : « L'article L. 2122-32 du CGCT confère la qualité d'officier d'état civil, nécessaire pour procéder à la célébration d'un mariage, au maire et aux adjoints. Toutefois, l'article L. 2122-18 du même code dispose que le maire peut déléguer, sous sa surveillance et sa responsabilité, par arrêté, une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal ». Ceci signifie également qu'un conseiller municipal ne peut « célébrer un mariage que si tous les adjoints sont empêchés et s'il a reçu délégation du maire à cet effet ». Il existe dans ce cas une tolérance pour que le conseiller délégué porte l'écharpe tricolore, même si en droit strict, ce port pourrait être qualifié au pénal comme port illégal d’uniforme (art. 433-14 du Code Pénal, ou CP).

Il existe néanmoins quelques motifs de refus de célébration de mariage, pour un officier d'état civil, mais ceux-ci sont très encadrés, heureusement. Outre le cas de force majeure (catastrophe naturelle, accident majeur, etc.), difficilement invocable ici, le premier est que le dossier déposé en mairie soit incomplet. En d'autres termes, si les formalités nécessaires n'ont pas été accomplies, le refus de procéder au mariage s’impose. De même, le refus peut être motivé par une opposition régulièrement formée, telle que l'absence du consentement du conseil de famille, lorsqu'il est nécessaire, ou s’il y a altération des facultés personnelles d’un des futurs époux (art. 172 et suivants du Code Civil, ou CC). Les autres cas concernent l'existence « d'indices sérieux laissant présumer, le cas échéant au vu de l'audition ou des entretiens individuels mentionnés à l'article 63 du CC, que le mariage envisagé est susceptible d'être annulé au titre de l'article 146 du CC ou de l'article 180 du CC » (art. 175-2 du CC). Les deux articles en référence se rapportent essentiellement au consentement nécessaire (art. 146) et sur l’identité des mariés (art. 180). Ce sont là les seuls motifs autorisant un maire et un officier d’état civil à refuser de procéder au mariage.

Quant au choix de la date, celui-ci est réglé par le code civil et par l’instruction générale relative à l’état civil (IGREC), et tous deux sont très clairs : « Le jour de la célébration est fixé par les futurs époux (art.75 du CV) [note de l’auteur : donc pas par la mairie]. Sauf péril imminent de mort, les intéressés ne peuvent pas imposer à l’officier de l’état civil de célébrer le mariage les dimanches et jours fériés. Le jour peut être choisi dès le début des formalités à accomplir en vue du mariage ou être fixé ultérieurement. Les futurs époux peuvent à tout moment changer d’avis et demander que la cérémonie soit reportée ou avancée. Ils doivent cependant attendre l’achèvement du délai de publication, sauf s’ils en ont été dispensés ». La loi reste muette sur le choix de l’heure, mais une autre IGREC indique que l‘officier d’état civil (c’est-à-dire le maire ou les adjoints) « respecter autant que possible le souhait des époux ». Donc, désolé, mais refuser de célébrer des mariages le samedi est totalement illégal !

Il convient donc de s’étonner de ce message de la mairie de Forges, qui pourrait valoir aux élus de sérieux problèmes s’il était maintenu… En effet, le refus de célébrer un mariage expose son auteur à des poursuites, en regard des articles 342-1 et 432-7 du CP. Je cite : « Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, agissant dans l'exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l'exécution de la loi est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende (art. 432-1). L'infraction prévue à l'article 432-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende si elle a été suivie d'effet (art. 432-2).

A ce stade, je m’interroge donc tout d’abord sur les motivations qui poussent l’actuelle municipalité à ne pas se conformer à la loi. Un maire et ses adjoints devraient en effet montrer l’exemple en matière de respect des lois. Force est de constater que tel n’est pas le cas à Forges, entre refus de mariage, refus récurrents non motivés de prêt de salles communales, et autres insultes semi-publiques à des associatifs… Je dirais même que la façon dont l’actuelle équipe municipale semble se complaire dans cette situation est honteuse, en regard de la fonction et de ce qu’elle implique en termes républicains. Résulte- t-elle d’un je-m’en-foutisme déjà évoqué, d’un poil dans la main magistral en mode « moins j’en fais, mieux je me porte », ou d’une désorganisation complète, je ne sais pas. L’autre interrogation porte sur les compétences de l’équipe et de ses conseils. Je ne comprends pas comment après plus de trois ans de mandat et avec des personnels renouvelés, personne n’ait appelé l’attention des responsables avant de laisser sortir dans le journal municipal une telle énormité. Voir à quel niveau de médiocrité notre commune est tombée me rend infiniment triste…



Crédit illustration :

Sur une image de Jason Hutchens (Sydney, Australie)
Sous licence Creative Commons
https://www.flickr.com/photos/36395862@N00/1664054

jeudi 21 décembre 2023

LA HAINE NE SAURAIT CONSTITUER UN PROGRAMME

Personne n'a pu échapper au débat récent relatif aux lois régissant l'immigration et, plus largement, le sort réservé aux étrangers (hors UE) dans notre pays. Je ne rappelle pas ici les éléments du débat, tant ceux-ci sont connus. Impossible néanmoins de ne pas constater que de nombreuses dispositions de la loi violent des principes fondamentaux de l'égalité de droit, particulièrement pour deux catégories : les étudiants et les étrangers employés en France, puisqu'ils induisent de facto une différence de traitement et de droits, mais aucunement de devoirs, ce qui aurait pu justifier cette différence. Tout ceci fait que cette loi ressemble fortement à de la discrimination institutionnalisée.

