lundi 30 décembre 2024

MAUVAISE ANNÉE POUR LA DÉMOCRATIE !

 


Oui, mauvaise année pour la démocratie et aussi, malheureusement, pour nos démocraties… Un petit tour d’horizon que je n’espère pas trop déprimant pour finir cette année et commencer la suivante.

Il y a eu tellement de mauvaises nouvelles en 2024 que je ne sais plus par où commencer. Aussi je me propose de sérier les questions du niveau le plus lointain au niveau le plus proche. Commençons par les conflits armés, tant ceux-ci sont présents dans les actualités. En Ukraine, la situation est toujours aussi meurtrière, avec selon les chiffres obtenus de différentes sources, plus d’1 250 000 personnes qui auraient été tuées ou blessées. Parmi celles-ci, 300 000 soldats (225 000 Russes et 75 000 Ukrainiens) tués depuis 2022 et 800 000 blessés (400 000 Russes et autant d’Ukrainiens). On peut ajouter à cela les quelques 50 000 civils qui ont été tués, blessés, déportés ou qui ont disparu du coté ukrainien pour l’écrasante majorité… Tout cela résultant de la folie d’un dictateur, M. Vladimir Putin en l’occurrence, qui n’admet pas le souhait des Ukrainiens de s’éloigner de la zone d’influence russe. Une étape cruciale a été la destitution, constitutionnelle pourtant, du président ukrainien qui était très favorable à la Russie, en 2014, par le parlement. Pour les lecteurs qui s’intéressent à la genèse du conflit, de l’Euromaïdan à la situation de ce jour, via l’annexion de la Crimée et du Dombass, les pages Wikipédia qui s’y rapportent sont remarquables et proches de ce que l’on peut lire dans les ouvrages de références (voir par exemple 1,2). Une des raisons de s’inquiéter est l’internationalisation du conflit. D’un côté, la Russie est clairement aidée par l’Iran, par la Corée du Nord qui fournit maintenant des contingents, et probablement discrètement par la Chine, qui fournit de l’électronique permettant à la Russie de contourner en partie les blocus de matériel imposés en représailles. De l’autre côté, le monde occidental ne peut plus laisser M. Vladimir Putin menacer le territoire européen, l‘Ukraine aujourd’hui, et possiblement les Etats Baltes plus tard. Nous livrons donc des quantités massives d’armement, avec, pour le moment, aucune participation de troupes de l’OTAN, à l’exception possible de formateurs militaires. Seule raison d’espérer, l’épuisement des belligérants pourrait conduire à un cessez le feu, et possiblement une « mauvaise paix » dans cette région du monde. Question démocratie, puisque c’est le sujet de cet article, nous avons là, avec « l’union » Russie, Iran, Corée du Nord et Chine, quatre pays tenus par une belle brochette de pouvoirs autoritaires. Or en Europe, plusieurs dirigeants de pays où des coalitions d’extrême-droite sont au pouvoir, se comportent finalement en alliés objectifs de la Russie, M. Viktor Orban en Hongrie et M. Robert Fico, en Slovaquie en tête. La montée de l’extrême-droite en Autriche, en Allemagne et en Flandres, voire en France, avec leur dirigeants pro-russes, constitue donc un risque gravissime pour l’Union Européenne et pour nos démocraties, aussi imparfaites soient elles.

Autre conflit inquiétant, le Moyen Orient. La situation qui était déjà mauvaise, a rapidement dégénéré après l’attaque révoltante du Hamas sur des populations israéliennes civiles, sauvagement massacrées. Tout aussi révoltante a été l’action du gouvernement israélien, qui, sous couvert de défense du pays, un droit effectivement imprescriptible, a mené des opérations militaires qui ont conduit à d'autres séries de massacres de civils dans la bande de Gaza. Le bilan est catastrophique. Plus de 4 000 israéliens ont été tués, blessés ou déportés. Plus de 150 000 Gazaouis ont été tués ou blessés, très majoritairement des femmes et des enfants, et plus de deux millions ont été déportés sur le territoire, soit 90% de la population (3). Là aussi les pages Wikipédia sont riches d’informations (4). On constatera avec effroi que l’armée israélienne a répondu aux massacres des populations civiles israéliennes par le Hamas par des massacres de populations gazaouis d’une magnitude sans commune mesure. Des hôpitaux ont été visés comme des usines de production électrique, des écoles, et mêmes de crèches... À tel point que des juristes, plusieurs pays, des ONG, soupçonnent Israël de commettre un génocide à Gaza, et d’avoir cumulé crimes de guerre et crimes contre l’Humanité. Une Commission d'enquête de l'ONU accuse aussi Israël de ces mêmes « crimes de guerre et crimes contre l’humanité », et, logiquement, elle accuse également le Hamas de « crimes de guerre » commis en Israël. La Cour Pénale Internationale a délivré également un mandat d’arrêt contre le premier ministre israélien M. Benyamin Netanyahou et son ministre de la défense, M. Yoav Gallant, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés. Là aussi, trois membres du Hamas, Ms. Ismaël Haniyeh, Mohammed Deïf et Yahya Sinwar feront l’objet d’un autre mandat pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis sur le territoire d’Israël et de l’État de Palestine. Pour ces trois derniers, l’action sera sans aucun doute éteinte en raison de leurs morts, attribuées à Israël. 

En tentant de prendre du recul, outre le bilan catastrophique de ce conflit (et encore ai-je passé sous silence la situation au Liban), il me semble que nous n’avons pas réalisé que nos démocraties et au-delà l’idéal démocratique en sortent laminés. Deux raisons à cela. La première est qu’Israël se veut et se décrit comme un état démocratique. Mais peut-on vraiment dire cela d’un état qui ne respecte pas les résolutions de l’ONU, qui ne respecte pas le droit de ses minorités et dont les dirigeants font, à tout le moins, l’objet de suspicions de génocide, de crime de guerre et de crime contre l’Humanité ? Est-ce l’image que nous, peuples en théorie fidèles aux lumières, souhaitons donner de nos valeurs ? La seconde est liée à la première. Comment expliquer l’assourdissant silence de nos démocraties face à ce qui se passe en Israël et en Palestine, ou au Liban. Tout s’est passé, depuis plus d’un an, comme si nos démocraties occidentales regardaient ailleurs, sans réaliser que ce silence interroge sur ce « deux poids, deux mesures » qui différencie le traitement réservé à un état peu recommandable comme Israël, et celui réservé à un autre état aussi peu recommandable, la Russie ? Ce silence, mâtiné de quelques plus que timides froncements de sourcils, interroge aussi sur le consentement tacite de nos dirigeants vis-à-vis du génocide possiblement perpétré à Gaza. Plus grave, dans l’œil d’autres pays, d’autres citoyens du monde, il rend nos pays occidentaux et par conséquence nos démocraties possiblement complices des crimes commis en Palestine. J’exagère, direz-vous ? Alors, comment interpréter les déclarations de certains de nos ministres disant que M. Benjamin Netanyahou bénéficierait d’une « immunité » s’il se rendait sur le sol français… contrairement à toutes nos obligations de signataire des traités internationaux relatives aux cours de justice internationales.

