Le résultat provisoire avancé hier par le laboratoire américain Pfizer et la société allemande BioNTech, pour spectaculaire qu’il soit, a déjà suscité des réactions importantes. Un effet d’annonce indéniable a agité les médias et entraîné une réponse mon sens disproportionnée en bourse même si les espoirs portés par cette technologie innovante sont réels.
NB: certains termes scientifiques difficiles à comprendre sont soulignés et repérés par un astérisque à leur première apparition. Je fournis un glossaire pour ceux-ci en fin d'article
Dans le cas du vaccin en cours de développement par Pfizer et BioNTech, et de même dans le cas du vaccin en développement chez Moderna, on utilise cette fois-ci des ARN messagers. De façon simplifiée, les ARN messagers sont produits par toutes les cellules vivantes. Ils correspondent à la copie de chacun des gènes exprimés du génome, copie qui sera lisible par la machinerie cellulaire pour la fabrication des protéines. Les vaccins en développement utilisent donc les ARN messagers du SARS-CoV2 qui déterminent la fabrication de certaines des protéines qui entourent le virus, et entraînent leur reconnaissance par le système immunitaire. Mais l’ARN, où l’ADN, ne sont eux pas immunogènes. Toute l’astuce de ce type de vaccination consiste donc à faire que cet ARN messager soit lu par les cellules de l’hôte auquel le vaccin est injecté, en l'occurrence l'Homme. Ces cellules décryptant le message codé par l’ARN messager synthétisent alors la protéine virale immunogène. Pour cela il faut que l’ARN messager rentre dans la cellule et qu’il y soit protégé de la dégradation, qui peut être parfois rapide. Il s’agit là de deux points (l'entrée et la protection contre la dégradation) majeurs sur lesquels ont achoppé les premiers essais vaccinaux utilisant des ARN messagers. Au laboratoire, plusieurs techniques de protection sont disponibles telles que le recouvrement de microparticules de tungstène ou d’or par cet ARN ou « l’enfermement » de cet ARN dans une « bulle » constituée de lipides. Dans le cadre des développements vaccinaux en cours contre le SARS-CoV2, j’ignore la technique précise qui a été développée. J’ignore également quel est le mode d’administration (intraveineux, intramusculaire sous-cutanée) mais je sais que celui-ci joue un rôle déterminant dans l’efficacité vaccinale.
La stratégie développée par ces deux laboratoires, mais également plusieurs autres dont Moderna aux USA est particulièrement novatrice. Habituellement, les vaccins sont dérivés d’éléments viraux ou bactériens, principalement des protéines* ou de longues chaînes de sucres* (sucre s’entendant au sens biochimique, couvrant donc une gamme plus large que le sucre que nous utilisons quotidiennement). La raison est que ces éléments (protéines ou sucres à longue chaîne) sont souvent des antigènes* immunogènes*, donc capables de déclencher les réponses immunitaires. Celles-ci aboutissent in fine à la production d’anticorps* par notre organisme capables de se lier aux antigènes et de provoquer leur destruction par nos globules blancs. Les stratégies de vaccination classiques reposent sur l’injection des virus ou bactéries pathogènes* neutralisées par un agent physique ou chimique mais conservant suffisamment de pouvoir immunogène. Plus récemment on a utilisé des protéines ou des fragments protéiques d’origine virale ou bactérienne purifiées, obtenus par génie génétique, ce qui présente l’avantage de ne pas avoir à cultiver dans les laboratoires pharmaceutiques les pathogènes bactériens ou viraux.
Dans le cas du vaccin en cours de développement par Pfizer et BioNTech, et de même dans le cas du vaccin en développement chez Moderna, on utilise cette fois-ci des ARN messagers. De façon simplifiée, les ARN messagers sont produits par toutes les cellules vivantes. Ils correspondent à la copie de chacun des gènes exprimés du génome, copie qui sera lisible par la machinerie cellulaire pour la fabrication des protéines. Les vaccins en développement utilisent donc les ARN messagers du SARS-CoV2 qui déterminent la fabrication de certaines des protéines qui entourent le virus, et entraînent leur reconnaissance par le système immunitaire. Mais l’ARN, où l’ADN, ne sont eux pas immunogènes. Toute l’astuce de ce type de vaccination consiste donc à faire que cet ARN messager soit lu par les cellules de l’hôte auquel le vaccin est injecté, en l'occurrence l'Homme. Ces cellules décryptant le message codé par l’ARN messager synthétisent alors la protéine virale immunogène. Pour cela il faut que l’ARN messager rentre dans la cellule et qu’il y soit protégé de la dégradation, qui peut être parfois rapide. Il s’agit là de deux points (l'entrée et la protection contre la dégradation) majeurs sur lesquels ont achoppé les premiers essais vaccinaux utilisant des ARN messagers. Au laboratoire, plusieurs techniques de protection sont disponibles telles que le recouvrement de microparticules de tungstène ou d’or par cet ARN ou « l’enfermement » de cet ARN dans une « bulle » constituée de lipides. Dans le cadre des développements vaccinaux en cours contre le SARS-CoV2, j’ignore la technique précise qui a été développée. J’ignore également quel est le mode d’administration (intraveineux, intramusculaire sous-cutanée) mais je sais que celui-ci joue un rôle déterminant dans l’efficacité vaccinale.
