Les lecteurs du blog l'auront noté, celui-ci s'est fait quelque peu silencieux au cours des derniers jours. La raison principale est d'ordre technique, et liée à l'arrivée à mon domicile de la fibre optique, comme moyen de connexion au réseau Internet. Or, depuis cette installation il y a quelques semaines, les problèmes se multiplient jusqu'à devenir aujourd'hui quasiment kafkaïens.
Mon domicile a donc été raccordé à la fibre voilà un mois et demi environ. Mon fournisseur d'accès est Orange, via l'offre de services proposée par Sosh. Dès le début, des problèmes sont apparus. Le premier s'est produit le jour même de l'installation, puisque le boîtier numérique de connexion refusait de se connecter au réseau. Après deux ou trois communications avec les « conseillers techniques », l'un d'entre eux, plus malin que les autres, s'est aperçu que les codes de connexion qui m'avait été indiqués étaient erronés ! Le domicile s'est donc retrouvé connecté le lendemain de l'installation.
Tout a ensuite fonctionné normalement pendant une dizaine de jours. Puis des déconnexions de courte durée (10 à 60 secondes) sont apparues, tout d'abord de façon très épisodique, puis de façon récurrente avec en moyenne une coupure toutes les cinq minutes. Une discussion avec l'assistance technique s'avère décevante, puisque cette dernière m'affirme que tout fonctionne normalement et que la ligne ne devrait pas poser de problème. De mon côté, j'avais pris la précaution d'arrêter puis de relancer le boîtier « Livebox ». Comme cela était resté sans effet, j'avais également procédé à une réinitialisation logicielle. J'aurais soufflé dans le boîtier que cela n'aurait pas été plus efficace ! Je rappelle donc de nouveau l'assistance technique pour expliquer la situation et celle-ci détecte cette fois un « problème sur la ligne ». Impossible de savoir lequel malgré mon insistance auprès de l'opérateur, qui m'assure cependant que Orange/Sosh allait procéder à des modifications susceptibles de ralentir le trafic sur mon installation, mais à même d'améliorer la question des micro-coupures quelques jours plus tard.
Après ces quelques jours, et comme les micro-coupures devenaient de plus en plus fréquentes, en dépit de ce qui m'a été annoncé, je rappelle l'assistance en expliquant que le problème est de deux ordres : des micro-coupures sur la ligne elle-même, et un dysfonctionnement du wi-fi au départ du boîtier « Livebox ». Après discussion avec un ami spécialiste de la question, celui-ci m'indique que les problèmes liés wi-fi sont de plus en plus fréquents, peut-être en raison des interférences entre les différents boîtiers du voisinage. La dernière version du boîtier « Livebox » fait d'ailleurs l'objet de fortes critiques en regard des connexions wi-fi qu'il autorise. Le fournisseur d'accès Orange/Sosh met d'ailleurs, si besoin, à disposition de ses abonnés des répétiteurs wi-fi...
Depuis 4 à 5 jours, la situation semblait s'être néanmoins quelque peu améliorée, avec une ou deux coupures par jour. Puis patatras ! Depuis hier c'est tout le réseau fibre qui est en panne. J'appelle donc l'assistance technique qui m'affirme tout d'abord que la ligne fonctionne normalement, mais qui quelques minutes plus tard, devant les explications que je fournis et les retours d'autres clients, me confirme qu'effectivement un problème sérieux semble s'être produit sur le réseau. Je ne suis en effet pas le seul à être affecté. Plusieurs voisins, tous clients Orange ou Sosh, sont également privés de connexion Internet et donc aussi de téléphonie fixe. La panne est collective. L'assistance technique, très aimable, soit dit au passage, promet de me rappeler ce jour, ce qu'elle fait d'ailleurs à l'heure dite, pour me proposer des solutions de secours. La panne ne sera en effet pas réparée avant au mieux le 31 mai (sic !), soit dans 11 jours, mais sans garantie sur cette date. Mon téléphone fixe est rebasculé gracieusement sur ma ligne portable, et l'opératrice me propose toujours aimablement de me fournir 200 Go gratuits sur mon téléphone portable. Problème n°1 : mon forfait portable n'est pas souscrit auprès d'Orange/Sosh. Dans ces conditions, mon fournisseur d'accès ne peut rien. Je demande donc à l'opérateur de me fournir un boîtier 4G pour la connexion. Problème n°2 : pas possible. Explication : cette option n'est offerte qu'à certains titulaires de contrats « Orange ». Je demande donc ensuite de résilier mon abonnement fibre, pour revenir à l'abonnement ADSL, donc via le réseau « cuivre », qui fonctionnait sans doute plus lentement mais de façon beaucoup plus robuste. Problème n°3 : pas possible non plus. Explication : à partir du moment où le domicile est relié par fibre au réseau, le retour en arrière vers l'ADSL cuivre n'est plus possible. J'ai beau argumenter sur le fait que le domicile n'est plus, de fait, relié au réseau par la fibre, rien n'y fait ! Si je voulais caricaturer la situation, je dirais que pour Orange/Sosh, l'important est qu'il y ait une fibre tirée entre votre maison et l'équivalent d'un sous-répartiteur, mais que celle-ci soit fonctionnelle ou pas n'a aucune importance ! Kafkaïen, je disais ! Il me reste alors deux options. La première est de résilier le contrat Orange/Sosh et de trouver un nouvel opérateur ; la seconde, que j'ai mise en œuvre après avoir insisté avec l'assistance technique pour une prise en charge sous forme de geste commercial, est de me retourner vers mon opérateur de téléphonie mobile pour souscrire un forfait « 100 Giga » et d'utiliser mon téléphone portable comme routeur 4G, via le partage connexion.
