L’un des rares points positifs de l’épidémie de CoViD19 est que les Français auront appris quelques éléments de base de biologie. Il est devenu clair pour un grand nombre d’entre nous que tous les virus mutent au cours de leur cycle infectieux. C’est ensuite la pression sélective qui « fait le reste », conservant les mutations les plus adaptées, qui contribuent à ce que l’on appelle la fitness virale, c’est à dire à sa capacité de se transmettre rapidement et se reproduire efficacement.
Dans ce contexte, le mutant du SARS-CoV2 apparu en Angleterre semble plus infectieux que les souches parentales virales déjà connues, tout en conservant le même pouvoir pathogène (c’est à dire une capacité d’induire la maladie) et la même virulence (sa capacité à induire des symptômes plus ou moins graves en lien avec sa capacité de multiplication dans l’hôte). Bonne nouvelle malgré tout, la mutation principale caractérisant ce mutant ne modifie que très partiellement la protéine (les termes soulignés sont définis dans le glossaire ci-dessous) dite Spike, qui se trouve à l’extérieur du virus. Cette protéine Spike est cruciale pour la multiplication du virus, puisqu'elle présente une structure qui permet sa reconnaissance par un récepteur (dit ACE2) situé à l’extérieur de certaines cellules humaines. Cette reconnaissance provoque une invagination de la membrane cellulaire qui entoure alors le virus, lui permettant ainsi de rentrer dans la cellule où il va se multiplier.
Les vaccins autorisés de type à ARN messager (ARNm) ciblent justement la protéine Spike en induisant chez les personnes vaccinées la fabrication d’anticorps dirigés contre cette protéine. Ces anticorps lient la protéine, donc le virus, et le complexe ainsi formé est dégradé par certains de nos globules blancs, permettant l’élimination du virus. La crainte - justifiée - était que les mutations touchant la protéine Spike pourraient empêcher sa reconnaissance par les anticorps, annihilant ainsi l’efficacité vaccinale. La bonne nouvelle que j’évoquais plus haut est que tel n’est pas le cas. Les vaccins actuellement proposés sont a priori aussi actifs contre le « mutant anglais » que contre les souches de SARS CoV2 « d’origine »...
Un autre mutant (ou variant) du virus inquiète davantage les spécialistes. Il s’agit du mutant d’origine Afrique du Sud connu sous le nom de 501.V2. Il semble en effet que la fitness de cette souche soit plus élevée, celle-ci se propageant plus rapidement. En accord, 90% des virus circulant en Afrique du Sud sont du type 501.V2. Cependant la souche ne paraît pas plus virulente. Elle se propage simplement plus vite, avec un effet potentiel défavorable donc sur le fameux « R effectif », c’est à dire le taux de reproduction du virus, rendant le contrôle de la dispersion virale plus difficile. L’autre problème est que la mutation touche une région de la protéine Spike qui est précisément celle qui est reconnue par le récepteur des cellules humaines, et une des régions majeures reconnues par les anticorps vaccinaux. Pour le moment, il ne semble pas y avoir un impact sur l’efficacité des vaccins à ARNm parce que ceux-ci induisent la fabrication d’anticorps qui reconnaissent plusieurs régions de Spike, mais un doute et des incertitudes demeurent*. Par ailleurs, cette mutation pourrait affecter la détection des génomes viraux par la technique RT-PCR, obligeant à revoir la stratégie mise en place pour la détection.
Quoi qu’il en soit, la force des vaccins à ARNm est qu’il sera très certainement possible de proposer une formulation modifiée du vaccin très rapidement, prenant en compte la mutation qui caractérise 501.V2. On peut même envisager de produire si besoin était, comme pour la grippe, un vaccin composé de plusieurs ARNm ciblant les protéines Spike des « souches d’origine » du SARS-CoV2 ainsi que celles des mutants anglais et 501.V2. A ce stade, pas de panique donc, mais vigilance accrue d’autant que le premier cas de malade porteur de ce mutant a été identifié très récemment en France, chez un voyageur de retour d’Afrique du Sud.