Autre raison de s’inquiéter : l’élection de M. Donald Trump aux Etats-Unis. Dans ce cas particulier, la validité de l’élection n’est pas à remettre en cause contrairement d’ailleurs à ce qu’avait tenté de faire ce même personnage lors de sa défaite de 2020. Non, le risque pour la démocratie réside ici dans le recours à la collecte de données personnelles à des fins de ciblage politique, à la large diffusion de publicités mensongères, à la circulation de messages soutenant les théories du complot, bref aux mensonges. Cela pour permettre l’élection d’un individu poursuivi en justice et condamné pour trente-quatre chefs d’accusation dans l’affaire des falsifications comptables en lien avec les paiements secrets faits à une actrice pornographique*… Deuxième défaite de la démocratie : cette déliquescence résulte en grande partie du contrôle exercé sur les réseaux sociaux et de l’argent injecté par deux milliardaires que je qualifierais de déjantés. Bref, tout cela s’inscrit dans un contexte maintenant connu de vérité alternative, un concept qui fait que le vrai et le faux ont finalement la même valeur (5,6). Seul motif d’espérer, cette déchéance morale pourrait conduire à une situation de pourrissement interne des Etats-Unis qui affaiblirait complètement le pays, provoquant enfin un sursaut démocratique. J’avoue croire peu à cette perspective et espère aujourd’hui simplement que les Etats-Unis n’entraineront pas l’UE dans une longue et douloureuse chute. Pour cela, encore faudrait-il un réveil de l’UE et une remise en cause sérieuse de son alignement sur les Etats-Unis…

La situation intérieure française ne permet pas non plus d’espérer beaucoup pour notre démocratie. Je ne fais pas partie de ceux qui remettent en cause les résultats d’élections, ni le choix de notre président, M. Emmanuel Macron, de dissoudre l’assemblée. De même, je ne vois aucun motif constitutionnellement valide pour penser qu’il pourrait être destitué. En revanche, je suis très contrarié par le fait que ce même président n’ait pas respecté, non pas la Constitution, mais son esprit. Il a ainsi « joué la montre », en cachant derrière un faux semblant, ses choix politiquement discutables. Il a outrepassé ses prérogatives en arguant qu’il était guidé par une volonté de nommer quelqu’un qui pourrait éviter d’être censuré, alors que ce choix de censure - ou non - aurait dû être celui du Parlement, et pas celui de l’exécutif. Enfin, il a, à deux reprises, choisi de nommer un premier ministre issu de minorités parlementaires. Ces mêmes deux premiers ministres ont nommé des ministres également issus de ces groupes parlementaires minoritaires, qui tentent par tous les moyens d’appliquer la même politique délétère rejetée par une majorité de Français, si l’on agrège le NFP et le RN. L’agrégation est osée, j’en conviens, mais elle a néanmoins conduit à la censure du gouvernement de M. Michel Barnier et elle n'empêchera pas plus sans doute celle du gouvernement actuel. Une autre menace pour la démocratie française réside dans le poids de plus en plus lourd que pèse des milliardaires dans l’audiovisuel et les médias, à l’image de la situation aux USA ou au Royaume Uni. L’impact de cette mainmise se fait sentir dans les médias de masse tels Europe 1, C8 ou CNews appartenant au groupe Bolloré, où l’on n’hésite plus maintenant à tenir propos ouvertement racistes ou mensongers (7). Elle se fait aussi sentir dans les palais de la République où ces mêmes milliardaires murmurent à l’oreille de nos décideurs (8). Comment s’étonner ensuite des dénis de démocratie que je décris ci-dessus, qui conduiront inéluctablement à renforcer les scores du RN dans un amalgame entre « tous pourris », « à quoi cela sert de voter pour reprendre les mêmes », « on a tout essayé sauf l’extrême droite » ou « il nous faudrait une bonne dictature » …  

Le ton de cet article peut paraitre lourd en cette fin d’année, mais je ne vois pas de raison d’être particulièrement joyeux. Peut-être suis-je assez sensible à ces situations de conflit et de mensonge, car je suis totalement absent des réseaux dits sociaux, où la vérité alternative fait loi. Peut-être aussi parce que je traine derrière moi quelques 40 ans de recherche publique, au cours desquels j’ai toujours tenté, sur des sujets parfois délicats comme les dossiers OGM, et avec d’autres, de démêler le vrai du faux pour faire émerger non pas la vérité, ce serait présomptueux, mais un consensus étayé… Or comme je l’ai montré je le crains, nos sociétés dites démocratiques s’éloignent de plus en plus de cet idéal. Et même au plan loco-local, dans notre commune, les choses ne vont pas bien. Le vivre-ensemble personnifié par les associations ne s’est jamais aussi mal porté, le fonctionnement démocratique de la commune est à l’arrêt et la désinformation et le mensonge y ont aussi largement cour (9). Mais bonne année quand même !

* Note ajoutée le 31/12 : et condamné hier 30/12/24 au civil pour agression sexuelle !

 

Références

1. Guerre russo-ukrainienne. Wikipédia.
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_russo-ukrainienne

2. Révolution de la Dignité (Maïdan)
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_de_la_Dignit%C3%A9

3. Anonyme. À Gaza, deux millions de déplacés internes sont confinés sur 11 % du territoire. Le Courrier International. Aout 2024.

4. Guerre Israël-Hamas (depuis 2023)
Consultable en ligne :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_Isra%C3%ABl-Hamas_(depuis_2023)

5. Brian Myles. Le trumpisme en continu. Le devoir. Novembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.ledevoir.com/opinion/editoriaux/823360/editorial-presidentielle-americaine-trumpisme-continu?

6. Alexandra Schwartzbrod. Présidentielle américaine : la démocratie dans tous ses états. Libération. Novembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/presidentielle-americaine-la-democratie-dans-tous-ses-etats-20241104_FUBNNHIVG5EC5EVCJY2SVWE2LE/

7. Caroline Constant, Tom Demars-Granja, Honorine Letard. Quelle riposte à la bollorisation des médias ? L’Humanité. Septembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.humanite.fr/en-debat/arcom/quelle-riposte-a-la-bollorisation-des-medias

8. On lira avec intérêt l’enquête du « Nouvel Obs » d’Octobre 2024, à ce sujet. Une petite partie est consultable en ligne :
https://www.nouvelobs.com/politique/20241030.OBS95680/l-influent-bernard-arnault.html

9. On lira les articles de ce blog traitant regroupés sous l’onglet Forges les Bains dans la version web de ce site, ou que l’on peut trouver dans la version téléphone par exemple sous le titre « Les petits et gros mensonges de la municipalité ». Voir par exemple :
https://dessaux.blogspot.com/2024/06/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html
https://dessaux.blogspot.com/2024/09/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html
https://dessaux.blogspot.com/2024/11/les-petits-et-gros-mensonges-de-la.html

 

Crédit illustration :

Image du film éponyme, de et avec Jean Yanne.

 

lundi 2 décembre 2024

L’EXEMPLARITÉ DES ÉLUS : UN PROBLÈME À FORGES…


Il y a quatre ans déjà, j’écrivais un billet de blog intitulé « et l’exemplarité des élus alors » (1) ? Celui-ci s’inquiétait en pleine période COVID d’une certaine forme de légèreté vis-à-vis du respect des consignes de la part d’élus forgeois. Depuis, cette équipe municipale a montré à diverses reprises son peu d’intérêt pour le respect de textes réglementaires (2,3,4). Dernier exemple en date, une élue qui se moque totalement du code de la route…

Dans les problèmes évoqués dans les références ci-dessus, on peut signaler le non-respect du choix des dates de mariage dans la commune, le traitement différencié d’associations, les tentatives de récupération de matériel associatif au bénéfice de la commune, la non motivation du refus de prêt de salle municipale ou le recours à des justificatifs illégaux, ainsi que le non respect des dispositions gouvernant le fonctionnement du conseil municipal, rien que cela…

Le dernier avatar en date de cette regrettable - et assez minable série - est le non-respect du code de la route le plus élémentaire dans notre commune. En bref, samedi dernier, des membres de l’association Forges en Transition se rendent au centre socio-culturel du jeu de paume vers 9H25 pour trouver une voiture stationnée devant la grille d’entrée, juste en dessous de deux splendides panneaux « stationnement interdit ». Ce véhicule bloque donc en totalité l’accès et empêche les associatifs de décharger leur matériel, ce qui devra être fait par la petite grille d’entrée piéton. Plus grave, cette voiture gène l’accès du véhicule d'une personne handicapée qui doit se stationner dans la cour. Bref, un comportement de type « moi d’abord » assez caractérisé.

