dimanche 3 septembre 2023

À PROPOS DE SOUTIEN SCOLAIRE...

Un des lecteurs du blog m’a récemment signalé que la municipalité avait décidé de « souscrire » au site « Prof’express » pour permettre aux jeunes Forgeois de bénéficier d’un soutien scolaire. Dans le principe, l’initiative est louable, mais elle risque néanmoins de manquer en partie sa cible…

Prof’express (1) propose une aide à la compréhension des matières enseignées, essentiellement en collèges et lycées. Ainsi, selon leur site, je cite : « originellement proposée en mathématiques, français et anglais, cette aide aux devoirs en ligne s’est ensuite étendue aux sciences physiques, à la chimie et la SVT, à la philosophie ainsi qu’à l'histoire et géographie. Les langues étrangères ne sont pas en reste : l'allemand, l'espagnol l'italien font désormais l'objet d'un soutien scolaire en ligne à la demande ». Le processus fonctionne au moyen d’une plate-forme internet et/ou via le téléphone. Je cite de nouveau la présentation faite par Prof Express : « les familles bénéficiaires peuvent solliciter l'aide d'un enseignant en ligne entre 17:00 et 20:00 tous les jours sauf le vendredi. Durant cette session, le professeur sait être à l'écoute de l'élève pour le rassurer, prendre en compte sa requête et l'aider à trouver lui-même la solution. Cet échange par téléphone, chat ainsi que par classe virtuelle permet de réussir un examen, gagner des points dans un exercice à rendre, un exposé à préparer, etc. ».

Que l’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit : cette initiative est bien entendu potentiellement porteuse d’une aide appréciable pour les jeunes de notre commune. Elle peut sans aucun doute aider nos collégiens et lycéens à mieux comprendre un sujet qui leur aurait échappé. Je suis en revanche moins preneur de l’objectif de « gagner des points dans un exercice à rendre », tout simplement parce qu’il me semble que c’est regarder le soutien scolaire par le petit bout de la lorgnette, et d’une façon simplement utilitariste. Il est vrai qu’à un moment où le bac se joue en grande partie sur le contrôle continu, quelques points de ci, de là, peuvent être bons à gratter. Les profs en savent quelque chose, tant ils sont soumis depuis ces réformes aux pressions parentales et à celles des élèves lorsque les notes des interrogations sont jugées trop faibles (2,3).

Cette vision utilitariste est une des raisons qui, à mon sens, font que ce type de soutien scolaire, bien qu’intéressant, pourrait dans plusieurs cas largement manquer sa cible. Je m’explique, sur le fondement de mon expérience dans le domaine (2 ans de soutien scolaire fourni lors de mes études à la fac, 3 ans avec l’association « Coup de Pouce 91 », sciemment entravée dans son fonctionnement par l’actuelle municipalité, soit dit en passant). Un enfant en difficulté peut l’être sur un point particulier, ou sur une matière particulière. Dans ce cas, un « simple soutien scolaire » pourrait effectivement être profitable. Si la faiblesse est plus générale, il devient important d’en détecter les causes. Certaines peuvent relever d’un trouble de l’attention, de la concentration, ou de problèmes de type dysorthographie, dyscalculie, donc globalement de troubles dits « dys », susceptibles de rendre plus difficile l’apprentissage (4). Parfois c’est très évident, même pour un non professionnel comme l’auteur de ce billet. Parfois, c’est plus compliqué à déceler, et dans ce cas, le simple soutien scolaire par internet ou par téléphone ne suffira surement pas. Dans ce cas même, le soutien scolaire pourrait s’avérer contre-productive car elle risque de renforcer le sentiment d’échec systématique auquel se retrouve confronté l’élève. L’aide d’éducateurs spécialisés, de psychologues, d’orthophonistes, bref de professionnels aguerris est alors nécessaire pour y voir plus clair. Enfin, dans certains cas,  l’élève peut certes avoir des difficultés, mais celles-ci sont en réalité plus systémiques. La fratrie, ses parents, voire ses camarades de classe peuvent constituer des éléments explicatifs (je ne parle pas de responsabilité ici) d’une partie parfois non négligeable des difficultés d’apprentissage. Il est évident que dans ce cas, l’aide proposée via une plate-forme internet ou par téléphone ne résoudra rien.

C’est pour cela que je trouve franchement lamentable l’absence totale d’efforts de l’actuelle municipalité pour soutenir les associations locales qui étaient à même de déceler ses troubles et d’y remédier au moins en partie. C’est le moins que l’on puisse dire, et c’est d’autant plus stupide que l’accès à la plate-forme, s’il est gratuit pour les élèves en difficultés et leur parents, est payé finalement par ceux-ci via leurs impôts dits locaux. Ce montant n’est en effet pas nul, j’en suis sûr, pour la commune, alors qu’il l’était pour l’aide fournie par les associations, même si la mairie tentait de faire pleurer dans les chaumières arguant d’un pseudo coût élevé de prêt des salles municipales… Un grand classique dans notre commune !


Références :

1. Prof’express.
Consultable en ligne :
https://www.profexpress.com/

2. Amandine Hirou. Bac 2022 : avec le contrôle continu, des profs sous la pression accrue des parents. L’Express. Septembre 2021.

3.Pauline Larrour. Être enseignant, c’est subir un peu plus la pression chaque jour sans protection aucune. Marianne. Février 2022.
Consultable en ligne :
https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/etre-enseignant-cest-subir-un-peu-plus-la-pression-chaque-jour-sans-protection-aucune

4. Les troubles « Dys » ou troubles spécifiques du langage et des apprentissages.
Consultable en ligne :
https://www.ffdys.com/troubles-dys

 

Crédit illustration :

Dessin de Deligne pour « La Croix ».

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