*Note ajoutée le 23 février 2021 :
Les vaccins autorisés de type à ARN messager (ARNm) ciblent justement la protéine Spike en induisant chez les personnes vaccinées la fabrication d’anticorps dirigés contre cette protéine. Ces anticorps lient la protéine, donc le virus, et le complexe ainsi formé est dégradé par certains de nos globules blancs, permettant l’élimination du virus. La crainte - justifiée - était que les mutations touchant la protéine Spike pourraient empêcher sa reconnaissance par les anticorps, annihilant ainsi l’efficacité vaccinale. La bonne nouvelle que j’évoquais plus haut est que tel n’est pas le cas. Les vaccins actuellement proposés sont a priori aussi actifs contre le « mutant anglais » que contre les souches de SARS CoV2 « d’origine »...
Un autre mutant (ou variant) du virus inquiète davantage les spécialistes. Il s’agit du mutant d’origine Afrique du Sud connu sous le nom de 501.V2. Il semble en effet que la fitness de cette souche soit plus élevée, celle-ci se propageant plus rapidement. En accord, 90% des virus circulant en Afrique du Sud sont du type 501.V2. Cependant la souche ne paraît pas plus virulente. Elle se propage simplement plus vite, avec un effet potentiel défavorable donc sur le fameux « R effectif », c’est à dire le taux de reproduction du virus, rendant le contrôle de la dispersion virale plus difficile. L’autre problème est que la mutation touche une région de la protéine Spike qui est précisément celle qui est reconnue par le récepteur des cellules humaines, et une des régions majeures reconnues par les anticorps vaccinaux. Pour le moment, il ne semble pas y avoir un impact sur l’efficacité des vaccins à ARNm parce que ceux-ci induisent la fabrication d’anticorps qui reconnaissent plusieurs régions de Spike, mais un doute et des incertitudes demeurent*. Par ailleurs, cette mutation pourrait affecter la détection des génomes viraux par la technique RT-PCR, obligeant à revoir la stratégie mise en place pour la détection.
Quoi qu’il en soit, la force des vaccins à ARNm est qu’il sera très certainement possible de proposer une formulation modifiée du vaccin très rapidement, prenant en compte la mutation qui caractérise 501.V2. On peut même envisager de produire si besoin était, comme pour la grippe, un vaccin composé de plusieurs ARNm ciblant les protéines Spike des « souches d’origine » du SARS-CoV2 ainsi que celles des mutants anglais et 501.V2. A ce stade, pas de panique donc, mais vigilance accrue d’autant que le premier cas de malade porteur de ce mutant a été identifié très récemment en France, chez un voyageur de retour d’Afrique du Sud.
*Note ajoutée le 23 février 2021 :
Une publication scientifique récente fait état d'une efficacité un peu plus faible des vaccins ARN sur le variant d'Afrique du Sud, mais qui sera probablement sans conséquence sur le niveau de protection conféré.
La situation est plus défavorable pour les autres vaccins : les formulation de Novavax et Johnson et Johnson ont montré une moindre efficacité en Afrique du sud, pays majoritairement infectée par son variant.
Le vaccin Astra Zeneca semble lui peu efficace contre le variant sud Africain. En lien, le gouvernement sud-africain a suspendu l'usage de ce vaccin dans son pays.
Crédit photo :
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https://theconversation.com/nouveau-variant-du-coronavirus-sars-cov-2-detecte-en-angleterre-que-faut-il-savoir-152398
Glossaire :
Protéine : Il existe trois grands types de composés biochimiques, communs à tous les êtres vivants, à savoir les sucres, les lipides et les protéines. Les sucres sont décrits plus bas. Les lipides sont, de façon simplifiées, des matières grasses. Ils jouent des rôles fondamentaux dans les cellules, composant de nombreuses membranes cellulaires assurant à la fois étanchéité et plasticité. Les protéines sont des constituant essentiels, et jouent de très nombreux rôles comme éléments de structure des cellules, un peu comme des "échafaudages" ou des "routes" internes aux cellules. D'autres protéines, assemblées en groupes, sont des "moteurs cellulaires" permettant par exemple aux cellules de se déplacer, ou d'incorporer des éléments extracellulaire, par exemple pour se nourrir. Nos muscles sont essentiellement constitués de protéines. Un rôle fondamental est celui des protéines dites enzymes qui assurent les réactions métaboliques des cellules, y compris les division et réplication de l'ADN. Dans le cas qui nous intéresse, ce sont des protéines présentes vers l'extérieur des cellules bactériennes, ou des virus, qui sont susceptibles de déclencher des réactions immunitaires.