En particulier, nombre des personnes affectées par les dispositions légales à venir et qui payent des taxes, impôts et cotisations sociales se voient maintenant refuser le droit d'accès à certaines prestations que ces paiements devraient autoriser. D'une façon plus générale, difficile de ne pas voir dans ce vote, un virage vers la droite la plus extrême, celle qui prolifère sur les décombres des idéologies fondant le racisme ordinaire, à savoir la peur de l'autre et la facilité qu'il y a à le dénoncer comme responsable de tous les maux de la société (le parfait bouc-émissaire, donc). Cette « dénonciation » cible particulièrement, dans sa rhétorique, les strates de populations les plus défavorisés, économiquement et - désolé d'être aussi abrupt dans ma formulation - « intellectuellement ». C'est une façon de détourner le légitime ressenti de leur déclassement vers de pseudos coupables. Ce virage, pris main dans la main par les Républicains et par une majorité de la macronie, est inquiétant à plus d'un titre. Il est surtout déshonorant pour le mouvement présidentiel et pour le Président de la République lui-même qui déclarait pourtant que le vote d'électeurs l'ayant choisi contre la candidate de l'extrême droite l'obligeait. Il reste à espérer, pour éviter un naufrage moral, que le conseil constitutionnel censure les articles les plus répugnants de ce texte...

Un mot, avec mes anciens collègues du collectif Rogue ESR (Enseignement Supérieur et Recherche), pour m'inquiéter des conséquences sur la population étudiante. Au cours de ma carrière, j'ai encadré nombre d'étudiants étrangers : italiens, espagnols, polonais, mais aussi tunisiens, marocains, algériens, pakistanais, boliviens, brésiliens, argentins, américains, canadiens et malaisiens. Tous ont gardé de très bonnes relations avec notre système de recherche, et celles-ci nous favorisent dans le cadre de nos activités. Certains de ces étudiants sont repartis dans leur pays d'origine où ils occupent des fonctions académiques, prestigieuses parfois, et toujours en lien avec la France. D'autres sont restés dans notre pays, et sont chercheurs au CNRS, à l'INRAE, à l'INSERM, ou enseignants d'université, et pour deux ou trois d'entre eux, ils ont obtenu la nationalité française, avec un petit coup de pouce de ma part... Inutile de dire que les propositions contenues dans le nouveau texte de loi vont clairement rendre bien plus difficile la formation en France des futures (je n'aime pas trop ce terme) « élites » étrangères. On se demande quel danger pour notre pays celles-ci représentent, hors d'un danger fantasmé...

Voici en lien le texte proposé par des collègues du collectif Rogue ESR, avec lesquels je suis en total accord : 

« Mardi 19 décembre, sous l’égide de Mme la Première Ministre Elisabeth Borne et de M. Eric Ciotti, une coalition allant du MoDem au Rassemblement national a adopté un projet de loi inscrivant dans le droit français la discrimination des non-ressortissants pour l’accès aux prestations sociales — en d’autres termes, la mesure que MM. Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret popularisèrent dans les années 1980 sous le nom de « préférence nationale ». Mme Marine Le Pen n’a pas manqué de se féliciter de cette onction gouvernementale à une revendication historique de son parti. 

En nombre de voix, le soutien du Rassemblement national a joué un rôle décisif dans l’adoption du texte. Alors que la réforme des retraites avait marqué de fait l’entrée des mal-nommés Républicains dans la majorité gouvernementale sous la forme d’un soutien sans participation, la loi immigration acte aujourd’hui la formation d’une coalition liberticide et xénophobe intégrant des forces politiques exclues des majorités gouvernementales depuis 1945. 

D’aucuns feindront de se rassurer en espérant un deus ex machina sur le tapis vert, du fait du caractère « manifestement inconstitutionnel » de la loi, pour reprendre les termes mêmes du ministre de l’Intérieur, lui-même ancien contributeur à la presse de L’Action Française, fanfaronnant mardi 19 décembre à la tribune du Sénat. Effectivement, le texte adopté piétine la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et le Préambule de la Constitution de 1946. Mais même si le Conseil constitutionnel censurait la loi, le fait que ces textes aient été sciemment bafoués suffirait amplement à justifier notre alarme. En outre, la désinvolture avec laquelle ce jugement au doigt mouillé a été prononcé devant le Sénat en dit beaucoup sur le peu de cas que le gouvernement fait des fondements d’une démocratie parlementaire. Mais il est vrai qu’hier fut aussi le jour du déclenchement du vingt-troisième article 49.3 en 18 mois : désormais l’Assemblée Nationale ne semble donc autorisée à voter la loi que lorsque les vues du gouvernement sont au diapason des votes du Rassemblement national. Autant dire que Mme Le Pen est à la fois leader de l’opposition parlementaire et co-rédactrice de l’agenda législatif du gouvernement Borne-Macron ».

Une autre paragraphe pour dire que cette situation inédite provoque plus que des tiraillements dans la majorité présidentielle. Plusieurs ministres ont annoncé leur démission, dont la ministre de l'ESR, Mme Sylvie Retailleau que je connais bien, et à qui, en anecdote, je faisais la bise alors que j'étais en activité au CNRS. Je ne comprends pas d'ailleurs sa position tant l'image que j'ai d'elle ne correspond en aucun cas aux fondamentaux contenus dans ce texte de loi... C'est aussi ce que dit, à mots cachés, le texte de Rogue ESR : « Une fois passée la comédie des déclarations de principe, une bonne partie des démissions tant annoncées se font encore attendre, y compris à cette heure celle de Mme Retailleau. Si leur dimension symbolique serait appréciable, ces démissions resteraient anecdotiques sur le plan politique tant il est illusoire d’imaginer qu’elles pourraient limiter à elles seules la radicalisation du gouvernement. Au moins sauveraient-elles l’honneur des démissionnaires.

Quelques présidences d’universités ont marqué une opposition à la loi dans un communiqué conjoint. On peut douter de sa portée effective si l’on observe la part importante des signataires ayant participé à la mise en place du dispositif cyniquement appelé « Bienvenue en France », dont les événements du 19 décembre confirment qu’il s’agissait d’une répétition générale de l’inscription de la « préférence nationale » dans la loi. 

Or, les conséquences de la loi Immigration adoptée hier sont proprement calamiteuses pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche. Elles seront majeures pour les échanges internationaux et les partenariats avec de très nombreux pays, pour les chercheurs étrangers, et pour tous les étudiants extracommunautaires. Le versement obligatoire d’une caution, l’application impérative à toutes les universités de frais d’inscription astronomiques de 2 770€ en licence et 3 770€ en master ainsi que la suppression des APL conduiront des dizaines de milliers d’étudiantes et d’étudiants à se détourner des universités françaises, de notre pays et de notre culture, désormais perçus comme une terre d’exclusion et non plus d’accueil ». 