Renseignements pris auprès de voisins vigilants connaissant bien mieux que moi le fonctionnement des réseaux, il semblerait que la panne puisse être liée, sans certitude aucune cependant, à l'intervention de prestataires d'autres compagnies dans les armoires de connexion. Si tel est le cas, notre problème ne serait pas isolé. Des cas semblables se sont multipliés au cours des derniers mois, à tel point que Madame Laure de la Raudière, présidente de l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep), s'en est très récemment inquiété, affirmant que l'on « constate aussi que les raccordements ne se passent pas bien. Il y a 20 à 30 % des raccordements qui sont en échec […] il y a des défauts de qualité et c’est tout à fait inacceptable ».
Cette affirmation est importante, d'autant qu'il semble que l'autorité de régulation n'en soit pas restée à ce seul constat. Ainsi, parmi les comportements inacceptables cités par Madame de la Raudière, la façon de procéder de certains des prestataires chargés de raccorder les particuliers au réseau est plus que questionnable. En effet, faute de pouvoir à joindre un interlocuteur chez l'opérateur, certains techniciens de raccordement « débranchent un client pour prendre sa place ». De même, certains de ses techniciens n'hésitent pas à « défoncer les portes d'armoires de connexion pour pouvoir y accéder ». La présidente de l'Arcep conclut d'ailleurs en indiquant que « Malheureusement, ce ne sont pas des pratiques isolées ». Derrière ces pratiques, disons le mot, de voyous, émerge la question de la sous-traitance. Les raccordements aux réseaux ne sont en effet pas effectués par les fournisseurs d'accès mais par des entreprises prestataires qui, elles-mêmes, sous-traitent à d'autres les travaux à effectuer. Une enquête du Monde indiquait qu'il pouvait y avoir jusqu'à 8 niveaux de sous-traitance, les derniers des derniers ne gagnant presque pas d'argent, et se payant en sabotant (littéralement) le travail, surtout le travail des autres. Un des sous-traitants d'Orange est d'ailleurs dans le viseur de la justice... En lien, Madame Marie-Pierre Rixain, députée de notre circonscription, a présenté l'année passée un projet de loi visant « à responsabiliser les opérateurs chargés du déploiement de la fibre ». Elle proposait, entre autres, d’obliger les techniciens « à détenir une certification délivrée par l’autorité compétente » pour pouvoir intervenir. À dire vrai, ceci me semblerait le minimum. Je m'étonne même qu'il ait été nécessaire de l'imposer ! Et toujours pour dire vrai, il me semblerait beaucoup plus important d'interdire la constitution de ces poupées-gigognes de sous-traitants et de limiter à un seul niveau cette activité de sous-traitance quitte à ce que l'entreprise donneuse d'ordre, c'est-à-dire le fournisseur d'accès, utilise plusieurs sous-traitants selon, par exemple, les secteurs géographiques, ou ses besoins.
L'accès à Internet n'est en effet, de nos jours, plus un luxe mais une nécessité. Nous n'avons d'ailleurs pas, collectivement, réalisé tous les impacts associés à la numérisation à marche forcée de notre société. Certes nous entendons parler de la fracture numérique, mais qu'en est-il de la dématérialisation totale des factures, des bulletins de salaire, et autres pièces administratives que nous conservions jusqu'à présent au format papier et qui nous sont maintenant systématiquement proposés au format numérique ? Nos concitoyens sont-ils parfaitement formés aux stratégies de préservation des données numériques ? Et la technique permettra-t-elle dans 30 ou 40 ans de lire le format des documents que nous conservons aujourd'hui en vue d'un éventuel usage ultérieur ? Je n'en suis pas certain.
Enfin un mot pour dire que nombre de systèmes de sécurité requièrent la présence d'un boîtier Internet et d'une ligne téléphonique fonctionnelle. Je pense à certaines des alarmes de télésurveillance des domiciles, mais également à certains des systèmes d'appel d'urgence mise à disposition de nos anciens en cas de problème de santé. Là aussi, il me semble que des dispositions réglementaires visant à obliger les fournisseurs d'accès à une continuité de service devrait être mises en place et surtout appliquées rapidement.
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