Après une dizaine de minutes, la voiture étant toujours stationnée au même endroit, je décide d’appeler la gendarmerie de Limours afin de les faire intervenir et dégager le véhicule. Je communique le numéro de plaque au gendarme de service qui me dit envoyer la patrouille pour voir ce qu’il est possible de faire. C’est à ce moment-là que la propriétaire se pointe, pour récupérer sa voiture. Je lui indique que j’ai prévenu la gendarmerie et n’obtient pour toute réponse qu’un « ha oui, la gendarmerie, de toutes façons toute la mairie est là », assez incompréhensible… Sauf que je reconnais alors une élue forgeoise de la majorité. Je lui signale que son véhicule gène fortement, bloquant en totalité l’accès au centre socio-culturel, et qu’il est garé sous deux panneaux de stationnement interdit… Réponse « je ne suis là que depuis deux minutes », ce qui est faux, le véhicule étant resté garé au moins 12 à 15 minutes. Je lui précise que des associatifs handicapés pourraient passer avec pour toute réponse un « mais oui, mais oui » énoncé sur un ton je-m’en-foutiste, et une élue qui remonte dans sa voiture, sans le moindre mot d’excuse bien entendu. Bref, l’attitude parfaite du beauf…

Je ne cesse de m’interroger sur ce comportement car il me semble caractéristique de l’équipe municipale actuelle, qui s'affranchit en certaines occasions du respect des règles, des normes et même des lois. En filigrane, derrière cela, il y a, me semble-t-il, un entre soi doublé d’un mépris incommensurable pour l’autre… Je n’en veux pour preuve que la récidive de la même élue, quelques minutes plus tard, qui laisse son véhicule stationné sur un passage clouté gênant là encore les piétons qui traversent devant la maison médicale, et qui perturbe le passage des autres automobilistes. J’ose quand même rappeler ici que les élus ont un rôle fondamental : celui de l’exemplarité. Mais pas à Forges, visiblement !

Références :


1. Et l'exemplarité des élus alors ? Ce blog. Décembre 2020.
Consultable en ligne :
https
://dessaux.blogspot.com/search?q=exemplarit%C3%A9


2. Quand la municipalité se fait taper sur les doigts par la préfecture ! Ce blog. Février 2022.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2022/02/quand-la-municipalite-se-fait-taper-sur.html

3. La mairie de Forges dans l'illégalité : suite et probablement pas fin... Ce blog. Décembre 2023.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2023/12/la-mairie-de-forges-dans-lillegalite.html

4. Forges : la mairie encore et encore dans l'illégalité. Ce blog. Janvier 2024.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2024/01/forges-la-mairie-encore-et-encore-dans.html








mercredi 20 novembre 2024

LES PETITS ET GROS MENSONGES DE LA MUNICIPALITÉ. CHAPITRE III.

Voici un nouveau volet de cette série dédiée au bilan de mi-mandat de l’équipe municipale avec cette fois un article destiné à démystifier un des gros bobards lu dans le journal : le soutien au développement économique et le soutien au commerce local.

Vu du Petit Forgeois, cela donne sur la page consacrée à ce sujet et à l’urbanisme, deux tiers de l’espace pour l’urbanisme, dont la moitié constituée de bla-bla et d’un inénarrable chapitre sur la vidéoprotection, et un tiers pour la partie consacrée au développement économique. Celle-ci se concentre sur le commerce local et les efforts soi-disant consentis pour l‘ouverture de la boulangerie tant attendue… Derrière cet autosatisfaction de façade, la réalité est tout autre comme je m’apprête à le démontrer.

Voyons tout d’abord les projets économiquement significatifs qui auraient pu se mettre en place dans notre commune et qui ont restés lettre morte ou qui ont été entravés. Le plus important d’entre eux est sans aucun doute la venue potentielle du conservatoire national des véhicules anciens (CNVA) qui souhaitait installer son centre de formation sur le site dont la ville de Paris est propriétaire. Ce site avait accueilli les migrants afghans de 2016 à 2018. Il s’agissait d’une opération réellement structurante pour notre commune, puis que le CNVA se proposait d’acheter tous les locaux pour y implanter son école, son atelier et son internat, tout en en mettant une partie à disposition des Forgeois pour leurs activités associatives ou professionnelles. Il s’agissait d’une opération qui avait été portée par notre équipe municipale entre 2018 et 2020, principalement à l’initiative de l’un de nos conseillers, M. Yannick Sellier pour ne pas le nommer. Ce projet avait été validé lors de la concertation citoyenne, par des personnes dont certaines sont, d’ailleurs actuellement, au conseil municipal ! Il aurait vu la création d’une trentaine, voire d’une cinquantaine d’emplois sur le site, permettant dès lors et de façon indirecte l’irrigation des commerces locaux : restaurants, bar, coiffeur, etc. Malheureusement, tout ceci est tombé à l’eau. Plusieurs raisons expliquent cela, mais clairement l’une d’entre elles est le manque total de soutien de l’actuelle équipe pour cette implantation. Un magnifique raté en l’espèce !

Autre raté d’importance, l’espace de coworking. Porté par l’association « L’Autre Bureau », que j’ai eu le plaisir de présider pendant deux ans, ce centre avait ouvert ses portes à l’étage de la salle polyvalente dans le cadre d’un partenariat avec la commune. Malgré l’épidémie de CoViD19, il accueillait une quinzaine de télétravailleurs et se développait au moment où celui-ci a dû fermer sur décision municipale. J’ai relaté dans quelques articles une partie des péripéties qui ont conduit à la fermeture de ce lieu, largement voulue par l’actuelle équipe (1,2,3,4). Pourtant, l’Autre Bureau était cité en exemple au PNR de la haute Vallée de Chevreuse, apprécié par la CCPL, car, comme je le disais, le projet « cochait toutes les cases du développement durable, concept qui repose sur le triptyque environnement, économie, activité sociale ». Visiblement ces notions sont trop difficiles à comprendre pour l’actuelle municipalité qui a purement et simplement supprimé ces locaux de la liste des locaux associatifs, et donc, dans le même temps, fait disparaitre une quinzaine d’emplois de la commune… Voilà donc une des façons dont la mairie soutient l’activité économique locale, bien loin de ses racontars sur papier glacé.

À Forges, un de nos acteurs locaux est le golf qui voit passer des dizaines de personnes voire plus sur son site, certains jours. Le restaurant est également très apprécié et fréquenté. Aussi ai-je été surpris de lire dans le bilan que la municipalité « s’attachait à restaurer un dialogue de confiance avec les propriétaires ». J’en suis d’autant plus surpris que nous avons pu, au cours des années 2010 - 2020 maintenir un dialogue constant et cordial avec cette entreprise, même s’il n’a pas toujours débouché sur des projets concrets.