L’annonce par Pfizer et BioNTech d’une efficacité vaccinale de 90 % signifie que 90 % des personnes vaccinées ont présenté une réduction de l’incidence de la maladie, donc ont moins contracté la maladie que le groupe vacciné avec un placebo. Cette annonce, effectivement spectaculaire, a engendré, comme je le disais en introduction, une réaction totalement disproportionnée - mais nous en avons l’habitude - des marchés boursiers et spéculatifs. Je n’ai pas un esprit complotiste mais on ne pouvait que s’attendre à ce type de répercussion suite à l’annonce. En lien, l’action Pfizer a grimpé de 8 % en bourse et celle de son partenaire allemand de plus de 15 % à Wall Street, le patron de Pfizer en profitant pour vendre avec profit un petit paquet de ses actions... Or il faut absolument rester prudent. Tout d’abord ce vaccin est encore en phase de test, et les résultats présentés portent sur un tout petit échantillon de personnes (moins d'une centaine), testées par ailleurs peu de temps après la première injection et l'injection de rappel. De plus, même si les populations participant à l’essai représentent une grande diversité ethnique, il est impossible de s’assurer que ce vaccin fonctionnera sur toute la population mondiale. Il faudra aussi s’assurer qu’il protège toutes les classes d’âge, et que son effet perdure dans le temps. Et puis et surtout, il faut souligner qu’il ne s’agit pour le moment que d’un communiqué de presse et en aucun cas d’une communication scientifique.
Les espoirs restent néanmoins réels. Tout d’abord dans le cas de la CoViD-19, ce sont presque 200 essais vaccinaux qui sont en cours sur toute la planète, certains utilisant des stratégies conventionnelles, d’autres des stratégies ARN messager. Le véritable espoir que porte cette annonce, à mon sens, réside dans le fait qu’il est visiblement possible de surmonter un certain nombre des obstacles techniques que pose cette « vaccination », qui relève de la thérapie génétique, et que j'évoquais plus haut. L’autre véritable espoir est que l’on peut envisager que cette stratégie vaccinale soit utilisée vis-à-vis de nombreux agents pathogènes, bactéries ou virus, puisque « il suffit » de disposer de leur génome de d'avoir identifié les protéines immunogènes pour fabriquer facilement en laboratoire la copie ARN messager de leur gène, à introduire dans les cellules de l’hôte. De plus, cette fabrication d’ARN messager se fait essentiellement par voie biochimique ce qui ne nécessite pas l’utilisation de cellules hôtes intermédiaires et donc le risque de contamination par d’autres agents infectieux inconnus. Pour l’anecdote, rappelons que les premiers vaccins antipoliomyélitiques avaient été préparés par infection de cellules de singe contenant un virus (le SV40) susceptible de déclencher la formation de tumeurs chez le rat. Plusieurs entreprises, dont la société Moderna pour les États-Unis, développent des vaccins à l'ARN messager, contre le Zika, le virus d'Epstein-Barr (agent de la mononucléose infectieuse), le très contagieux virus respiratoire syncytial (agent de la bronchiolite) chez l’Homme, contre la rage chez le chien, ou contre différents virus du saumon d’élevage.
Il n’est pas exclu non plus, et plusieurs équipes y travaillent en France et dans le monde, que l’on puisse développer des approches de vaccination à ARN messager dans le cadre de thérapies anticancéreuses. L’idée sous-jacente est de repérer dans les cellules tumorales un antigène caractéristique, d’en rechercher le gène dans les cellules hôtes, d’en réaliser une copie ARN messager, et d’injecter celle-ci dans l’organisme pour tenter d'induire la production d’anticorps dirigés contre cet antigène, donc contre les cellules des tumeurs qui le produisent. Cette perspective est particulièrement stimulante dans le cas de tumeurs affectant des régions d’organes ou des organes non accessibles à des interventions chirurgicales.
Crédit photo :
https://theconversation.com/demain-vacciner-grace-a-ladn-125267
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Glossaire :
Protéine : Il existe trois grands types de composés biochimiques, communs à tous les êtres vivants, à savoir les sucres, les lipides et les protéines. Les sucres sont décrits plus bas. Les lipides sont, de façon simplifiées, des matières grasses. Ils jouent des rôles fondamentaux dans les cellules, composant de nombreuses membranes cellulaires assurant à la fois étanchéité et plasticité. Les protéines sont des constituant essentiels, et jouent de très nombreux rôles comme éléments de structure des cellules, un peu comme des "échafaudages" ou des "routes" internes aux cellules. D'autres protéines, assemblées en groupes, sont des "moteurs cellulaires" permettant par exemple aux cellules de se déplacer, ou d'incorporer des éléments extracellulaire, par exemple pour se nourrir. Nos muscles sont essentiellement constitués de protéines. Un rôle fondamental est celui des protéines dites enzymes qui assurent les réactions métaboliques des cellules, y compris les division et réplication de l'ADN. Dans le cas qui nous intéresse, ce sont des protéines présentes vers l'extérieur des cellules bactériennes, ou des virus, qui sont susceptibles de déclencher des réaction immunitaires.
Sucres : tout le monde connait le saccharose (nom du sucre de cuisine), le glucose ou le fructose, représentants des sucres dits simples. Il existe aussi des sucres à longues chaines, constitués d'enchaînement de sucres simples, tels que la cellulose, la pectine ou l'amidon. Des sucres à longues chaines se trouvent souvent sur la paroi bactérienne, tournés vers l'extérieur des bactéries, et ils sont aussi susceptibles d'être reconnus par le système immunitaire.
Antigène : toute substance capable de se lier avec un anticorps (voir définition ci-dessous), même si ce n'est pas lui qui en a déclenché la production.
Immunogène : toute substance capable de déclencher une réponse du système immunitaire.
Anticorps : ensemble de protéines (associées à des sucres) produites par le système immunitaire en réponse à un antigène immunogène et capable de s'associer à lui pour induire sa dégradation par des "globules blancs".
Pathogène : toute substance ou agent biologique susceptible de causer une maladie.
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