A mon sens, nous marchons avec ce nouveau texte, à l'envers. Il est de toutes façons illusoire de croire que ces lois vont empêcher l'immigration de personnes qui n'ont plus rien à perdre dans leur pays, soit économiquement, soit parce que celui-ci est en guerre. Il faudrait d'ailleurs se poser, la question de savoir quelle est la contribution de la France dans les situations que ces migrants rencontrent dans leur pays... Ces gens là se déplaceront de toutes façons. Le seul moyen de leur permettre de rester sur leur terre natale est de favoriser leur conditions de vie sur place. Quelques ONG et autres associations l'ont bien compris. Je mentionnerai ici le cas de Danaya, association forgeoise, qui a oeuvré et continue d'oeuvrer dans ce but, contre vents mauvais et marée brune aux relents pétainistes. La seule différence que les nouvelles lois génèrera est d'accroître les dangers qui les guettent dans leur long voyage vers l'Europe, face aux passeurs, puis leur précarité une fois en France. Il est illusoire, également, de croire que l'on pourra reconduire des irréguliers à la frontière car leur pays d'origine ne les accueillera pas ! Or ceci constitue une obligation absolue. En ce sens les fameuses OQTF (obligation de quitter le territoire français) sont une fumisterie. On se rappellera à cet égard le traitement réservé à des fonctionnaires de police français qui avaient « accompagné » une personne concernée par une OQTF dans son supposé pays d'origine et qui se sont retrouvés... en prison là-bas, suspectés de violences sur le reconduit ! Et je ne parle pas des centaines de milliers voire des millions de personnes déplacées à venir, pour des raisons climatiques, dans le cadre du changement global auquel nous avons également contribué, certes peut être moins que d'autres pays développés, mais bien plus que les pays du sud... Évidemment, lutter contre les leviers qui engendrent l'immigration est bien plus compliqué que de pondre une loi aussi honteuse soit-elle, car légiférer donne au bon peuple l'impression que nos gouvernants agissent. Reste que la haine ne saurait constituer un programme.  

 

Crédit illustration :

Dessin de Cambon pour Urtikan.net

samedi 2 décembre 2023

À FORGES, UN SYMBOLE DE NOËL TRÈS PERTURBANT !

Noël approche, et l’on commence à voir, de ci, de là, les traditionnels éléments décoratifs de fin d’année. Dans notre commune, un de ces éléments, déjà apparu l’année dernière, semble s’être multiplié au cours des douze derniers mois. Et il est plus que symbolique…

Autant le préciser tout de suite, je n’ai rien contre les symboles de Noël. Même s’il s’agit d’une fête religieuse avant tout, c’est aussi, nolens volens, une fête familiale, un repère dans l’année qui perd de fait et en grande partie aujourd’hui sa signification religieuse. Étonnant retour de l’histoire d’ailleurs, puisque la date exact de la naissance de Jésus de Nazareth est inconnue. Le choix de la date de Noël au 25 décembre correspond en fait à la période postérieure au solstice d’hiver, à celle du retour de la lumière aux plus fort des ténèbres, ce qui a pu facilement être associé avec la naissance « d’un messie » (1) dans un contexte de développement du christianisme.

Il est raisonnable de penser que l’étalage des décorations lumineuses de cette fin d’année s’explique de la même façon, que ces décorations se trouvent sur nos maisons ou dans notre sapin. On trouvera d’ailleurs dans la référence précédente l’origine de ces sapins de Noël. Leur présence ramène loin dans l’antiquité romaine, où il était fréquent d’utiliser des variétés végétales « sempervirentes » pour décorer les maisons, c’est à dire des plantes restant toujours vertes tout au long de l’année, symboles de vie. L’arrivée du sapin est bien postérieure, et elle reste sujette à de multiples explications (1,2,3) qui retracent cependant la provenance de cet usage en Europe de la Baltique, ou en Alsace, ou dans une région se trouvant aujourd’hui en Allemagne.

Autres éléments décoratifs, les chaussettes, ou plutôt les bas de Noël. Ceux-ci trouveraient leur origine dans la légende de Saint Nicolas, qui voulait aider un homme pauvre et veuf à payer les dots de ses trois filles. Craignant que cet homme ne refuse son aide, et que ses filles ne trouvent mari, il plaça alors une boule d’or dans les bas des jeunes femmes qui séchaient devant la cheminée… Selon les origines, ces mêmes boules ont ensuite agrémenté les sapins de Noël, bien que plusieurs auteurs indiquent qu'initialement, ces décoration auraient plutôt été des fruits secs dont se régalaient petits et grands…

Impossible de terminer ce rapide tour d’horizon sans parler du Père Noël, dont la naissance est attribuée, en grande partie à tort, à la firme américaine Coca-Cola. En effet, il existe de fortes ressemblances entre le personnage bardé de rouge et blanc, symbole de Noël, et Saint Nicolas lui-même, souvent représenté avec barbe blanche et longue cape rouge… De plus, on trouve des allusions au Père Noël dès le XIXe siècle, dans deux contes de Noël écrit par Clement Clarke Moore, professeur de théologie et de littérature grecque, et poète américain. Dans « The night before Christmas » (la veille de Noël), un personnage semblable au Père Noël apparaît dans son traîneau tiré par des rennes. « Ce même auteur rédigea un texte intitulé « A Visit From St Nicholas » (la visite de St Nicolas) qui parut dans le journal « Sentinel » de New York le 23 décembre 1823. Ce texte parlait de lutins qui distribuaient des cadeaux aux enfants par la cheminée et se déplaçaient dans une carriole tirée par 8 rennes » (4). La représentation caractéristique n’apparut qu’en 1863 dans le magazine « Harper’s Illustrated Weekly », ou Santa Claus (déformation de Sinter Klass, nom batave de Saint Nicolas, importé par les émigrants hollandais aux Etats Unis) fut dessiné par Thomas Nast, vêtu d’un costume garni de fourrure blanche et portant un large ceinturon de cuir (4). Coca-Cola ne fit que réemployer ces représentations dans les années 30, en demandant au dessinateur Haddon Sundblom d’utiliser la même charte de couleur que celle utilisée par la firme américaine. Le Père Noel était déjà rouge et blanc, mais il devenait alors conforme au standard graphique de Coca-Cola.