Spike : la protéine Spike (ou protéine S) est un composant essentiel du coronavirus. Elle est présente à l’extérieur du SARS CoV2. Elle permet au coronavirus de pénétrer dans les cellules humaines. La protéine Spike est reconnue par un récepteur protéique situé sur certaines cellules humaines, qui se lie avec elle, permettant l’incorporation du virus dans la cellule. Spike est aussi la cible des anticorps produits par l’organisme après l’infection ou vaccination.
ARN messager : les ARN messagers sont produits par toutes les cellules vivantes. Ils correspondent à la copie de chacun des gènes exprimés du génome, copie qui sera lisible par la machinerie cellulaire pour la fabrication des protéines. Les vaccins autorisés utilisent des ARN messagers du SARS-CoV2 qui déterminent la fabrication de la protéine Spike qui entoure le virus, et entraînent leur reconnaissance par le système immunitaire.
Anticorps : ensemble de protéines (associées à des sucres) produites par le système immunitaire en réponse à un composé immunogène et capable de s'associer à lui pour induire sa dégradation par des « globules blancs ».
Glossaire :
Protéine : Il existe trois grands types de composés biochimiques, communs à tous les êtres vivants, à savoir les sucres, les lipides et les protéines. Les sucres sont décrits plus bas. Les lipides sont, de façon simplifiées, des matières grasses. Ils jouent des rôles fondamentaux dans les cellules, composant de nombreuses membranes cellulaires assurant à la fois étanchéité et plasticité. Les protéines sont des constituant essentiels, et jouent de très nombreux rôles comme éléments de structure des cellules, un peu comme des "échafaudages" ou des "routes" internes aux cellules. D'autres protéines, assemblées en groupes, sont des "moteurs cellulaires" permettant par exemple aux cellules de se déplacer, ou d'incorporer des éléments extracellulaire, par exemple pour se nourrir. Nos muscles sont essentiellement constitués de protéines. Un rôle fondamental est celui des protéines dites enzymes qui assurent les réactions métaboliques des cellules, y compris les division et réplication de l'ADN. Dans le cas qui nous intéresse, ce sont des protéines présentes vers l'extérieur des cellules bactériennes, ou des virus, qui sont susceptibles de déclencher des réactions immunitaires.
Spike : la protéine Spike (ou protéine S) est un composant essentiel du coronavirus. Elle est présente à l’extérieur du SARS CoV2. Elle permet au coronavirus de pénétrer dans les cellules humaines. La protéine Spike est reconnue par un récepteur protéique situé sur certaines cellules humaines, qui se lie avec elle, permettant l’incorporation du virus dans la cellule. Spike est aussi la cible des anticorps produits par l’organisme après l’infection ou vaccination.
ARN messager : les ARN messagers sont produits par toutes les cellules vivantes. Ils correspondent à la copie de chacun des gènes exprimés du génome, copie qui sera lisible par la machinerie cellulaire pour la fabrication des protéines. Les vaccins autorisés utilisent des ARN messagers du SARS-CoV2 qui déterminent la fabrication de la protéine Spike qui entoure le virus, et entraînent leur reconnaissance par le système immunitaire.
Anticorps : ensemble de protéines (associées à des sucres) produites par le système immunitaire en réponse à un composé immunogène et capable de s'associer à lui pour induire sa dégradation par des « globules blancs ».
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