On doit aussi parler du soutien au commerce local, car cela vaut son pesant de cacahouètes ! Nous avions, rue de l’église, une petite superette qui proposait aussi de la restauration rapide, « Red Market » pour ne pas la nommer. Le commerce a dû fermer pour plusieurs raisons, l’une d’entre elles étant l’implantation de « food trucks » sur la place du marché, à 20 mètres de ce commerçant, proposant en partie les mêmes produits que lui plusieurs soirs par semaine, avec la bénédiction de la mairie… De même, le salon « Liloo Bien Être », implanté à Forges, s’est vu concurrencer par un commerçant ambulant sur le marché, proposant à 30 mètres de son échoppe les mêmes produits que lui ! La municipalité en la matière n’en était pas, à vrai dire, à son coup d’essai, puisqu’elle avait réalisé la même opération avec « le Goût d’Antan », établissement apprécie du marché forgeois, qu’elle avait mis en concurrence là aussi sur ce même marché avec un autre traiteur ! Le Goût d’Antan avait alors quitté la commune ; j’ai relaté cela plus en détail dans un précédent article de blog (5). Toujours sur le marché, le maraicher, l’un des premiers commerces à s’être installé et qui nous reste fidèle depuis des années, a eu maille à partir avec la commune : celle-ci lui a tout bonnement interdit de stationner son camion à proximité, l’obligeant à monter jusqu’à la place de l’église plusieurs fois par demi-journée pour assurer le réassort de ses produits. J’ai également cru comprendre que ce commerçant se trouvait confronté à des difficultés pour faire déplacer les voitures en stationnement abusif sur son site d’implantation le samedi matin… Tout ceci doit donc être la vision de la mairie de ce qu’est un bon soutien aux commerçants de la commune !

En vérité, ce soutien municipal défaillant, l’est aussi lorsque l’on considère l’absence de volonté d’impliquer les commerces de façon systématique dans les fêtes et animations locales. Lors de celles-ci, la mairie préfère faire venir encore et toujours des food-trucks extérieurs pour l’animation, comme c’est le cas lors de la fête des thermes ou de la Châtaigne. J’ai évoqué Red Market ; j’aurai pu aussi évoquer son prédécesseur, ainsi que le restaurant l’Arôme que nous impliquions assez régulièrement lors d’événements culturels communaux, ou pour l’organisation de réunion « de travail » entre élus ou avec des fournisseurs.

Enfin, comment ne pas discuter du cas de la boulangerie (6). Autant le dire tout de suite, car je pense que l’actuelle municipalité ne s’en vantera pas, le commerçant repreneur avait été contacté par notre équipe municipale fin 2019, début 2020. Il s’agit de la boulangerie des six moulins de Bullion. Certes, cette remise en service a été retardée par l’épidémie de CoViD19 et par des travaux complémentaires sur un bâti très fatigué. Mais quand même, quatre ans… Selon mes retours d’information, il semblerait que l’actuelle municipalité n’ait pas été très proactive dans l’avancée du dossier, et c’est un euphémisme... De ce que je sais, et ai pu confirmer, elle a même été jusqu'à contacter un autre boulanger de la région pour concurrencer le projet de réouverture des six moulins… Soutien, vous avez dit soutien ? Ou foutage de gueule ?

Voilà donc un petit tour d’horizon rapide de la réalité de l’appui aux commerces locaux et à l’activité économique… Le bilan est catastrophique : une cinquantaine d’emplois perdus sur la commune a minima, un projet d'établissement structurant abandonné, des commerces dépourvus de soutien communal, et comme à l’habitude, pour masquer tout cela, une communication dans le Petit Forgeois fausse, voire mensongère, au moins par omission… Bref, la routine !


Références :

1. Un certain mépris pour le monde associatif. Ce blog. Mai 2021.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2021/05/un-certain-mepris-pour-le-monde.html

2. Associations : quand la mairie se moque du monde (1)... Ce blog. Septembre 2022.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2022/09/asociations-quand-la-mairie-se-moque-du.html

3. Quand madame la maire dérape… Ce blog. Mars 2023.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2023/03/quand-madame-la-maire-derape.html

4. Forges Les Bains, commune en PLS. ? Ce blog. Mai 2023.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2023/05/forges-les-bains-commune-en-pls.html

5. Le goût d’Antan quitte le marché de Forges. Ce blog. Avril 2021.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/search?q=antan

6. Projets communaux. II. Vers une réouverture de la boulangerie ? Ce blog. Janvier 2021.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2021/01/projets-communaux-ii-vers-une.html



Crédit illustration : 

Illustration personnelle d'après un dessin d'AR.
Sa page :
https://dessin-humoristique.fr/illustrateur-dessinateur-humour




vendredi 15 novembre 2024

AU SUJET DES INONDATIONS À FORGES

Notre commune a été touchée voilà peu par des inondations importantes liées à des évènements pluviométriques majeurs. Je suis, bien entendu, profondément désolé pour les Forgeois qui ont du subir ces évènements, sans aucun doute traumatisants. Pendant quelques années, je me suis occupé de cette problématique, et je donne ici quelques pistes pour tout d’abord expliquer et tenter de limiter les impacts de tels évènements sur les biens et les personnes.

Dans notre commune, plusieurs secteurs sont soumis au risque inondation, en sachant qu’il s’agit le plus souvent de ruissellements et non pas de débordements de cours d’eau. Je liste ici les principaux secteurs affectés, d’autres pouvant l‘être de façon plus modérée. D’est en ouest, le premier secteur touché est celui des rues d’Adélaïau et de Launay, particulièrement autour de la ferme d’Adélaïau. L’origine du flux se trouve dans le bassin agricole des graviers situé au sud parcouru par le chemin rural (CR) n°10. Il se déverse de façon marquée rue d’Adélaïau pour rejoindre le cours du Petit Muce. Le second secteur affecté est le bas de la rue du jeu de paume, coté château de Pivot. Malgré les importants travaux réalisés, lors de fortes pluies, comme celles que nous avons connues voilà peu, le carrefour dit de Pivot peut voir s’accumuler de quelques centimètres à presque 40 cm d’eau entrainant la coupure de la RD 152. Il s’agit là aussi de volumes d’eau provenant principalement des champs de la côte de Pivot. Autre secteur touché, la rue du ruisseau avec des arrivées d’eau en provenance également de la zone agricole dite de la Vallée Maréchal et du Douaire. Plusieurs maisons ont été inondées y compris rue des sources, l’eau provenant du même secteur mais dans se dirigeant sur une autre pente. Ensuite nous trouvons le secteur de la rue du Général Leclerc. Normalement, ce secteur ne devrait plus subir de trop fortes arrivées d’eau car les bassins de rétention situés au golf ont été agrandis. Malheureusement, lors des derniers évènements pluvieux, un incident que je relaterai plus loin s’est produit qui aurait pu avoir des conséquences très graves. Ce secteur a donc à nouveau été inondé de façon sensible. Dernier secteur particulièrement touché, le bas du hameau de Malassis, au niveau de la rue de la gloriette et de la RD 988. Dans cas, il s’agit à la fois de ruissellement en provenance de la côte des morts et du bois du Cormier, et du débordement du ru de la Gloriette (aussi appelé ruisseau Blin ou Blain). Là également, les volumes d’eau sont importants d’autant que la pluviométrie a été exceptionnelle depuis 2 mois. Lors des deux derniers évènement pluvieux, ce sont 40 et 80 mm d’eau qui sont tombés en quelques heures, au plus en une demi-journée, soit l’équivalent d’un puis de deux mois de pluie pour la région parisienne. Le tout s’est produit sur des sols gorgés d’eau, avec des espaces agricoles et forestiers qui n’absorbent plus, avec les effets que l’on connait.