Venons-en au fait. On retrouve ces couleurs de Noël sur les éléments décoratifs de notre commune, qui semblent s’être multipliés ces derniers temps, et qui sont… des barrières ! Oui, les lecteurs m’ont bien lu, des barrières comme symboles de Noël. A Forges, on fait du lourd, sans se rendre compte du message subliminal. La barrière représente, en effet, ce qui divise, ce qui sépare, pas ce qui unit. La barrière est d’ailleurs le symbole des frontières, de l’exclusion, de ce qui tient l’autre à distance. Elle est aussi symbole de fixité, d’absence de mouvement, tout ce que nous constatons dans notre commune depuis trois ans. La barrière permet de dire une différence, entre riches et pauvres, entre dominants et dominés, entre le dehors et le dedans, sans doute entre monde matériel et monde spirituel, mais aussi et surtout entre eux et nous… C’est donc un symbole fort qu’ont choisi les élus de notre commune, repliés dans leur entre-soi, qui sont - et comment s’en étonner - précisément en grande partie ceux qui ont refusé l’accueil de l’autre, du faible, du plus petit voilà quelques années lors du pénible épisode des migrants. Il y a là une cohérence incroyable entre les faits et le symbole. Par voie de conséquence, le rouge et le blanc qui ornent ces « drôles » d’éléments décoratifs forgeois me font davantage penser ici aux couleurs des rubans de police, de la « rubalise », et à celle des panneaux d’interdiction routiers, qu’au costume du sympathique barbu que nous connaissons.

Allez, malgré tout, joyeux Noël à Forges !




Références :

1.Anonyme. Aux origines de Noël, le solstice d'hiver… Futura Sciences.
Consultable en ligne :
https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/histoire-origines-noel-solstice-hiver-7151

2. Amy McKeever. Sapin de Noël : entre histoire et traditions païennes. National Geographic. Décembre 2020.
Consultable en ligne :
https://www.nationalgeographic.fr/histoire/culture-histoire-paienne-tradition-sapin-noel

3. Sapin de Noël. Page wikipedia.
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sapin_de_No%C3%ABl

4. Anonyme. L’histoire du Père Noel. Noël vert.
Consultable en ligne :
https://www.noel-vert.com/lunivers-de-noel/histoire-pere-noel/



Crédit illustration :

Document personnel

jeudi 30 novembre 2023

DES GENS FORMIDABLES.
II . EMMANUEL MALEPART.

Un certain nombre de lecteurs du blog n’auraient sans doute pas su, sans la photo, qui est Emmanuel Malepart, plus connu de nombreux Forgeois comme « Manu ». Manu a été « prof » de guitare à l’Académie des musiques modernes (AMM). Son parcours comme musicien vient enfin de recevoir une reconnaissance très méritée.

Comme il faut toujours dire d’où l‘on parle, j’indique ici que cet article est un spécial copinage, même si je n’ai rien à vendre, et rien à gagner. Cela fait bien une quinzaine d’années que nous connaissons Manu et, sans être un ami proche, il est une de nos relations amicales

Avant d’expliquer ce qui motive ce billet, je précise que Manu et ses acolytes ont œuvré directement ou en toile de fond pour les maintenant défunts festivals de musique Forgeois, tels que Zik à Forges et Tremplin Les Bains, sans compter ses participations aux fêtes de la musique à Forges, du temps où celles-ci existaient dans notre commune. De plus, Manu a enseigné à l’AMM, comme je l’indiquais plus haut, pendant plusieurs années, et il a vu passer des dizaines de jeunes et de moins jeunes. Au-delà, lui et son groupe Manew, tourne depuis longtemps dans des festivals et salles de concert alentours, du Studio à Limours au festival Foud’rock, pour n’en citer que deux. Son parcours est assez atypique car la guitare n’était pas son choix premier. Après des études qui, je le cite, « n’étaient pas son truc », Manu devient dessinateur industriel. Mais la guitare et les hasards de la vie, et en l’occurrence l’écoute du morceau « Antisocial » du groupe « Trust », l’avait déjà entrainé sur la piste musicale, celle du « hard rock » s’il fallait apposer une étiquette sur son travail.

Des années plus tard, tout son brio transparait car, il faut maintenant l’écrire, Manu vient de remporter deux distinctions majeures, à savoir deux médailles d’or aux Olympiades de la Guitare qui se sont déroulées à Volos, en Grèce. Organisées sous le patronage de l’UNESCO, Manu et son groupe y représentaient la France. Une première médaille a récompensé le meilleur solo de guitare, celui qu’il interprète dans « Wind », morceau de son album sobrement intitulé « Manew ». La deuxième médaille est par ailleurs attribuée à son groupe, précédemment cité, pour la qualité de son œuvre. C’est à ma connaissance la première fois qu’un musicien remporte deux médailles d’or à ce prestigieux concours. Ces distinctions lui ont valu la reconnaissance de la presse spécialisée. Localement cependant, comme je pense qu’il n’y aura aucun papier dans notre Petit Forgeois, il m’a semblé juste de rédiger ce court billet de blog.

Cette participation aux Olympiades de la guitare, Manu et son groupe la doivent en grande partie à l’organisateur du « World Guitar Day », un événement qui a pour objectif de célébrer la guitare sous toutes ses formes. Il rassemble de très nombreux acteurs du monde de la musique, venant de plus de 110 pays. Depuis ses deux brillants succès au concours, Manu et Manew ont été contactés par l’organisateur de United Guitars, un projet au moins aussi prestigieux, qui vise à rassembler les guitaristes les plus reconnus au niveau mondial, lors d’un concert, puis sur un disque… On peut donc légitimement penser que sa carrière est sur une pente ascendante, et ce n’est que justice.

Un mot pour parler du musicien ou plutôt de la personne, car c’est cela qui justifie le titre de l’article. Manu est une de ces personnes formidables que l’on rencontre de temps en temps. Malgré sa virtuosité époustouflante, il n’a pas la grosse tête. Il est toujours plus que sympathique, probablement en raison de sa capacité d’analyse de son parcours, de ses coups de chances et de malchance, et de son activité musicale. Au-delà, la philosophie de l’existence en fait un individu très attachant et porteur de grandes qualités humaines, qui gagne à être connu. Nul doute que ces distinctions récentes vont aider à cette reconnaissance. C’est tout ce que je lui souhaite.


Références :

Pour ceux qui voudraient en savoir plus sur Manew et son groupe, vous trouverez ci-dessous les références de son site, et des renvois vers des morceaux en ligne.

Le site :
http://www.manewmusic.com/

Wind et autres clips :
https://www.youtube.com/watch?v=1JTmJiCas9o
https://www.youtube.com/watch?v=Jzkyu1n-tmI


Les prestations aux festivités :
https://www.youtube.com/watch?v=940UFW_ijIQ
https://www.youtube.com/watch?v=n7nomQDqvK4
https://www.youtube.com/watch?v=_XO-cghjmBE
https://www.youtube.com/watch?v=1MgNFL7qDZA


Crédit illustration :

Site d’Emmanuel Malepart

mardi 28 novembre 2023

DES GENS FORMIDABLES
I. ROLAND FRANQUEMAGNE

 

Dans le western « le bon, la brute et le truand », le héros dit à son acolyte d’un jour : « dans la vie, il y a deux catégories d’individus : ceux qui ont un révolver chargé et ceux qui creusent. Toi, tu creuses ! ». Cette superbe métaphore du monde capitaliste peut, à mon sens, être réécrite en disant : dans la vie, il y a deux catégories d’individus, ceux qui font attention aux autres, et ceux qui leur marchent dessus… Roland Franquemagne était de ceux qui faisait attention aux autres. Il est décédé début novembre. Comme il y a peu de chance qu’un article lui soit consacré dans le prochain Petit Forgeois, j’ai pensé que ce blog pouvait/devait parler de lui...

Pour de nombreux lecteurs, son nom n’évoquera sans doute rien de particulier. Raison de plus, donc, pour écrire cet article ! Si je vous dis qu’il avait œuvré dans notre commune pour que les plus fragiles puissent mener une existence décente, et que nous, élus de l’époque, l’avions aidé en cela, peut-être commencerez-vous à cerner le personnage. Trêve de cachotteries, Roland Franquemagne était le président de Monde en Marge, Monde en Marche (M et M). Cette association est celle qui a joliment réhabilité en logements d’aide aux démunis, les deux bâtiments Vitalis que la commune avait rachetés à leur propriétaire.

L’histoire de M et M a été contée par plusieurs intervenant lors des obsèques de Roland Franquemagne dans la basilique de Longpont sur Orge, siège de l’association. Je cite les propos tenus par d’autres qui décrivent bien l’histoire et la philosophie de l’association : « En 2003, un groupe de paroissiens découvre que des personnes dorment dans leurs voitures ou dans des cabanons insalubres. Ils prennent conscience du mal logement sur la ville. N’écoutant que leur humanisme, ils décident d’acheter un bien pour héberger un premier locataire. C’est ainsi que nait M et M […]. Les premières acquisitions se font avec un minimum de subvention et un maximum de dons. Les travaux sont réalisés en grande partie par eux-mêmes, et par des entreprises en compressant les coûts. Les talents de négociateur de Roland, avec parfois un peu de mauvaise foi, font le reste. Un logement décent est un droit pour tous. L’insertion par le logement démarre par un toit au-dessus de sa tête. Très tôt, l’association décide que chaque locataire sera accompagné par un bénévole et un professionnel. La famille M et M voit le jour, donnant du sens à l’engagement de chacun, témoignant de ton dévouement envers les plus petits […]. En 2011 on passe à 15 logements et une équipe toujours 100% bénévole, année où l’association obtient son agrément de Maitrise d’ouvrage d’insertion ; il permet de mieux subventionner nos opérations par l’état puis par le département et la région. En 2016, l’association compte 60 logements, 3 salariées, 35 bénévoles […].Très vite de nouveaux projets voient le jour à Forges les Bains, Gometz le Chatel, Ollainville, Cheptainville, Villiers sur Orge, la Ville du Bois, Vauhallan, Sainte Geneviève des bois ». Ainsi aujourd’hui, ce sont plus de 200 toits qui sont offerts aux personnes accueillies à M et M. Dans ce contexte, impossible de ne pas rappeler les propos tenus à Forges par certains, qui voyaient dans l’opération Vitalis, le fait que Forges se transformerait en « quartier » à l’image de la Grande Borne à Grigny, ou aux Tarterets à Corbeil… Sans nier que la population accueillie n’est pas toujours la plus exempte de problèmes (et pour cause), il me semble utile de rappeler que plusieurs gros dossiers de délinquance dans notre commune et environs ont concerné des jeunes issus, eux, de familles bien installées, très « blanc, bleu », que l’on aurait a priori classées comme sans histoires.

Pour revenir à M et M et à Roland Franquemagne, je ne peux également que citer d’autres propos tenus lors de ses obsèques, relatifs à la visite que M. le Préfet de l’Essonne avait faite à l’établissement de Longpont : « Je ne pense pas déformer [la pensée de M. le Préfet] en disant que M. Le Préfet, qui a passé un long moment à discuter avec tout le monde, a été impressionné par cette réalisation. Une belle réalisation aussi bien architecturale, que sociale et humaine. Un endroit qui offre aux « cabossés de la vie » un refuge, une famille, un foyer pour se remettre en marche ». Cette impression forte laissée sur le représentant de l’État s’est d’ailleurs traduite par une lettre adressée par ce dernier à l’association et à sa famille, mais dont je ne connais pas les termes. 