Diverses causes ont rendu les conséquences des pluies récentes plus marquées. La première a été une fissure apparue dans le bassin de rétention du golf qui a libéré une lame d’eau importante. Ceci aurait pu être bien plus volumineuse si le merlon avait complètement cédé. L’effet de la rupture a été la production d’un événement de type « vague » qui a parcouru une partie de la rue du Général Leclerc. Ce qui est inquiétant dans cette histoire est que la rupture partielle du bassin s’est produite sur la partie haute du merlon, indiquant qu’il a été soumis à une pression d’eau forte correspondant à un remplissage trop important, probablement au-delà des limites opérationnelles. De ce que je me rappelle, ce bassin capte à la fois les eaux en provenance du Petit Muce via un ouvrage écrêteur, mais aussi celles descendant de Chardonnet par la rue Saint Jean. Tel que conçu à l’origine, il alimente « à contre sens » le second bassin, qui se situe à son côté mais en direction du hameau du Parc. Or il se trouve que ce bassin est resté quasiment vide ces derniers temps, suggérant que la communication entre les deux ne fonctionne pas, ou pas de façon optimale. L’ouvrage est sous le contrôle du syndicat de l’Orge, depuis que le SIHA, précédemment gestionnaire a rejoint ce syndicat. Ce dernier ne peut cependant avoir l’œil partout, et lorsque nous étions élus, nous nous chargions d’alerter le syndicat sur les travaux à faire ou les dysfonctionnements constatés. J’ignore si l’équipe municipale en place assure ce rôle de surveillance, directement ou via les services techniques, mais j’avoue ne jamais avoir vu qui que ce soit sur ces bassins ou sur d’autres bassins de rétention. J’ajoute aussi que, malgré mes indications répétées en mairie concernant les bassins du pré au chevaux, la réaction municipale a été plus que très lente… Je reste donc dubitatif sur l’engagement communal en regard de la problématique eau de surface. Ceci est d’autant plus navrant que lorsque nous étions élus, des membres proches de cette équipe avaient pollué les réseaux sociaux autour de la soi-disant inaction de notre équipe. J’en rigolerais doucement si la sécurité des biens et des personnes n’était pas menacée dans ce dossier.

 

La problématique de l’eau est en réalité très complexe. Ainsi, de nombreux intervenants qui ne connaissent pas forcément le territoire, sont parties prenantes. Je pense en particulier à certains services de l’Etat qui réagissent strictement selon les textes de lois, sans se rendre compte que, parfois, le mieux est l’ennemi du bien. Il serait en effet bon de laisser un peu plus d’autonomie aux acteurs de terrain, pour autant – et je le soulignais plus haut - que ceux-ci souhaitent d’impliquer. Par ailleurs, les jeux d’acteurs locaux peuvent ne pas simplifier la donne. J’avais ainsi proposé d’approfondir légèrement un des bassins de rétention de la commune, celui de la rue Alice Millat, au motif que lors d’événements très intenses, celui-ci était plein à ras bord, puis débordait sur la route. Des proches de l’actuelle équipe municipale m’avaient alors menacé - avaient menacé la commune devrais-je plutôt écrire - de poursuites en justice administrative si une modification du bassin était effectuée. Pourtant celle-ci n’aurait pas changé la nature de la zone humide, ni dans 99% des cas, pas modifié la façon dont les eaux étaient interceptées puis rendues au milieu naturel, mais cela aurait empêché tous les débordements liés aux évènements de fortes intensités… De même, nous avions pensé créer des fossés à redents comme celui implémenté le long de la descente de Pivot, à deux endroits de la commune, pour limiter la vitesse d’écoulement des eaux dans ces secteurs pentus. Là aussi, ces projets ont été rendus impossibles par des actions sur les réseaux sociaux, soit d’opposants politiques, soit de personnes défendant des intérêts particuliers et non pas l’intérêt général… Et à Forges, dans ce dossier et depuis 4 ans, il ne s’est rien passé !

Enfin, la multiplicité des acteurs peut dans certains faire que, paradoxalement, personne ne fait rien. C’est le cas du ru de la Gloriette dans le secteur de Malassis, qui, à l’époque où j’étais élu, ne figurait pas dans la liste des cours d’eau gérés par le SIHA. De par ses statuts, ce syndicat s’occupait en effet de la Prédecelle et de ses affluents. Or la Gloriette est un affluent de la Rémarde. Ce ru devait donc a priori être géré par le syndicat en charge de la Rémarde amont sauf que… Sauf que ce syndicat ne s’occupait pas du ru dans le secteur Limours / Forges, ces deux communes étant non membres du syndicat car situées dans l’Essonne, et pas dans les Yvelines où la Gloriette rejoint la Rémarde ! Kafkaien ! J’avais alors contacté des élus de Pecqueuse et de Limours pour qu’ils prennent en charge l’entretien du ru de la Gloriette dans sa partie haute. J’avais également contacté l’UTD91 en charge de l’entretien des routes départementales pour l’entretien des fossés situés le long de la RD 988, sans autre succès qu’une écoute polie mais totalement inefficace. Le problème de ruissellement concernant Forges, certains dans ces services et communes voisines devaient se dire qu’après eux, le déluge… pour Forges ! Un poil énervé par la passivité ambiante, j’avais alors demandé aux services techniques de notre commune d’intervenir sous ma responsabilité sur le ru de la Gloriette et sur le fossé le long de la départementale pour un nettoyage en profondeur, ce qui avait réglé les problèmes pendant des mois, voire des années. Je ne sais pas où en est la résolution de ce problème aujourd’hui ; je ne sais même pas si dans son habituel dilettantisme, l’actuelle municipalité s’en est jusque-là soucié. Les riverains pourront lui poser la question, à l’occasion…

D’une façon plus générale que pouvons-nous faire ? Plusieurs réponses ici, à différents niveaux, aucune n’étant suffisante où pleinement satisfaisante. Tout d’abord il est certain que pendant des années les communes ont autorisé des constructions dans les lits majeurs de certains cours d’eau. À Forges, comme je l’explique dans cet article, notre problématique est plutôt celle des ruissellements. Pour faire face à ceux-ci nous avons imposé le captage des eaux et la ré-infiltration à la parcelle. Nous avons aussi envisagé dans un futur PLU d’interdire systématiquement la création de sous-sols et d’installer les bâtis sur des promontoires situés à 30/40 cm au-dessus du niveau de référence du sol voisin . En intercommunalité, ou avec les aménageurs, nous avons créé plusieurs bassins de rétention. Nous avons aussi, au niveau communal, amélioré la captation des eaux de pluie par la création d’avaloirs de grandes dimensions. Par ailleurs, je ne saurais trop recommander à certains particuliers habitant des logements à risque de s’équiper eux-mêmes de barrière anti-inondation. Certaines sont disponibles à des prix très raisonnables et elles seraient sans aucun doute très efficaces, particulièrement en regard de la problématique forgeoise. Tout cela ne suffira pas cependant tant que nous et nos politiques n’auront pas pris la mesure des changements globaux en cours, de la nécessaire transition environnementale. Celle-ci implique sans aucun doute un changement majeur de société, à l’heure où il est désolant de voir l’inaction de nos dirigeants dont certains vont jusqu’à nier l’existence même d’une urgence climatique.



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Documents personnels :
- Les zones de ruissellements majeurs
- Fissure sur le bassin du golf


mercredi 13 novembre 2024

ANTICOR RETROUVE SON AGRÉMENT... ENFIN !

Un court billet pour une excellente nouvelle. Le texte ci-dessous est en grande partie un copié collé du message reçu de la présidence d'Anticor. Après plus d'un an de lutte et de multiples recours devant la justice, Anticor retrouve enfin son agrément anticorruption. Cette arme citoyenne lui permet de saisir un juge d'instruction indépendant lorsqu'un dossier politico-financier est classé sans suite. Cette arme citoyenne lui permet de se constituer partie civile et de porter la voix des citoyens, premières victimes de la corruption, dans les prétoires.