Effectivement, Roland Franquemagne, que je n’avais croisé qu’à quelques occasions, mais dont je connaissais l'action, était un homme bon. Son implication constante visant à « réduire les marges de la société » est sans aucun doute un modèle pour tous et je n’ai aucun doute sur la pérennité de l’œuvre qu’il a entreprise, qui est et sera poursuivie par d’autres personnes de qualité. Encore une fois, comment ne pas rappeler ici, très en creux, le refus de l’actuelle municipalité de contribuer par un simple prêt de salle à M et M au Noël de ces Forgeois les plus pauvres ? Pour reprendre de nouveau les termes entendus lors des obsèques, ce comportement de nos élus, est-ce « par méconnaissance, par peur de l’inconnu et de la différence » ? Ou est-ce, plus prosaïquement « par simple égoïsme » ? Ou plus grave, serait-ce un nouvel avatar du contexte actuel, et je cite ici les propos entendus aux obsèques, « où l’extrémisme, appuyé par les démagogues et les ****** de tous poils, semblent s’être donné rendez-vous pour détruire ce que des personnes comme Marif [sa femme] et Roland ont patiemment construit : la solidarité, l’humanisme, l’accueil de l’autre quels que soient sa nationalité, ses origines, sa religion, ses convictions, son niveau de vie »… Difficile à dire, mais quelle honte pour notre commune, surtout lorsque ce genre de refus est envoyée à la tête d’une personne comme Roland Franquemagne, qui a passé une grande partie de sa vie à « changer notre regard, par sa force de conviction, par sa persévérance, par son pragmatisme, par son habileté, son ironie, et par sa capacité aussi à appeler un chat un chat ».

Si vous souhaitez contribuer en cette période de collecte alimentaire aux activité de M et M, vous retrouverez toutes les informations utiles sur leur site, en référence.



Référence et crédit illustration :

Monde en marge, monde en marche.
https://www.metmmetm.fr/

vendredi 17 novembre 2023

Y A-T-IL UN RISQUE DE VOIR UNE ÉPIDÉMIE DE FIÈVRE HÉMORRAGIQUE EN EUROPE ?

J’ai discuté voilà peu avec un ami du risque de voir apparaitre une épidémie d’Ebola en France. Cette maladie fait visiblement peur. Dans un article de blog ancien (1), j’indiquais cependant en quoi il était peu probable de voir se développer une telle épidémie en Europe. Mais y a-t-il un risque de voir se propager d’autres maladies de type fièvres hémorragiques ?

Le terme fièvre hémorragique recouvre un ensemble de maladies diverses, la plupart étant d’origine virale. Cependant, au moins une bactérie est capable de déclencher chez l’homme une pathologie de type fièvre hémorragique. Il s’agit d’une entérobactérie très proche de la célèbre Escherichia coli, dénommée Shigella sonnei. Ces micro-organismes causent des shigelloses, caractérisées par des diarrhées sanglantes très contagieuses, et qui peuvent, dans les cas les plus graves, conduire au décès des patients atteints. L’institut Pasteur alerte sur son site (2) sur ces pathologies, d’autant plus redoutables que les souches responsables sont devenues assez fréquemment résistantes aux antibiotiques dits de première ligne (comprendre ceux prescrits de façon usuelle par votre médecin), et même à ceux de dernière génération. Elles restent en partie sensibles aux antibiotiques d’usage hospitalier, mais ceux-ci sont en général plus agressifs, devant d’ailleurs être administrés par voie intraveineuse. Le risque de voir des shigelloses hémorragiques se développer en France est limité, mais réel cependant, d’autant que la plupart des cas ont été observés « chez des voyageurs revenant d'Asie du Sud ou d'Asie du Sud-Est, ou au cours d’une épidémie survenue dans une école en 2017 », le cas initial revenant lui aussi d’un voyage en Asie du Sud-Est. Sont également concernés des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (2). L’antibiorésistance a cependant conduit l’OMS à émettre un bulletin d’information dès mars 2022. A noter : on estime que la contamination par seulement une centaine de bactéries peut conduire à une shigellose. Enfin, les quatre espèces de Shigella les plus fréquemment rencontrées causent au total le décès de 200 000 personnes dans le monde par an, dont 65 000 enfants de moins de 5 ans (3).

En ce qui concerne les fièvres hémorragiques d’origine virale, la plupart d’entre elles émergent en Afrique, mais pas uniquement. La fièvre Ebola semble liée à la consommation de viande de brousse, c’est-à-dire d’animaux eux-mêmes contaminés par le virus Ebola. La transmission se fait ensuite d’homme à homme, sur un mode non aérien, mais liée au contact direct ou indirect avec des fluides de patients (sang, urine, selles et sueur, directement ou sur des surfaces contaminées). Non soignée, la létalité de la fièvre Ebola avoisine 50 % en moyenne. Dans la même famille de virus qu’Ebola, les Filovirideae, on trouve le virus Marburg responsable de la maladie du même nom, la fièvre hémorragique Marburg, aussi appelée maladie du singe vert. La fièvre hémorragique Marburg présente de très forte similitude avec la fièvre Ebola : même type de transmission interhumaine, et même pronostic, en cas de soins limités. Le risque d’épidémie en France est quasi inexistant, en raison de l’absence du réservoir naturel, une chauve-souris, la roussette d’Afrique. Néanmoins, compte-tenu du changement climatique en cours, il ne peut être exclu que cet hôte « remonte » plus au nord. Ceci serait alors inquiétant, dans la mesure où il n’existe pas de vaccin ni de traitement antirétroviral approuvé pour la fièvre Marburg. Même si « des anticorps monoclonaux sont en cours de développement et des antirétroviraux, comme le Remdesivir et le Favipiravir qui ont été utilisés dans le cadre d’études cliniques portant sur la maladie à virus Ebola, pourraient également être testés pour la maladie à virus Marburg » (4). En ce qui concerne l’approche vaccinale, le vaccin Mvabea développé contre le virus Ebola a été « modifié pour produire quatre protéines à partir de l’espèce Ebolavirus Zaïre et trois autres virus du même groupe (filoviridae) » (4). Il est donc possible que ce vaccin puisse conférer une immunité partielle vis-à-vis du virus Marburg, mais ceci reste à vérifier lors d’essai cliniques.

Bien connue également, est la fièvre jaune. Tous les ans, environ 200 000 cas de fièvre jaune sont recensés dans le monde, conduisant à 30 000 décès. Cette maladie virale, causée par un virus différent des deux virus évoqués plus haut, se caractérise par des symptômes de type grippal, mais qui peuvent, dans les formes graves, évoluer vers des hémorragies digestives et l’apparition d’un ictère (une jaunisse) qui donne son nom à la maladie. Il n’existe à ce jour aucun traitement curatif de la maladie. La transmission se fait par piqure de moustique, dont ceux du genre Aedes en Afrique, particulièrement en zones urbaines. « Le moustique à l’origine des épidémies urbaines est Aedes aegypti. C’est aussi le vecteur de la dengue et du virus Zika, autres arboviroses en pleine extension à travers le monde » (5). Aujourd’hui, les cas de fièvre jaune en Europe sont uniquement liés à des retours des régions contaminées. Néanmoins, le réchauffement de la planète pourrait accélérer l’implantation de moustiques capables de transmettre ces maladies dans l’hémisphère nord, où l’expansion est déjà favorisée par les échanges commerciaux liés à la mondialisation (5). Dans ce sombre tableau, une bonne nouvelle : un vaccin existe et il est très efficace, conférant en une injection une immunité à vie, avec très eu d’effet secondaires. Tous les voyageurs qui se rendent dans certaines régions d’Afrique doivent d’ailleurs présenter une vaccination à jour. A ce stade, il est donc peu probable que la fièvre jaune constitue une menace sérieuse pour l’Europe, mais une surveillance reste nécessaire.

Dernier dossier, le plus inquiétant à vrai dire, celui de la fièvre hémorragique dite Crimée-Congo (FHCG). Cette maladie est provoquée par un virus de la famille des Bunyaviridaea, différent encore ce ceux évoqués plus haut, et transmis par des tiques. Il provoque des fièvres hémorragiques graves, dont le taux de létalité oscille entre 10 et 40%. En termes de traitement curatif, les options disponibles sont des traitements de soutien à visée générale. Un antiviral, la ribavirine, prescrite pour le traitement des hépatites B et C, a cependant été utilisée avec des bons résultats par voie orale ou intraveineuse (6). La vaccination n’est elle pas encore au point, en raison, en grande partie, de l’absence pendant de nombreuses années d’un système modèle animal permettant de développer ce vaccin. Plusieurs essais sont en cours, avec des vaccins conventionnels, ou à ADN ou à ARN, ces deux derniers semblant donner des résultats très prometteurs, avec une protection de 100% après deux injections (7). Le risque de voir apparaitre une épidémie de FHCG est résumé par la phrase : « la transmission se fait par des tiques, mais aussi par contact avec les fluides d’animaux d’élevage eux-mêmes contaminés ». Les tiques vectrices appartiennent au genre Hyalomma, présentes dans le Sud de la France depuis plusieurs années. Là aussi, en lien avec le changement climatique et les échanges commerciaux, ces tiques remontent au nord, certaines ayant maintenant été détectées aux Pays-Bas. Il est important de noter qu’à ce stade, aucun cas de FHCG n’a été détecté en France ni chez nos voisins et amis bataves, mais des cas l’ont été en Espagne et dans la régions des Balkans. En lien, l’ANSES appelle à une vigilance accrue en France (8).

Ce billet ne fait qu’un tour d’horizon rapide et limité des fièvres hémorragiques. Je n’ai ainsi pas cité nombre d’entre elles, telle la fièvre de Lassa, endémique en Afrique de l’Ouest et transmise par le rat, les fièvres d’Argentine, de Bolivie, du Brésil ou du Venezuela, transmises par d’autres rongeurs, etc. Toutes sont caractéristiques des régions tropicales ou équatoriales, mais on aurait tort de croire que seules ces régions sont affectées, comme on le voit avec la FHCC. On notera dans ce billet de blog, en filigrane, le rôle majeur que joue et continuera de jouer le changement climatique mais aussi la mondialisation des échanges dans l’émergence de ces pathologies dans des régions pour le moment épargnées. Il s’agit sans doute là d’un nouvel avatar des externalités négatives d’une économie qui depuis l’après-guerre privilégie la course au profit, sans réflexion sur ses impacts en termes sociaux sans doute, mais également environnementaux et sanitaires.


Références :

1. Il n’y aura probablement pas d’épidémie d’Ebola en France. Ce blog.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2021/08/il-ny-aura-probablement-pas-depidemie.html

2. Émergence en France d’une souche de Shigella sonnei hautement résistante aux antibiotiques. Communiqué de presse de l’Institut Pasteur. Janvier 2023.
Consultable en ligne :
https://www.pasteur.fr/fr/espace-presse/documents-presse/emergence-france-souche-shigella-sonnei-hautement-resistante-aux-antibiotiques

3. Les shigelloses. Institut Pasteur.
Consultable en ligne :
https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/shigellose

4. Maladie à virus Marburg. Centre des médias de l’OMS. Aout 2021.
Consultable en ligne :
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/marburg-virus-disease

5. La fièvre jaune. Institut Pasteur.
Consultable en ligne :
https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/fievre-jaune

6. Fièvre hémorragique de Crimée-Congo. Dossier OMS. Juin 2022.
Consultable en ligne :
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/crimean-congo-haemorrhagic-fever

7. Un article de revue en anglais a été publié cet été :
Aykut Ozdarendeli. Crimean–Congo Hemorrhagic Fever Virus: Progress in Vaccine Development. Diagnostics (Basel). Aout 2023. doi: 10.3390/diagnostics13162708
Consultable en ligne :
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10453274

8. Fièvre hémorragique de Crimée-Congo : une émergence en France est possible. Expertise ANSES. Juin 2023.
Consultable en ligne :
https://www.anses.fr/fr/content/fievre-hemorragique-crimee-congo-une-emergence-en-france-possible



Crédit illustration : 

Virus Ebola.
Photo de Cynthia Goldsmith
Licence Creative Commons



dimanche 5 novembre 2023

UNE MUNICIPALITÉ EN MODE « RIEN À CIRER »…

Ce qui est amusant à Forges depuis 3 ans, c’est que chaque fois que l’on pense avoir touché le fond, on s’aperçoit que l’on peut descendre encore un poil plus bas… Trois exemples pour illustrer mon propos !