« Nous n'avons jamais cessé d'y croire. Il aura fallu des jours d’attente et 8 procédures en justice, dont la dernière décision, en date du 4 septembre, ordonnait au Premier ministre démissionnaire d'examiner la demande d'agrément d'Anticor dans un délai de 24 heures sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l’expiration de ce délai. C'est un immense soulagement, mais également une reconnaissance. Car Anticor l'a toujours répété : l'association respecte et a toujours respecté les conditions d'octroi de l'agrément anticorruption. Et cette victoire, nous voulons la partager avec vous. Car c'est la ténacité et l'engagement des 7000 membres de l'association qui ont permis à Anticor de triompher après plus d'un an de lutte.

Le 5 septembre 2024, après une bataille homérique, le précédent Premier ministre a rendu à Anticor un agrément que notre association n’aurait dû ni perdre, ni quémander pendant 488 jours. Il y a été contraint par rien moins que deux décisions du juge des référés du tribunal administratif de Paris des 9 août et 4 septembre 2024.

Cet épisode a été désastreux pour la crédibilité gouvernementale, en particulier celle du Secrétariat général du gouvernement pourtant composé de membres éminents du Conseil d’Etat, tant les arguments les plus idiots – il n’y a pas d’autre mot – ont été employés pour tenter de justifier l’injustifiable, en dernier lieu celui selon lequel il n’appartenait pas au gouvernement démissionnaire de statuer sur l’agrément. Le précédent Premier ministre a eu le tort de politiser la procédure de délivrance de l’agrément, qui est en réalité purement administrative et technique ; elle consiste à vérifier si les cinq conditions légales sont ou non remplies par l’association qui demande l’agrément. Et elles le sont de toute évidence.

C’est d’ailleurs pourquoi l’agrément du 5 septembre 2024 ne comporte aucune réserve dans sa motivation, contrairement à celui « bien mal écrit » délivré le 2 avril 2021 par le Premier ministre de l’époque. S’il peut toujours être contesté dans un délai de deux mois à compter de sa publication au Journal officiel du 6 septembre, on ne voit guère de prise à une annulation éventuelle par le juge administratif.

Pour les trois prochaines années donc, Anticor s’appuiera sur le puissant levier citoyen de l’agrément comme elle l’a toujours fait depuis 2015 : dans l’objectif de réaliser notre objet social avec responsabilité, discernement et mesure, dans le respect des personnes comme de la présomption d’innocence. Anticor n’est pas, n’a jamais été et ne pourra jamais être un «
procureur de droit privé ».

Cette immense victoire pour Anticor a par ailleurs coûté… 0 euro à notre association. L’Etat a, en effet, été condamné à nous verser, pour les deux référés, une somme totale de 3 000 euros (le versement a été effectué les 12 et 13 septembre), ce qui couvre exactement les frais de notre avocat et ceux engagés par le président pour participer aux audiences – au passage, les frais du président sont mis en ligne en temps réel sur le site de l’association et peuvent être consultés en suivant ce lien (1).

Mais si la procédure a coûté 0 euro à l'association, elle a cependant coûté du temps et de l'énergie à ses bénévoles. Autant de temps et d'énergie qui n'ont pas pu être investis au profit des nombreux lanceurs d'alerte qu'Anticor accompagne au quotidien
».

Pour information, Anticor est aujourd'hui impliquée dans plus de 160 procédures dont l'attribution du Mondial de football au Qatar, l'enquête pour prise illégale d'intérêts visant le secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler, proche d'Emmanuel Macron, ou celle de la cession de la branche énergie d'Alstom à General Electric.

« La
« pyramide de Ponzi » des illégalités commises par les trois derniers gouvernements successifs à notre égard s’est donc désormais largement écroulée. Pour autant, nos combats autour de l’agrément sont loin d’être terminés, car il reste encore quatre procédures en cours : une devant le Conseil d’Etat sur l’agrément « bien mal écrit » par Jean Castex ; trois devant le tribunal administratif de Paris, relatives d’une part à l’agrément HATVP du 4 octobre 2022 contesté par deux personnes physiques, d’autre part au refus implicite d’agrément du 26 décembre 2023 de Mme Catherine Colonna et enfin la procédure au fond en excès de pouvoir contre le refus implicite du 26 juillet 2024 émanant de M. Gabriel Attal.

Sur chacune de ces procédures, Anticor se bat et se battra avec l’inépuisable énergie que lui donnent la confiance que ses 7 000 membres placent en elle, augmentée par l’autorité morale que confère à notre mission le rappel par l’ordonnance de référé du 9 août 2024 que «
la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile pour une association se proposant par ses statuts de lutter contre la corruption participe de l’objectif constitutionnel de lutte contre la fraude fiscale et participe de l’intérêt public qui s’attache à la lutte contre la grande délinquance économique et financière ».

Mais d’ores et déjà, le retour de l’agrément apporte une bouffée d’oxygène à Anticor, en ce qu’il nous permet de nous re-concentrer sur le cœur de notre objet social : la lutte pour un renforcement de la probité publique, dans et hors les prétoires, aux plans national et local
».

A l'heure où certains se font élire sur la base de mensonges, de l'échelle locale à l'échelle nationale et internationale, à l'heure où un ancien président, repris de justice vient donner son avis sur tout et rien sans honte, à l'heure où le président élu des Etats-Unis aura sans aucun doute échappé à la justice de son pays malgré la tentative de coup d'Etat qu'il a soutenue, un contre pouvoir citoyen tourné vers le respect du droit semble de plus en plus nécessaire...  


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Montage personnel sur base d'une photo de Nirot - Wikimedia - Licence Creative Commons






vendredi 11 octobre 2024

INVESTIR DANS LA RECHERCHE ET L'UNIVERSITÉ

Je reproduis ici le texte d'une lettre ouverte du collectif Rogue ESR, qui vient d'être publiée dans le journal « Le Monde ». Cette lettre se transforme maintenant en pétition. Il est question du financement de la recherche, qui risque de se trouver une nouvelle fois reléguée au niveau de  variable d'ajustement, dans un contexte de budget « d'austérité ». Or nous ne sommes aujourd'hui même plus à l'os en termes financiers pour l'université et la recherche. À ce jour, on en est au niveau ostéopénie, la prochaine étape étant l'ostéoporose... Le texte ci-dessous est entièrement reproduit de la pétition, que les lecteurs pourront signer s'ils le souhaitent (lien en bas de page).

Le rapport sur la compétitivité et l'avenir de l'Europe remis par Mario Draghi à la Commission européenne le 9 septembre a eu le grand mérite de remettre en cause le dogme de l'austérité budgétaire et de souligner l’importance de la recherche, de l’innovation et de la formation pour juguler le décrochage économique, scientifique et technique de l’Europe et retrouver des perspectives florissantes. Pour autant, si ce rapport propose avec raison d’investir dans la formation, la santé, l’isolation thermique des bâtiments, les énergies décarbonées ou les grandes infrastructures de transports, il demeure attaché à une conception de la recherche et de l’Université frappée d’obsolescence, fondée sur la croyance économiciste en un marché total des chercheurs et des établissements.

Dans notre contexte de longue dépression économique, couplée aux crises climatique, démocratique, sanitaire et sociale, il importe de tirer le bilan des politiques publiques suivies en France depuis 20 ans en matière de formation et de recherche fondamentale et appliquée. Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) est une niche fiscale qui permet aux entreprises de déduire de leur impôt sur les sociétés 30% de dépenses qu’elles font apparaître dans leur bilan comme procédant de “recherche et développement” (R&D). En l’absence de contrôles sérieux et « critériés », de multiples officines se sont spécialisées dans le maquillage de dépenses génériques en R&D et de cadres commerciaux en chercheurs et ingénieurs. Si le CIR a un effet très positif pour les microentreprises et les PME qui emploient des ingénieurs-chercheurs pour concevoir et produire de la haute technologie qui dispose de marchés de niche, il a toutefois un effet largement négatif sur la R&D des moyennes et grandes entreprises. Les rapports de l’OCDE, de la Cour des Comptes ou de France Stratégie (1) ont montré que le CIR est avant tout un contournement des règlements européens sur les aides directes aux entreprises et n’a aucun effet ni sur l’emploi ni sur l’investissement en R&D. Les effets indirects sont en réalité bien pires, puisque en privant de financement la recherche publique et l’Université, le CIR détériore l’écosystème français de recherche et de formation. Si les entreprises continuent de délocaliser leur R&D en Asie du sud-est et, dans une moindre mesure, aux USA, c’est pour la qualité de leur écosystème et la dégradation du nôtre. Le décrochage du niveau scientifique et technique en France est alarmant, et le manque de culture scientifique de la classe politique en est le reflet. Les désastreuses réformes du lycée comme l'absence de politique ambitieuse de recrutement et formation des enseignants ont encore accéléré la débâcle.

Comment en sommes-nous arrivés là ? L’enseignement supérieur et la recherche ont connu deux décennies d’incessantes réformes structurelles théorisées par le rapport « Éducation et croissance » de MM. Aghion et Cohen, paru en 2004. Il reposait sur quelques postulats: (i) les financements de l’Université et de la recherche doivent êtres concentrés sur quelques établissements, qui ont vocation à assurer l’activité de recherche et donc d’innovation ; les autres, paupérisés, doivent graduellement être transformés en collèges universitaires en grande partie financés par des frais d’inscription dérégulés ; (ii) les universitaires et chercheurs doivent être mis en concurrence pour obtenir les budgets nécessaires à l’exercice de leur métier ; (iii) l’Etat doit accompagner l’essor d’un enseignement supérieur privé lucratif. Ce dernier volet a parfaitement réussi. Les moyens qui manquent au service public se retrouvent par exemple dans les 25 milliards € consacrés  à l’apprentissage et à l’alternance et captés par un secteur privé de piètre qualité (2). Pour le reste, ces croyances infondées ont engendré bureaucratisation, paupérisation, précarisation et participé au décrochage pointé par le rapport Draghi. Il en résulte une perte de sens pour l’Université (3), conçue pour produire, transmettre, conserver et critiquer les savoirs, et réformée au prétexte de produire de la croissance économique — avec un résultat à l’exact opposé des promesses de prospérité.

Concevoir un système d’Université et de recherche conforme aux défis du XXIe siècle suppose de se projeter à 10 ou 20 ans, dans une société profondément transformée, qui aurait triomphé des crises qui la frappent et qui ait retrouvé vitalité, espoir et envie d’ouvrir des horizons communs désirables. Dépasser la crise politique et instituer une démocratie effective suppose une formation à la citoyenneté permettant de faire vivre un espace public de pensée, de critique réciproque et de délibération. A quelles connaissances, y compris pratiques et techniques, voulons nous que l'École forme pour ce faire ? Surmonter la crise sociale nécessite de traduire les valeurs de la République — liberté, égalité, fraternité — en services publics d’éducation, de santé, de transports, de justice. Juguler les crises climatique et environnementale suppose d’organiser une production agricole, énergétique et industrielle locale, conforme aux besoins de la population. Ce nouvel aménagement du territoire implique un besoin massif de formation et de recherche mais aussi une organisation de l’Université et de la recherche en réseau, qui innerve le territoire. Plafonner le CIR et le conditionner à l’emploi de docteurs en CDI et au paiement de l’impôt sur les sociétés — que moins d’un tiers des entreprises de recherche paient à ce jour — permettrait de financer en grande partie cette politique d’avenir.

Nous projeter dans un avenir meilleur suppose d’une part de comprendre le monde au plus juste et au plus vrai et d’autre part de témoigner d’une attention et d’une confiance dans la jeunesse qui passent par sa formation intellectuelle et pratique et par les conditions matérielles de son émancipation. Mener une politique d’austérité pour l’Université et la recherche serait priver la société d’avenir.

Pétition à signer ici:
https://rogueesr.fr/investir-recherche-universite/

 

Références :   

1. Évaluation du crédit impôt-recherche. France Stratégie,2019.
Consultable en ligne :
https://www.strategie.gouv.fr/publications/evaluation-credit-dimpot-recherche-rapport-cnepi-2021

2. Bruno Coquet. Apprentissage : quatre leviers pour reprendre le contrôle.OFCE, Sciences Po, Septembre 2024.
Consultable en ligne :
https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2024/OFCEpbrief135.pdf

3. Anonyme. Rapport sur l’état des services publics : l'enseignement supérieur. Nos services publics.fr. 2024.
Consultable en ligne :
https://files.umso.co/lib_ufoFEvhlRMwflNFx/owpdyer9vl2kz27e.pdf

 

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D'après une citation de J. Séguéla.



mercredi 2 octobre 2024

RETAILLEAU : POPULISTE, DANGEREUX, MINABLE...



Plusieurs des récentes déclarations de notre ministre de l’intérieur sont très inquiétantes car elles marquent un virage sensible vers les positions de l’extrême droite. Clin d’œil aux idées nauséabondes du Rassemblement National (RN) qui pour le moment soutient le gouvernement Barnier, ou plus grave, alignement sur ces positions, l’avenir le dira…

Premier dérapage en date, M. Bruno Retailleau affirme dans un entretien donné au Journal du Dimanche - nouvel acquisition de l’empire Bolloré - que « L’Etat de droit, ça n’est pas intangible, ni sacré. C’est un ensemble de règles, une hiérarchie des normes, un contrôle juridictionnel, une séparation des pouvoirs, mais la source de l’Etat de droit, c’est la démocratie, c’est le peuple souverain ». Le propos en lui-même est contradictoire. Pour comprendre cela, il faut savoir que l’Etat de droit est une position qui stipule que l’Etat est l’équivalent d’une personne morale et qu’il est donc, en quelque sorte, responsable de ses actes (pour des explications plus détaillés, voir 1). Ceci implique que l’Etat comme les citoyens, doit être respectueux des règles de droit, auxquelles il est soumis. Quand M. Bruno Retailleau dit que l’Etat de Droit n’est ni intangible ni sacré, il affirme que l’Etat pourrait s’affranchir des règles qu’il impose à ses citoyens. On se retrouverait donc dans une situation où le pouvoir serait inattaquable, irresponsable. Ce ne serait plus le peuple qui serait souverain, mais le pouvoir en place. Bref, on se trouverait plus en démocratie, mais dans une situation de quasi dictature. Dangereux, non ?

Derrière cela, ne nous leurrons pas, se cache une vision d’extrême droite. Rappelons-nous que le Conseil Constitutionnel a censuré une grande partie du texte de loi relatif à l’immigration au motif qu’il s’y trouvait des cavaliers législatifs ou que des dispositions étaient contraires à la Constitution (2). Ceci n’est possible que parce que l’Etat de droit existe. Celui-ci, en effet, dispose que l’Etat doit respecter la hiérarchie des normes, au sommet desquelles se trouve notre Constitution. Or, celle-ci protège non seulement les citoyens français, mais aussi les personnes se trouvant sur notre territoire. Il semblerait que ceci soit insupportable à l’extrême droite, dont tous les discours visent à porter atteinte à l’égalité de traitement des citoyens français et des étrangers, que ces derniers soient en situation régulière ou non ; cette égalité est garantie par notre Constitution. Par ses propos, M. Bruno Retailleau s’inscrit donc dans la droite ligne du RN.