Voilà quelques jours, une association devait passer en mairie récupérer une clef de salle pour une réunion. Manque de chance, ce jour la mairie était fermée et il était donc impossible d’obtenir la clef. Les responsables associatifs appellent donc l’élu d’astreinte pour se retrouver en mairie et récupérer la clef. Réponse de l’élu : « je ne suis pas habilité à vous donner la clef ». Ben si, justement, en tant qu’élu d’astreinte, on est habilité à tout faire sur la commune, et même à remplacer le maire avec délégation si nécessaire. J’ai personnellement été d’astreinte nombre de fois, et je sais que l‘on peut s’attendre à tout. Ceci va des questions administratives que l’on peut aimablement renvoyer sur la mairie aux heures d’ouverture aux routes qu’il faut aller nettoyer ou bloquer en cas d’accident, ou des internements d’office aux ouverture de bâtiments municipaux pour telle ou telle raison. Encore faut-il avoir envie d'agir, d'aider... Dans le cas que je narre ici, non, c’était sans doute trop demander un samedi à 10H00 du matin à un élu qui habite pourtant tout à côté de la mairie…

Deuxième « dossier », non lié, celui d’un couple de Forgeois se rendant en mairie pour se marier. Lors de la cérémonie, la maire se rend alors compte que le document que les mariés et leur témoins s’apprêtaient à signer était… déjà signé ! Incompréhension des mariés jusqu’à temps que Mme la maire leur explique qu’il y a eu une erreur et que le document concernant leur cérémonie, c’est-à-dire l’acte de mariage, document officiel s’il en est, avait été signé par les mariés de la cérémonie précédant la leur ! Sur un ton badin, la maire leur indique que ce n‘est pas grave et que le procureur a donné son accord pour leurs signatures. Il y a donc sur l’acte de mariage original de ce couple une dizaine de signatures : quatre des mariés et le reste des témoins… Je ne suis pas un spécialiste des questions d’Etat Civil, mais je suis à peu près sûr que tout ceci n’est pas du tout « dans les clous » ! En tout état de cause, je doute fortement de la validité de l’acte de mariage figurant au registre… Dès que l’erreur a été repérée, Madame la maire (dont on se demande pourquoi elle assure seule les mariages, soit dit en passant) aurait dû appeler les services du procureur, non pas pour demander l’autorisation de signer à quatre mains l’acte de mariage, mais pour demander l’annulation du document. Elle aurait ensuite du immédiatement faire réimprimer un acte de mariage vierge que les mariés et leur témoins auraient signé. Je ne comprends d’ailleurs pas que cela n’ait pas été fait : est-ce de l’incompétence ou de la légèreté, mystère ? Quoi qu’il en soit, je ne peux qu’inciter les mariés à vérifier auprès de personnes compétentes la validité de leur acte de mariage. Les conséquences d’une invalidité pourraient en effet être lourdes à terme.

Dernier exemple, concernant encore une fois le monde associatif. Une association envisage de demander une salle pour un évènement artistique intéressant de nombreux Forgeois. Elle contacte l’adjointe aux animations, une première fois. Pas de réponse. Elle relance l’élu une seconde fois, toujours pas de réponse. Rien de très surprenant : les lecteurs du blog savent que la non réponse est une habitude très ancrée dans cette équipe municipale, voire une de leurs rares politiques identifiables. Disposant du numéro de téléphone de l’élue, elle l’appelle pour savoir s’il est possible de disposer d’une salle pour cet événement. Précision importante, l’événement est organisé à coût zéro pour la commune : aucune subvention n’est demandée par l’association qui fait venir à ses frais des artistes professionnels reconnus. Réponse de l’élue sur le mode « déjà merci de ne pas m’appeler, ensuite, il y a un cadre de partenariat et vous pouvez louer la salle, et de toutes façons la salle sera fermée pendant toutes les vacances par souci d’économie » ! Je passe sur l’amabilité de la réponse pour revenir sur deux points. Tout d’abord, le cadre de partenariat. Il me semble utile de rappeler que celui-ci ne s’applique en aucun cas puisque personne ne l’a signé. Pas la peine de le ressortir à chaque message, il n’est pas opposable, et l’argument est donc bidon ! Ensuite, sur la fermeture des salles, il est dit sur le site de la mairie que les salles sont fermées seulement une semaine sur deux. On apprend dans cet échange que la fermeture est en réalité prévue pour la totalité des vacances d’hiver. Quant au souci d’économie, il est lui aussi plus que discutable. Chauffer une salle autour de 18°, pendant 3 heures, ne présente pas un gros investissement financier, désolé. Ce, d’autant que la base servant au calcul des impôts fonciers a beaucoup augmenté dans le département. Dès lors, même si le taux d’imposition communal est resté le même, le montant des recettes communales a sensiblement augmenté. On retrouve ce point dans le budget, l’autofinancement ayant donc largement bénéficié de cette augmentation. Je pense donc que l’argument d’économie cache en fait et surtout une volonté de ne pas faire, de ne pas bouger, et une certaine forme de « j'en ai rien à faire » ! Reste à comprendre la motivation de cette attitude, que je pense être double. Tout d’abord, nous avons affaire à une équipe municipale sans idée directrice majeur, et intellectuellement refermée sur elle-même. Tout ce qui ne vient pas de cette équipe lui est donc suspect. Deuxièmement, je pense que l’équipe actuelle n’a pas réalisé ce qu’implique un mandat municipal. Elle a été très critique des élus précédents mais maintenant qu’elle est aux affaires, elle est dépassée par l’ampleur de la tâche. Un élu a « planté » un syndicat intercommunal mis sous tutelle, plusieurs élus ne viennent plus aux conseils municipaux, et il se dit que le nombre de commissions est en chute libre… Or, défaire ce qui a été fait c’est assez facile, mais reconstruire c’est difficile ! Surtout lorsque l’on fonctionne comme on le voit au travers de ces nouveaux exemples, en mode « rien à cirer »…


Crédit illustration :

AOC, analyse opinion, critique. Juillet 2018.
https://aoc.media/analyse/2018/07/02/promesses-electorales-nengagent-ecoutent