Deuxième dérapage en date, les propos tenus toujours par M. Retailleau sur l’immigration qui ne serait « pas une chance pour notre pays ». Il ajoute que l’immigration n’est pas une chance car nous ne serions « pas capables d’accueillir » et parce que l’immigration concerne aussi « des individus qui peuvent parfois être dangereux ». On est ici en pleine démagogie populiste, en plein amalgame. Sur ce sujet, il ne faut cependant pas se voiler la face, et donc nier l’existence de problèmes liés à l’immigration, mais il faut aussi raison garder et examiner la situation en termes de rapport coûts / bénéfices, aux sens économique, humain, social… J’avais écrit plus tôt (2) que ce discours « désignant l’immigré comme un délinquant voire un criminel en puissance, un opportuniste, venu ici pour profiter des allocations chômage ou du système de santé » était totalement erroné. J’en voulais pour preuve le fait que l’INSEE dans ses données 2019 indiquaient que la France et son activité économique bénéficie de « la présence de quelques 250 000 artisans, 400 000 cadres, 400 000 contremaitres, et 1 600 000 employés ou ouvriers immigrés ». Je peux attester également qu’il suffit de lever le nez de son écran de télé et de CNews pour s’apercevoir du nombre d’immigrés travaillant sur les chantiers du BTP ou sur nos routes, nos voies ferrées, etc. Je connais pas mal de patrons de petites et grosses boites qui m’indiquent que ces immigrés occupent des emplois que les bons petits Français bien blancs, bleus ne veulent pas occuper… Dans d’autres domaines, nous sommes confrontés à des pénuries de compétences. Il suffit de prendre rendez-vous dans un hôpital ou de se rendre dans les services d’urgence, par exemple à Bligny ou à Dourdan, pour voir que les services ne fonctionnent que grâce à la présence de médecins, infirmiers et aides-soignants d’origine étrangère… Nos labos de recherche également fonctionnent avec 20 à 25 % d’étudiants ou de thésards étrangers. Rappelons aussi que selon l'Insee, en Île-de-France, 60% des aides à domicile sont des immigrées, comme le sont 50 % des cuisiniers et 40 % des employés de l’hôtellerie-restauration. De même, selon la Dares, en 2017, près de 40 % des employés de maison étaient issus de l'immigration. Je conclurais cela en citant un rapport de l'Institut Montaigne (4) de 2020 qui indique que la Seine-Saint-Denis, département qui comprend la plus grande part de personnes issues de l'immigration en France (31,6 % selon l'Insee), est « le 8e département contributeur au financement de la protection sociale et celui qui reçoit le moins de protection sociale par habitant ». Exit donc le mythe de l’immigré profiteur. Bref, on perçoit dès lors le fait que remettre tout le monde dans des charters pour l’Afrique, l’Asie ou n’importe où n’aura qu’une seule conséquence : l’appauvrissement de notre pays, et l’arrêt du fonctionnement de nombreux services.

Plusieurs personnalités étrangères ou françaises d’origine étrangère ont par ailleurs réagi aux propos insultants de M. Bruno Retailleau. Je cite ici un excellent article du Huffington Post (3) qui donne la parole à ces personnes. « Mes parents ont immigré en France. Ils nous ont poussés, mon frère, ma sœur et moi à faire des études, à évoluer, à vouloir nous en sortir. Je suis avocat. Je suis élu. Mais merci Monsieur le ministre de me le rappeler : ce n’était pas de chance, pour la France » (Me. Seydi Ba, avocat au barreau de Paris). « Ce ministre vient de jeter sous le bus l’ensemble des Français issus de l’immigration, dont la présence au sein de la communauté nationale serait une malchance. S’il ne démissionne pas, c’est que nous sommes officiellement entrés dans un régime raciste » (Joan Stavo-Debauge, sociologue au CEMS-EHESS-Paris). « Non Bruno Retailleau, l’immigration est depuis toujours une chance pour les migrants et pour la France. Pour moi, comme beaucoup d’immigrés, la France m’a tout donné et je lui ai tout donné » (Mahmoud Zureik, épidémiologiste, directeur de recherche à l'INSERM). « Bruno Retailleau est une honte pour la France » (Nassira El Moaddem, journaliste à I-Télé, Canal+, France 2 et France Inter).

Je vais ajouter ma voix à celles qui précèdent. Il se trouve que malgré mon patronyme, je suis plus « étranger » que Français, ce qui ne m’a pas empêché, je peux le dire maintenant puis que ceci est prescrit, d’avoir été accrédité « confidentiel défense » et « secret défense » pendant mon service militaire en Allemagne… En ce qui concerne ma généalogie, ma mère était italienne. Mon père, né d’une mère italienne et d’un père né en Bolivie d’une famille française émigrée, est resté pendant plusieurs années de « nationalité incertaine ». Cela ne l’a pas empêché d’être mobilisé en 1936, puis en 1939, de combattre lors de la seconde guerre mondiale dans les forces française libres au sein de l’escadrille Gascogne. Ses opérations en Afrique du Nord, en Italie et en Allemagne lui ont valu la médaille militaire et la croix de guerre. Il a plus tard travaillé pour le consortium Euratom à Ispra sur le projet de réacteur atomique d’essai, ainsi qu’au sein des centrales de Marcoule et Cadarache, où il était auditeur de sécurité électrique. Plus tôt, entre les deux guerres, mon grand-père, lui, a œuvré pour les services secrets français, le « deuxième bureau ». Au sein de l’ambassade de France à Lisbonne, et officiellement représentant en machines à coudre (sic !), il a mené plusieurs missions en Afrique du nord et au Moyen-Orient. Au décès de mon père, lorsqu’il a fallu prouver que ma mère était française pour lui permettre d’obtenir une pension de réversion, cela a pris presque 9 mois. Ni les faits d’armes de son mari, ni ceux de son beau-père, ni les cartes d’identité française de ces trois personnes, ni leurs passeports français, ni leurs cartes d’électeurs n’ont suffit à convaincre le ministère de l’intérieur et celui des anciens combattants des droits de ma mère… Par chance, je suis tombé en fouillant un énième fois les papiers familiaux sur une décision du tribunal de police de Paris où mes parents s’étaient mariés, qui stipulait que mon père était supposé français et que par conséquent ma mère l’était aussi de par son mariage… Vous comprendrez pourquoi je considère avec d'autres que les propos populistes de M. Bruno Retailleau sont non seulement dangereux et stupides, mais aussi et surtout profondément indignes et minables.


Références :

1. Frank Baron. Qu'est-ce que l'État de droit ? Vie publique. Juillet 2018.
Consultable en ligne :
https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/270286-quest-ce-que-letat-de-droit

2. Notre sénateur pris dans un naufrage républicain. Ce blog. Février 2024.
Consultable en ligne :
https://dessaux.blogspot.com/2024/02/notre-senateur-pris-dans-un-naufrage.html

3. Marceau Taburet. Bruno Retailleau pense que « l’immigration n’est pas une chance » pour la France, des concernés lui répondent. Le Huffington Post. Septembre 20204.
Consultable en ligne :
https://fr.news.yahoo.com/bruno-retailleau-pense-l-immigration-093419479.html

4. Hakim El Karoui. Les quartiers pauvres ont un avenir. Rapport de l’Institut Montaigne. Septembre 2020.